Chapitre 3

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Devant mon hésitation, l'inconnu pose délicatement sa paume dans le bas de mon dos pour initier le mouvement. Quelque chose se déclenche en moi et contre toute attente cela ne ressemble en rien à une alerte. Un sentiment de sécurité émane dans son acte tendre et de son sourire rassurant. Encore honteuse de mon comportement, je dépose mes fesses sur le siège tandis qu'il fait le tour de la voiture pour récupérer le volant, attache sa ceinture et vérifie que je fais de même.

Mal à l'aise de me retrouver dans un espace restreint avec cet homme séduisant que je ne connais pas, mais surtout, avec qui je ne peux pas communiquer aisément, je garde les pupilles rivées sur mes cuisses.

Il me tapote l'épaule pour attirer mon attention et mime avec ses mains un rectangle devant son visage rayonnant, simule avec son index et un clin d'œil, le déclenchement d'une prise de photo. Et là, je rougis à la compréhension de son geste. Si je suis incapable de savoir ce qui trotte dans sa tête grâce à sa voix, lui intègre parfaitement les mots qui sortent de ma bouche. En d'autres termes, il « parle » français.

Oh merde!

Honteuse, j'enfouis ma tête entre mes paumes tandis qu'il se marre en démarrant. Je reste un instant perplexe par le son qu'il produit. Un son agréable qui chatouille mes oreilles et j'ose fantasmer sur celui qu'aurait son timbre. Bercée par le moteur qui vrombit, la pression accumulée se dissipe. Mes paupières tombent de fatigue. Sur le point de sombrer, je sursaute à l'arrêt du véhicule. Je me redresse un peu perdue et regarde autour de moi.

— Où on est ? demandé-je.

Ses deux paumes jointes se collent à sa joue, il penche sa tête et ferme les paupières. Alors je comprends instantanément qu'il est l'heure de dormir, mais je reste la bouche ouverte, charmée par sa moue craquante. Les traits de son visage viril cèdent leur place à un homme beaucoup plus enfantin. Sur ses joues se creusent des fossettes attendrissantes. Son nez fin se retrousse adorablement. Mes yeux s'arrêtent sur les siens, désormais rieurs. Il pousse mon menton vers le haut, histoire de refermer ma mâchoire décrochée et je réalise que j'ai oublié de reprendre contenance. Au moins, mon manque de tact en fait sourire un.

Sortie du véhicule, le vent me rafraîchit les idées alors qu'il fait voler mes cheveux châtains. Mon regard s'attarde sur ce que je discerne difficilement dans la nuit noire. Des voitures, des vans, des tentes et la vérité me percute : nous n'avons qu'une voiture pour deux. Qui dit qu'une voiture dit qu'une tente. Un seul et même lit. Je ne peux décemment pas me coucher auprès d'un homme dont je ne connais même pas le prénom.

— Comment tu t'appelles ? m'entends-je demander du bout des lèvres.

Ses doigts s'activent pour me répondre.

— N... O... A. Noa ?

Il acquiesce.

— Lorine, me présenté-je également.

J'attrape mes affaires dans le coffre et tends son sac à Noa qui œuvre pour défaire les attaches et déplier la tente de toit. En quelques secondes, l'espace de couchage est opérationnel.

— Je... Je vais dormir sur la banquette arrière.

Ses yeux surpris me brûlent l'épiderme.

— Je... je... Je te remercie de m'offrir un toit pour cette nuit. Je trouverai bien une solution pour demain. En attendant, la voiture est à ton nom, je te laisse le matelas.

Sa poigne sur mon avant-bras m'empêche d'ouvrir la portière. Sa bouche s'entrouvre alors que ses iris me sondent, comme pour me voler mes pensées. L'intensité de son regard me coupe les jambes. La douce chaleur de son contact reste imprégnée dans mon esprit.

Iceland dreamOpowieści tętniące życiem. Odkryj je teraz