Chapitre 31

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Micah

Je me réveillai avec la bouche pâteuse et la mère de toutes les migraines en train de me marteler le crâne. Ma gorge était sèche et mes membres tordus dans une posture qui ne m'était pas naturelle. Instinctivement, les yeux fermés, je cherchai le verre d'eau que je gardais sur le chevet bordant le lit douillet que m'avait attribué Adam, et où j'avais pris mes aises, mais une série de révélations désagréables se glissèrent dans mes synapses et bloquèrent mes gestes. A travers le brouillard de fatigue qui m'avait envahi, j'ouvris péniblement les yeux et je pris soudain conscience de ce qui m'arrivait.

Primo, je n'étais pas dans mon lit aux draps doux, mais affalé sur un sol dur et froid. Secundo, mes difficultés à bouger ne provenaient pas d'un manque de café, mais bien des liens solides qui m'enserraient étroitement les chevilles et les poignets. Tertio, mon mal de crâne ne résultait pas d'une bonne cuite prise la veille, encore que cela ne m'était que rarement arrivé, mais bien de l'attaque à laquelle nous avions succombé. La mémoire me revint comme une claque sèche en plein visage. Pris de panique, je sentis mon pouls s'accélérer dans mes veines et mes muscles se bander sous ma peau pour se libérer des entraves qui me retenaient. Je me cambrai tel un poisson au bout de l'hameçon à plusieurs reprises, mais sans succès, sinon une morsure douloureuse des liens sur mes os et mes tendons. J'inspirai profondément et me mordis l'intérieur de la joue pour récupérer mes esprits. J'avais des courbatures partout, comme après un abus de sport et étrangement, cette sensation très familière me rasséréna un peu. M'obligeant à garder mon calme, j'entamai un rapide état des lieux de mes fonctions vitales et à part ce putain de mal de crâne, je fus rassuré de me sentir à peu près moi-même. Je me souvenais de tout ce qui avait précédé mon évanouissement et en l'absence d'autres symptômes tels que la nausée ou une vision trouble, j'écartai l'hypothèse d'une commotion cérébrale. En revanche, mes nerfs irrités et mes cellules éprouvées me rappelaient la souffrance intense d'à peine un dixième de secondes que j'avais ressenti juste avant ma perte de conscience et j'en reconnus l'origine, pour l'avoir expérimenté lors de mes entraînements avec Serguei. Tout comme j'avais déjà eu à me réveiller avec des sous-vêtements imbibés de pisse, constat humiliant qui me fit grimacer. Ces connards m'avaient eu avec une saloperie de taser et moi, je n'avais rien vu arriver.

Je cillai à plusieurs reprises, accommodant mes yeux à la lumière tamisée et en gémissant de douleur sous les carillons qui attaquaient mon pauvre cerveau, je relevai la tête pour étudier ce qui m'environnait. J'étais dans un bâtiment immense, mais étonnamment vide, dépourvu de fenêtres, à la forme arrondie et aux murs de tôle grossière. Le sol, rugueux, était fait de béton brut recouvert de terre humide et de débris végétaux qui me chatouillaient le nez. Tout semblait vétuste et abandonné et à plusieurs endroits, le jour filtrait à travers la paroi dans des fissures rouillées que personne n'avait réparées. Une senteur sèche et piquante s'infiltrait dans mes sinus et je retins un éternuement à grand-peine. J'étais certes un rat des villes, mais les résidus de grains moisis qui s'écrasaient sous mon poids, l'aspect cylindrique du bâtiment et son toit haut perché en forme d'entonnoir d'où pendait un système de poulie, à une bonne dizaine de mètres au-dessus de ma tête, me révélèrent la nature de cette prison. J'étais retenu dans un ancien silo agricole dont les tonnes de céréales avaient été vidés pour le transformer en une geôle géante où j'avais l'impression d'avoir été miniaturisé.

J'avais été ficelé à la manière d'un vulgaire paquet et abandonné à la droite d'une porte épaisse. Le silence régnait et il faisait très frais. En me tortillant comme un ver de terre, poussant sur mes bras et mes genoux, je parvins à m'approcher du mur le plus proche et après quelques efforts et deux ou trois chutes de tout mon long sur le béton, je réussis à me redresser en appuyant mon dos sur le métal glacé. Mon champ de vision s'en trouva démultiplié et je hoquetai d'angoisse en apercevant la silhouette suppliciée qui me faisait face. Adam était là, à quelques mètres de moi. Autant dire un univers entier dans la situation d'impuissance à laquelle nous étions confrontés. Mon cœur rata un battement devant son inertie et une peur comme je ne l'avais jamais ressenti déferla dans mes veines, recouvrant mon épiderme de chair de poule et me nouant le ventre. Mais c'était stupide. Le simple fait qu'il soit ligoté tel un rôti prêt à servir révélait qu'il était en vie, sinon nos ravisseurs se seraient donné bien moins de peine pour l'immobiliser.

La Parabole de l'agneau (Mxm terminé)Hikayelerin yaşadığı yer. Şimdi keşfedin