CAISSIÈRE

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Alors que je me tenais derrière le tapis de caisse, l'après-midi s'étendait devant moi comme une vaste étendue d'ennui ponctuée de bips réguliers des articles scannés. Les heures semblaient s'étirer à l'infini, chaque minute paraissant plus longue que la précédente.

Les clients défilaient, certains pressés, d'autres prenant leur temps, et moi, j'étais là, un sourire poli accroché à mes lèvres alors que je répétais inlassablement les mêmes salutations et les mêmes questions : "Bonjour, comment ça va aujourd'hui ?" "Avez-vous trouvé tout ce dont vous aviez besoin ?"

Certains répondaient avec enthousiasme, partageant des anecdotes sur leur journée ou des nouvelles de leur vie, tandis que d'autres se contentaient de hocher la tête distraitement, absorbés par leurs pensées ou leur téléphone portable.

Entre deux clients, je laissais mon esprit vagabonder, observant distraitement les allées du supermarché, cherchant un semblant de distraction dans la monotonie ambiante. Les rayons alignés comme des soldats en rangs serrés semblaient se fondre les uns dans les autres, une mer de produits étiquetés et colorés qui se répétaient à l'infini.

Le temps semblait s'étirer, chaque minute se transformant en une éternité, et pourtant, je restais là, derrière mon poste de caisse, accueillant chaque client avec un sourire, même si au fond de moi, j'aspirais à quelque chose de plus, à une échappatoire à cette routine écrasante.

Alors que je m'apprêtais à scanner les articles suivants, un jeune homme que je connais trop bien se présente à ma caisse. Mon cœur rate un battement en reconnaissant Antoine, son visage familier éclairé par un sourire taquin.

"Monsieur Antoine," l'accueillais-je avec un sourire chaleureux teinté de surprise.

"Madame Sarah," répondit-il, son regard pétillant de malice. "J'savais pas que tu travaillais ici."

Je laissai échapper un petit rire. "Eh bien, tu sais, on fait ce qu'on peut," répondis-je en plaisantant, tout en passant ses articles sur le tapis de caisse. "Comment ça va depuis la dernière fois ?"

Une lueur d'anticipation brilla dans ses yeux alors qu'il se penchait légèrement vers moi. "T'as des nouvelles du trafic ?" demanda-t-il, espérant peut-être obtenir des informations privilégiées.

Je lançai un coup d'œil prudent autour de nous, consciente de l'importance de nos conversations et de la nécessité de rester discrète. "Pas ici," murmurai-je, lui faisant comprendre de ne pas aborder ce sujet en public.

Son expression se fit plus sérieuse alors qu'il acquiesçait silencieusement, comprenant la gravité de la situation. "D'accord," dit-il simplement, laissant tomber le sujet pour le moment.

"Et toi, ça va ?" demanda-t-il, changeant habilement de sujet.

Je pris une inspiration profonde, essayant de cacher la tension qui sous-tendait nos échanges habituels. "Ça pourrait être pire hein," répondis-je avec un sourire contraint, avant d'ajouter : "Et toi ? Comment se passe ta journée ?"

Notre conversation se poursuivit ainsi, mêlant des banalités et des sous-entendus, chacun de nous sachant que certains sujets devaient rester non dits.

"Bon, je vais te laisser terminer ton travail," dit-il en souriant une fois qu'il eut réglé ses achats. "Prends soin de toi, Sarah."

"Toi aussi, Antoine," répondis-je avec un sourire sincère, regardant avec un mélange de tristesse et de nostalgie alors qu'il s'éloignait.

CHEMIN VERS LA RÉSILIENCE // BAC NORDOù les histoires vivent. Découvrez maintenant