Partie 5

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Je me réveillai douloureusement. J'avais la nausée, un mal de crâne atroce et des douleurs dans tout le corps. Mon humeur morose céda cependant très vite sa place à une sensation de bien-être intense lorsque je pris connaissance de mon environnement.

J'étais confortablement installée dans un lit king-size, bien au chaud sous une couette en plumes d'oie des plus douillettes. La chambre était assez sobre, mesurant environ quatre mètres sur trois, dans des tons taupe et écru apaisants. Une douce chaleur imprégnait la pièce, bien loin du froid glacial que je connaissais depuis maintenant deux semaines, ayant l'habitude de passer mes nuits dans des squats improvisés et très mal isolés. Mon appartement étant devenu inaccessible, j'avais dû faire appel à toute mon imagination pour me débrouiller avec les moyens du bord.

J'avais découvert que la plupart des immeubles qui jouxtaient le mur d'énergie étaient abandonnés et j'avais vu en eux de véritables lieux de prédilection pour m'établir un camp. Je changeais de coin tous les deux jours pour ne pas risquer d'être repérée, profitant au passage des quelques vivres et vêtements que les précédents occupants avaient laissés derrière eux. 

Mais j'avais beau rendre les lieux le plus confortable possible, cela restait des abris de fortunes. Et malgré toutes les couvertures que j'avais pu trouver dans les appartements que je visitais et les feux que j'allumais à proximité de ma couche, je ne parvenais jamais à me réchauffer complètement.

En cet instant, je me sentais toutefois bien loin de toute cette misère. Je n'avais pas ressentis une telle quiétude depuis ce qui me paraissait une éternité.

Le soleil était levé, il me réchauffait de ses doux rayons qui filtraient à travers la vitre, mais c'était surtout grâce au petit radiateur design qui trônait fièrement sur un pan de mur que la température de la pièce était si agréable.

Pour parfaire le tout, une douce odeur de nourriture venait me titiller les narines depuis quelques minutes, ce fût d'ailleurs ce qui me décida à me lever. J'étais tellement bien installée sous cette couette que j'aurais pu rester couchée toute la journée, mais je ne savais toujours pas où je me trouvais et ma curiosité était définitivement piquée.

Je repoussai la couverture à mes pieds et découvris que je portais toujours mes vêtements de la veille, ou du moins ce qu'il en restait. Tant mieux, je me serais sentie bien mal à l'aise si j'avais su que mon bon samaritain en avait profité pour me dépoiler.

Une fois debout, mon regard fut très vite attiré par une note rédigée à la main qui reposait sur la table de nuit. Je m'emparai du post-it, avec une légère appréhension :

« Fais comme chez toi et rejoins-moi dès que tu te sens prête » était-il inscrit sur le petit carré rose fluo, dans une écriture des plus soignées.

Voilà qui était bien mystérieux.

Je relevai les yeux pour embrasser du regard le reste de la pièce.

Elle comptait deux portes, une qui se trouvait juste à côté du lit et l'autre en face de lui, à environ trois mètres de là où je me trouvais. Après une légère hésitation, j'optai finalement pour celle qui était la plus proche de moi. Je posai maladroitement ma main sur la poignée et entrai en prenant une grande inspiration au passage.

Alors que je venais de passer le pas de la porte, la pièce dans laquelle j'avais pénétré s'illumina comme par magie. J'en restais pantoise, je n'avais plus vu une habitation s'éclairer de la sorte depuis que tout était parti en vrille. C'était comme si les récents événements n'avaient eu aucune incidence sur le bon fonctionnement de cet appartement, à l'inverse de toutes les autres résidences de la ville.

La salle de bain dans laquelle je venais de pénétrer était tout ce qu'il y avait de plus moderne, une énorme douche prenant place sur toute la largeur du mur. J'observai cette dernière fixement et me demandai... était-il possible que... Il fallait que j'en aie le cœur net. Je courus presque jusqu'à la commande électronique qui semblait remplacer le mitigeur et, comprenant vite comment elle fonctionnait, je la réglai sur une température et un débit qui me paraissaient adéquats.

Je poussais un cri de surprise en sentant l'eau pleuvoir sur moi. Dans ma hâte, j'avais complètement oublié de me placer à une distance suffisamment respectable du jet. Mais mon cri de surprise se transforma très vite en cri de joie lorsque je découvris que c'était bien de l'eau chaude qui coulait sur mes vêtements. Et comble de tout, la douche était équipée d'un système de luminothérapie particulièrement délectable. Je dansai presque sous le jet, remerciant le ciel pour ce moment de bonheur inattendu.

Cela faisait des jours que j'avais pris l'habitude de me laver au gant, je n'espérais même plus avoir de nouveau l'occasion de goûter au confort d'une vraie douche.

Le moment n'était certainement pas le plus approprié, et la prudence aurait voulu que je rencontre mon mystérieux bienfaiteur avant de penser à quoi que ce soit d'autre, mais j'avais peur de laisser passer ma chance. Qui savait ce qui m'attendait de l'autre côté.

Après tout, le mot disait "fais comme chez toi".

J'entrepris enfin de retirer mes vêtements trempés et profitai pendant un bon quart d'heure de ce nouveau petit coin de paradis. D'ailleurs, en y repensant, j'étais peut-être réellement au paradis, il était tout à fait envisageable que mon sauveur ne soit pas parvenu à guérir mes blessures et que j'ai trépassé la veille, quittant le chaos de Svatantria par la même occasion.

Je sortis de sous la douche à contrecœur et trouvai, par chance, un peignoir posé sur le bord du lavabo. J'en profitai pour jeter un coup d'œil à mon reflet dans le miroir. J'étais étonnée d'avoir encore visage humain, les dégâts n'étaient pas aussi désastreux que ce à quoi je m'attendais. J'avais cru mourir la veille, mais force était de constater que, même si mon corps comptait grand nombre de bleus, j'avais plutôt bonne mine au vu des circonstances.

Je retournai dans la chambre et ouvris la penderie que j'avais repérée un peu plus tôt et qui reposait face à la salle de bain. Elle était remplie de vêtements d'homme.

Je pris les premiers pantalons et t-shirt que je trouvai. Ils étaient trop larges pour moi mais tant pis, je m'étais habituée à porter des vêtements amples depuis quelques temps, je ne serai donc pas dépaysée.

Après les avoir enfilés, je me décidai enfin à quitter la sécurité rassurante de la chambre pour me jeter dans l'inconnu. J'ouvris timidement la seconde porte que comptait la pièce et me retrouvai aussitôt le nez au milieu de deux pectoraux saillants.

Comme s'il pleuvait des anges (Édité)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant