11 Novembre

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Le mardi suivant était férié. Tant mieux, l'armistice l'avait emporté sur le théâtre ! 

Je m'étais levé tôt, dans l'unique but de surprendre les oiseaux du jardin à l'éveil, pour pouvoir les dessiner sous des lumières différentes, les pattes dans la rosée.

Alors que je m'en allais, en baillant, prendre un grand bol de céréales, j'entendis la sonnette retentir. Qui cela pouvait-il bien être à cette heure-ci ? 
Je me rappelai alors que j'avais emprunté sa gomme à Paulo pour le contrôle de maths et que j'avais oublié de la lui rendre. C'était sûrement lui qui venait la réclamer. 

J'ouvris la porte sans me poser plus de questions. Cependant, j'eus la surprise de ne pas trouver mon meilleur ami sur le pas de la porte. À la place, il y avait Selena, en salopette grenouille et pull camionneur jaune fluo, un sac à doc vissé sur les épaules. Elle souriait de toutes ses dents.

— Selena... ? Mais qu'est-ce que tu fais là, c'est férié !

— Ah, je te dérange peut-être... dit-elle gênée

— Non, pas du tout.

— Oh tant mieux ! Je pensais, vu que tu es encore en pyjama...

— Ah ! Fais pas attention... la priai-je en rougissant, Et... Pourquoi tu es venue me voir ?

— Aujourd'hui c'est l'armistice ! m'informa-t-elle, plus enjouée que nécéssaire. 

On eut cru qu'elle venait de m'annoncer le scoop du siècle. Je ne voyais pas ce que cela avait d'excitant à part le fait que cette journée fériée nous faisait louper des cours. Devant ma mine interrogatrice, elle sortit de la poche de sa salopette un prospectus qu'elle me fourra sous le nez. Elle s'expliqua :

— Et, en cette occasion, le musée ouvre ses portes gratuitement pour une incroyable exposition sur la Première Guerre Mondiale ! Comme je suis ta tutrice à la vie à la mort, j'ai trouvé que ce serait une formidable occasion de réviser le programme d'histoire !

— Oh, je vois... Mais c'est pas vraiment nécessaire, je suis grave calé en armistice et tout... 11 Novembre, 9 Mai, tout ça tout ça...

— 8 Mai. Allez viens t'as besoin de réviser !

Je ne me fis pas trop prier. À vrai dire, si cela pouvait servir d'excuse pour passer du temps avec Selena, j'étais partant !
Juste le temps de me changer et préparer mes affaires, puis nous étions déjà dans le bus pour le Musée. Je ne voyais pas vraiment l'intérêt d'y être à l'ouverture, mais ma tutrice avait l'air sacrément intéressée par le programme proposé.

Une fois arrivés au musée, elle ne savait pas où donner de la tête, me tirant par la manche d'un côté sur l'autre pour m'apprendre des anecdotes en tous genres sur telle ou telle partie de l'exposition. C'était presque inhumain d'être autant intéressé par les cours d'histoire...
Je la voyais se frustrer lorsqu'elle s'apercevait que j'avais cessé de l'écouter pour me prendre en photo à côté des uniformes de poilus.

Malgré tout, la matinée s'était déroulée dans la bonne humeur, et j'avais tout de même le sentiment d'avoir appris plein de choses, même si je passais mon temps à taquiner ma tutrice avec sa passion mordante pour les deux Guerres Mondiales.

Après la visite, nous reprîmes le bus en direction de la campagne. J'avais fait à Selena la proposition alléchante d'aller nous acheter des sandwichs triangle à l'épicerie du village. Pedro, le gérant du tacos, ayant fermé boutique pour le jour férié, il fallait bien qu'on se nourrisse. 

— Dis, t'es arrivée quand ici ? l'interrogeai-je entre deux bouchées

— Fin août, juste avant la rentrée.

Sous les ailes des AngesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant