CONFINEMENT CARRÉMENT

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Ça fait maintenant plusieurs jours que je ne quitte plus l'appartement d'Antoine. La douleur de mon agression est toujours présente, mais c'est surtout la peur qui me paralyse. Je suis devenue une véritable ermite, terrée à l'intérieur, incapable de faire face au monde extérieur.

Je n'ai pas remis les pieds à la fac, mes cours de droit pénal et de criminologie attendront. Les journées se suivent et se ressemblent, passées principalement au lit, enveloppée dans des t-shirts trop grands qui appartiennent à Antoine. Ils sentent son odeur, ce qui devrait être réconfortant, mais étrangement, ça me met en colère. Une colère sourde et irrationnelle, dirigée contre lui pour une raison que je n'arrive même pas à définir.

Antoine est patient, mais je vois bien que ça commence à peser. Il essaie de m'aider, de me faire sourire, mais je suis comme une forteresse imprenable.

« J'ai fait des pancakes, t'en veux ? » demande-t-il en posant le plateau sur la table de salon.

Je hausse les épaules, fixant le plafond. « Pas faim. »

Il soupire légèrement, mais ne se laisse pas décourager. « Faut que tu manges un peu. Ça t'aidera à récupérer. »

Je me redresse lentement, une grimace de douleur sur le visage, et attrape un pancake du bout des doigts. « Ça changera quoi, hein ? » murmurai-je avant de prendre une bouchée.

Antoine s'assoit sur le bord du lit, me regardant attentivement. « Écoute, je sais que t'es pas ienb, mais tu vas pas continuer comme ça.»

« T'as qu'à me foutre dehors, si ça te dérange.» répliquai-je avec plus de venin que je ne le voulais.

Antoine se redresse brusquement, ses yeux s'assombrissant de colère. « Comment tu peux dire ça ? » Sa voix monte en intensité, chaque mot frappant comme un coup de marteau.

Je souffle, excédée par cette dispute qui semble sans fin. Plutôt que de m'enfoncer dans cette confrontation stérile, je décide de changer de sujet. « Bon, et cet après-midi, tu comptes faire quoi ? » Ma voix se veut détachée, cherchant à calmer l'atmosphère.

Antoine souffle de frustration, visiblement agacé par mon changement de sujet. « Tu changes de sujet comme ça ? » Il serre les poings, essayant de maîtriser sa colère. Finalement, il cède et répond, sa voix toujours teintée d'énervement. « Rien de prévu. »

Je laisse échapper un petit rire, essayant de détendre l'atmosphère. « Allez, ça ne sert à rien de faire l'énervé. » Je lui attrape les deux joues, tirant légèrement pour le taquiner.

Je remarque qu'il essaie de retenir un sourire, ses yeux trahissant une lueur amusée. Sentant l'occasion de désamorcer la situation, je commence à le chatouiller, mes doigts cherchant ses points sensibles.

« Arrête, tu sais que je déteste ça ! » proteste-t-il en riant malgré lui, son agacement fondant peu à peu.

Je ris de plus belle, heureuse de le voir céder à la bonne humeur. « J'aime pas quand tu fais semblant d'être aigri, ça te va pas du tout ! »

Il finit par éclater de rire, sa colère dissipée par notre moment de complicité. Nous nous retrouvons sur le canapé, à nous chamailler comme des enfants. Je le chatouille sans relâche, et il riposte en essayant de me faire rire sans me faire mal. Nos rires remplissent la pièce, écartant les nuages de tension qui pesaient sur nous.

Soudain, je m'arrête. Les souvenirs de ces trois mots qu'il m'a dits l'autre jour me submergent. Ces mots auxquels je n'avais pas osé répondre à l'époque. Le silence s'installe, lourd de signification.

« Eh, Antoine », dis-je doucement, cherchant son regard. « Je t'aime. »

Les mots flottent entre nous, suspendus dans l'air. Je vois ses yeux s'élargir de surprise avant qu'un sourire éclaire son visage. Voilà, c'est dit. Ce que je pensais est enfin dit. Mon cœur bat la chamade, mais je me sens libérée, comme si un poids énorme venait de disparaître.

Il m'embrasse avec précipitation, comme s'il avait retenu son souffle jusqu'à ce moment. Puis, il se recule légèrement, un sourire taquin étirant ses lèvres.

«Eh bah putain, j'ai bien cru que je m'étais pris un râteau », lance-t-il, ses yeux pétillants d'amusement.

« T'es con », lui dis-je avec un sourire espiègle, le poussant gentiment sur le côté. Nos rires résonnent dans la pièce, mêlant nos cœurs dans une complicité renouvelée.

CHEMIN VERS LA RÉSILIENCE // BAC NORDOù les histoires vivent. Découvrez maintenant