1er Septembre (Partie 1)

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Frigorifié, je remontai le col de ma veste.
Lorsque j'étais sorti de chez moi ce matin là, je ne m'attendais pas à ce qu'il fasse si froid. On avait beau être encore en été, j'avais bien du mal à y croire, surtout avec ce temps étonnamment gris.

Pensif, je levai les yeux vers le ciel sombre. Une brise glaciale repoussa mes cheveux vers l'arrière. J'aurais préféré rester couché... Soupirant, me disant que je n'avais pas vraiment le choix, je tentais de me consoler tant bien que mal.

Le temps semblait refléter mes émotions. Sombre et déprimant. Semblant rappeler continuellement à l'entièreté de mon être ce triste jour de septembre. Je m'élançai dans ma rue, tremblant et abattu, ayant pris soin de fermer le portail au préalable.

J'avais l'impression de ne pas avoir fait ce chemin depuis une éternité : et pour cause, les grandes vacances étaient terminées et ce jour marquait le début d'une nouvelle année scolaire... Je revoyais encore mes voisins lorsqu'ils m'avaient demandé, quelques semaines plus tôt, en quelle classe je rentrais cette année. Je leur avais répondu que je passais en troisième, d'un air peu convaincu. Les deux anciens attendris m'avaient alors submergé de ces phrases que l'on n'entend que trop souvent "ah la la, que le temps passe vite !" "je me rappelle encore quand tu étais haut comme trois pommes !" ou encore "La troisième ! quelle étape fatidique, le brevet, bientôt le passage au lycée... tu te rends compte André, il a bien grandi ce petit bout de chou !"

A vrai dire, je ne les avais pas tellement écoutés et m'étais vite éclipsé, les laissant à leur barbecue à mon avis bien arrosé... Pourquoi tout le monde en faisait tout un plat ? Je ne voyais pas vraiment ce que cette année avait de plus que les autres.

Encore les même cours, encore les mêmes profs, encore tous les abrutis de ma classe dont j'avais - et heureusement - oublié les noms pendant ces deux mois de vacances.
La rentrée... Mouais, le bagne plutôt !


Perdu dans mes pensés, j'arrivais désormais à proximité du collège Jules Ferry. Un endroit peu fréquentable et pas très bien entretenu comme on en trouve un peu partout, mais qui avait l'unique avantage (si on considère que c'en est un) d'être le seul bahut à des kilomètres à la ronde. Il faut dire que la campagne normande ne bat pas des records de population...

Sur le trottoir, je croisai des élèves à la moue aussi dépitée que la mienne. Je me suis alors demandé si je serais vraiment heureux si je n'étais pas obligé d'aller en cours... Cependant je me rendis compte avec un certain effroi que je ne savais même pas répondre à cette question.

Le proviseur, cet homme ventripotent en costard bleu canard et à la bouille enjouée, accueillait les élèves avec des grands sourires et des gestes théâtraux.

- Bonne rentrée ! Quel plaisir de vous revoir ! Bonne rentrée à tous !

Passant inaperçu parmi le flot adolescent, je me faufilais à l'intérieur de l'établissement, conscient qu'il m'était désormais impossible de faire demi-tour. Je restais imperméable à toute la bonne humeur qui émanait de cet homme. (Et personnellement, je pense que parfois, les excès de joie de vivre comme ceux-ci devraient être interdits par la loi !)

Tête baissée, je m'avançai vers le seul visage ici qui ne me donnait pas l'envie irrépressible de rentrer chez moi. Le garçon brun m'accueillit dans un sourire.

- Elim ! Salut mec ! Tu m'as trop manqué !

- On s'est vus hier...

Le principal intéressé fit mine de s'en offusquer. Il savait bien que moi aussi, j'étais content de le voir.

Sous les ailes des AngesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant