Chapitre 3

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Il m'a fallu qu'un regard. Qu'un seul.

Peut-être que j'ai lu trop de romans d'amour. Peut-être que ma maladie me fait perdre la tête. Ou peut-être que c'est le coup de foudre...

Ah, ce fameux coup de foudre! Jamais je ne l'ai chercher et je ne pensais pas le trouver un jour. Mais il vient toujours à nous au moment où on s'y attend le moins. Comme présentement, dans un hôpital. Sérieusement, qui rencontre son âme sœur dans un hôpital ? Dans les histoires d'amour, ça arrivent dans un endroit idyllique, comme à la plage sous un magnifique couché de soleil, ou encore à Paris, sous la tour Eiffel. Mais certainement pas dans un hôpital, où les murs sont tous blancs et où la bouffe est médiocre.

«Hey, reprends-toi ! pense-je. Tu ne connais même pas ce garçon !»

Je me rends soudain compte que je le fixais pendant tout ce temps.

- Je suis si beau que ça ? demande le garçon sur le lit d'hôpital, avec un petit sourire en coin.

Je me ressaisis et, à la place de répondre, je croise mes bras et fronce les sourcils.

- Je croyais que mon bandage sur mon front allait gâcher mon charme, rajoute-il, mais ça a bien l'air que non.

Je n'avais même pas remarqué le bandage. En le regardant une seconde fois, je constate qu'il est dans un sale état. Des tubes le relient à des machines et il a un gros pansement tout autour de sa taille.

- Qu'est-ce qui t'est arrivé ? dis-je finalement.

- Accident de voiture.

Un moment, son sourire disparaît et il devient sérieux. Mais ça ne dure qu'un instant, ensuite il retrouve son regard espiègle et ajoute :

- Je t'ai vu la nuit dernière.

Je reste bouche-bée.

- Je ne croyais pas que tu t'en rappellerais.

- Il faudrait que je sois mort pour l'oublier.

Je ne sais pas s'il blague ou non, mais sa remarque me met mal à l'aise. Je reste muette.

- En tout cas, reprend-il, tes craquelins avaient l'air délicieux ! Je ne sais pas où tu les a trouvé mais j'aimerais bien en avoir moi aussi. La bouffe ici est pas ce qu'on appelle un délice...

Je ris. Il me regarde et souris à son tour.

Moment de silence. Je piétine sur place, mal à l'aise.

- Bon, et bien... au revoir.

On voit à quel point je suis douée pour maintenir une conversation.

Je me retourne et m'apprête à sortir de la chambre sans ajouter un mot, quand le garçon s'écrit :

- Attends ! Je connais même pas ton nom !

J'hésite, mais finis par répondre :

- June Roberts.

Il sourit.

- Enchanté. Et moi c'est Alex. Alex Young.

À ce moment-là, une infirmière entre dans la pièce et se penche vers le dénommé Alex pour lui changer son bandage.

- Je vais y aller, dis-je. Au revoir...

Et je pars.

En marchant dans le couloir, il m'a fallu un moment pour me rappeler que j'étais dans un hôpital, emprisonnée et malade. Que j'allais sûrement mourir bientôt. Et je me sens naïve car, durant un instant, j'avais oublié que ma vie est présentement ici, dans cette bâtisse isolée de la réalité. Durant un instant, j'ai ressenti un sentiment de liberté et, durant un instant, j'ai cru que j'étais normale, que j'avais une vie normale. Mais ce n'est pas le cas. Je vais mourir. Et je ne peux me permettre de tomber amoureuse...

stay aliveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant