Bienvenue à Corporate [Romance paranormale]

Mission 66 : se lier

Assit sur le bord du lit depuis dix longues minutes, Al attend. Sagement. Il se pose tout un tas de questions quand il entend le son de l'eau de la douche se couper. Son cœur se serre : il est stressé, ses mains se frottent doucement entre elles.

Soudain il entend un bruit sourd, celui d'un corps qui tombe.

Immédiatement, il entre dans la salle de bain sans sommation et retrouve Cathy par terre en pyjama Kirugumi. Elle porte sa prothèse pourtant, mais il remarque que sa jambe tressaute de façon erratique.

— Ça va aller, dit-elle en voyant son air inquiet. Je vais me relever.

Il ne l'écoute pas, s'accroupit et la prend dans ses bras pour la porter jusqu'à l'assoit au bord du lit. Rougissante, la jeune femme détend l'atmosphère avec une petite boutade :

— Je croyais que c'était toi la princesse, elle échappe un petit rire, c'est moi qui devrais te porter.

— Tu voudras essayer un jour ? J'adorerais, dit-il sincèrement.

Prise à son propre jeu Cathy échappe un petit rire.

— C'est le "membre fantôme", il la questionne du regard en penchant la tête. Quand je suis stressée j'ai des douleurs : mon cerveau ne comprend pas qu'il manque quelque chose. Je suis habituée, mais parfois ça m'empêche de tenir debout.

Al pose les yeux sur la jambe qui tressaute encore et pose une main sur sa cuisse, espérant que sa chaleur puisse l'aider.

— Je... te stresse ? Demande-t-il penaud.

Cathy l'observe : il manque soudain d'assurance. Pour le rassurer, elle secoue la tête en posant une main sur sa joue. Al ferme les yeux. Un petit silence s'installe entre eux.

— J'ai... toujours le souvenir, il cherche ses mots, de la première fois où tu m'as touché. Je me suis senti si bien que je voulais absolument devenir ton ami : pour sentir encore ta chaleur sur moi.

Dans de doux battements, leurs cœurs palpitent à l'unisson. Cathy le voit fondre comme du miel qui se dilue dans ses propres sentiments. Al rouvre lentement son regard sur elle. Dans la tête de l'homme, plusieurs sensations se mélangent : l'envie, et la peur. Cette même peur qui l'a empoignée cette nuit où ils avaient failli s'embrasser. Pourquoi maintenant ? Il n'y a aucun obstacle désormais entre eux. Des bribes de souvenirs refont surface dans sa mémoire. Des souvenirs sales. Il serre la mâchoire.

Voyant ses préoccupations à travers ses yeux, Cathy saisit délicatement son visage et l'amène doucement vers le sien. Déposant sa bouche sur son front, ses joues, son nez, puis enfin ses lèvres, la jeune femme espère le rassurer.

Ensemble ils prennent le temps de se goûter à nouveau, comme si des lunes étaient passées depuis leur premier baiser. Ils réalisent qu'ils ne pourraient jamais se lasser de leurs étreintes, quelles qu'elles soient. Al ressent qu'il n'a pas envie de se contenter de sa bouche, il veut sentir sa peau satinée sous ses paumes.

— Cathy je... j'ai envie de te toucher, demande-t-il avec un soupçon de honte dans la voix.

La jeune femme ne l'a jamais vu aussi hésitant. Où est passée son assurance ? Son expérience tant vantée par les autres ? Al n'ose pas la regarder dans les yeux : il ne sait pas comment s'y prendre avec elle. Elle qui est si spéciale à ses yeux. Il pourrait la fixer, voir ce dont elle fantasme pour le lui offrir. Mais ce n'est pas ce qu'il veut.

Cathy porte ses doigts sur la fermeture éclair de son Kirugumi et la descend avec une extrême lenteur, dévoilant sa gorge, pour l'ouvrir jusqu'à son nombril. Al rougi lorsqu'elle lui prend la main pour poser sa paume au milieu de son thorax. Il sent que son cœur bat aussi fort que le sien. La petite main de Cathy, posée sur le lit, vient cherche celle de Al et croiser ses doigts avec les siens. Il sent la poitrine de son aimée se gonfler dans une respiration plus profonde.