Chapitre I : L'alba del risveglio

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- IAGO

Chicago, Hyde park, Illinois


— Viens par ici, mon garçon, m'interpelle mon père en raccrochant son téléphone.

Un geste qui marque la fin de sa conversation et le début de la nôtre. Il m'invite à m'asseoir à ses côtés et me tend un verre de vin, une invitation silencieuse à partager un moment de tranquillité avant la tempête potentielle de ses plans.

Pendant ce temps, mes deux jeunes frères, incarnations de la malice juvénile, s'emploient à tester la patience de notre mère avec une énergie inépuisable.

— Pas de téléphone à table, leur rappelle-t-elle fermement.

Malgré leurs protestations et tentatives de négociation, un regard de ma part, plus sévère, suffit à les convaincre de se plier aux règles.

— D'accord, d'accord, c'est bon, concèdent-ils finalement.

Le cadre est idyllique en ce début d'août, sous les pruniers en fleurs qui nous offrent leur ombre et leur beauté. Carlotta, avec son talent culinaire habituel, nous régale d'une soupe Minestrone enrichie des légumes de l'orangerie, et d'un Saltimbocca alla Romana à se damner.

Cependant, malgré la convivialité du moment, mon père semble absorbé par ses propres pensées. Il parle peu, mange à peine, son regard souvent perdu dans le lointain ou fixé sur sa bague. Cette bague, héritage de mon grand-père, semble être pour lui un objet de profonde réflexion.

Sans jamais exprimer ouvertement sa peine, sans une larme versée, je sens qu'il est habité par un sentiment de manque, un vide laissé par cette perte. La complexité de ses émotions, souvent masquée par une façade de dureté et de contrôle, transparaît dans ces moments de silence, révélant l'homme derrière le parrain.

Après le dessert, mon père lance un regard appuyé à ma mère et à mes frères. C'est un signal discret mais clair, les invitant à quitter la table, nous laissant seuls pour une conversation qui promet d'être d'une gravité particulière. Ils comprennent immédiatement, se levant avec une synchronisation qui témoigne de la routine de ces moments.

Alors qu'ils disparaissent doucement, il se tourne vers moi, son visage éclairé par les derniers rayons du soleil qui filtrent à travers les branches des pruniers. 

— Mio figlio... (mon fils), commence-t-il. Jusqu'où serais-tu prêt à aller pour notre famille ? Pour préserver ces moments de bonheur, cette paix qui nous est si chère ? Quelles limites serais-tu prêt à franchir ?

Sans hésiter, ma réponse fuse, sincère et déterminée.

Aucune, absolument aucune.

Mes yeux ne quittent pas les siens, cherchant à y lire ses pensées. Pourtant, malgré ma conviction, ses mots sèment en moi une graine d'incertitude, laissant présager une ombre que je n'avais pas anticipée. La conversation prend alors un tournant inattendu.

— Sais-tu pourquoi je t'ai nommé "Iago" ?, me questionne-t-il, éveillant ma curiosité.

— En référence à la pièce de Shakespeare, C'est ce que tu m'as toujours dit.

— Oui, mais sais-tu pourquoi j'ai choisi ce nom, précisément ?

— Parce que c'est ta pièce préférée, je suppose ? je réponds, tentant de déchiffrer l'énigme de son interrogation.

Un sourire amer étire ses lèvres alors qu'il allume son cigare, un geste empreint d'une certaine lassitude.

— Si seulement tu accordais moins de temps aux femmes et davantage à tes études, tu saurais qui était réellement Iago, dit-il, la fumée de son cigare se mêlant aux dernières lueurs du jour.

Il se penche ensuite en avant, les coudes appuyés sur ses genoux.

— Durant mes années à l'université, j'ai dû suivre un cours sur la littérature anglaise. Je pensais que ce serait un fardeau, inutile pour un homme d'affaires. Puis, nous avons abordé la pièce "Le Maure de Venise".

Il marque une pause, comme pour rassembler ses pensées, ou peut-être pour donner plus de poids à ce qu'il s'apprête à dire.

— Tandis que mes camarades s'émouvaient devant la tragédie d'Othello, j'étais captivé par Iago. Cet homme, toujours un coup d'avance, possédait une compréhension aiguë de la nature humaine, manipulant les autres avec une aisance déconcertante.

Il marque une pause dans son récit et prend une bouffée de son cigare.

— Ce qui m'a le plus fasciné chez Iago, c'est sa capacité à contrôler. À instiller le doute, à jouer sur les peurs et incertitudes tout en gardant son calme olympien.

— Où veux-tu en venir, papa ? je demande

— J'ai besoin de toi, mon fils. Cette fois-ci, il ne s'agira pas de force, mais de manipulation. Je veux que tu sois mon Iago, un maître de la persuasion

— Dans quel but ?

— Pour détruire les De Luca une bonne fois pour toute. Ils nous ont pris trop pendant toutes ces années. Il est temps de rectifier cela.

Les pièces du puzzle commencent à s'assembler dans mon esprit

— Comment ? 

—  Nous avons retrouvé la fille de Vincent De Luca. Elle vit dans une petite ville du New Jersey, pas très loin de son père.

— Tu veux que je la tue ? je demande, un léger sourire en coin

– Il ne s'agit pas simplement de la tuer. Avant de réduire les De Luca en cendres, j'ai besoin que tu t'immisces dans la vie de cette fille. Manipule-la. Je veux toutes les informations possibles  sur son père : ses associés, ses fournisseurs, ceux qui font appel à ses services, jusqu'à sa pute préférée . Quand le moment sera venu, nous les exterminerons tous, à commencer par le fils caché, l'héritier de leur empire. 

— Tu envisages de prendre leur territoire ?

La question est plus une confirmation qu'une interrogation. Je connais déjà la réponse.

— Bientôt, et grâce à toi, ce sera notre territoire, affirme-t-il.

New York.

L'ambition de mon père transcende les limites de Chicago, visant à étendre notre emprise jusqu'aux rives de l'Atlantique.

Les informations que nos lieutenants ont pu récolter révèlent que Vincent De Luca a deux enfants : un fils illégitime, né d'une mère dont l'identité reste un mystère, et une fille issue de son mariage avec une Américaine. C'est sur elle que nos plans se concentrent désormais.

Carlotta s'approche avec une discrétion professionnelle, et me tend un porte-documents en cuir gravé de mes initiales. Mon père, d'un geste nonchalant, m'indique que ce porte-documents contient tout ce dont j'aurai besoin pour infiltrer la vie de ma futur cible.

— Fais-en bon usage, me conseille-t-il avec un ton qui n'admet aucune réplique.

À l'intérieur, je trouve une mine d'informations : fichiers médicaux, documents administratifs, dossiers scolaires... Une véritable feuille de route pour la rendre vulnérable.

Alessia De Luca.

J'ai toujours eu un faible pour les filles dont le prénom se termine par un "A"

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L'alba del risveglio : "L'aube du réveil".

Hello ! 🤍

J'espère que vous allez bien et que vous avez apprécié ce tout premier chapitre !

N'hésitez pas à me faire part de vos impressions.

De plus, je suis curieuse de connaître vos réflexions sur les projets du père de Iago.

 Quelles sont ses intentions ?

Vos retours sont précieux et j'ai hâte de découvrir la direction que vous allez prendre dans la suite de l'histoire


~ De mon cœur a vos yeux.
Manelle.

Échec de l'OmertàWhere stories live. Discover now