8- A rien y comprendre

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Le jeudi suivant, il est vingt heures trente lorsque je quitte enfin la clinique. Il fait encore très chaud dehors et je prie pour que ma voiture, restée sur le parking durant douze heures, ne soit pas une étuve.

Lorsque je rallume mon téléphone j'ai un appel manqué de mon père et deux sms.
L'un d'eux est de Lena qui vient aux nouvelles, et l'autre est de William :

« J'espère que c'est toujours OK pour ce soir. J'y serai vers 22h30. »

Vingt-deux heures trente. Je ne sais même pas si je vais tenir jusque là, tant je suis épuisée par ces deux jours de travail.

Je me rends compte que je n'ai que brièvement pensé à William ces derniers temps. Il est vrai que je ne saisis toujours pas pourquoi il veut encore me voir. Il m'a dit que je lui plaisais certes, mais je ne peux m'enlever de la tête que je suis une étudiante de vingt ans, sans grand intérêt, quand lui est chirurgien et beau gosse.

Je lui ai fait part de mes angoisses et tourments, et pourtant il est toujours là, prévenant et gentil. Je ne sais pas si cela va nous mener quelque part, probablement pas. Mais je prends le parti de me laisser emporter par cette vague de renouveau. Quitte à me brûler les ailes, je suis maintenant convaincue que j'ai envie d'aller de l'avant et de tourner la page, Ma page. Arrivera ce qui arrivera.

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Plus l'heure approche plus je panique. J'avais beau jeu tout à l'heure avec ma philosophie à deux balles du Mektoub.

William m'a dit qu'il y serait avec ses « copains ». Je ne les connais pas et je regrette d'un coup de ne pas venir moi même accompagnée. Cependant, aucune de mes amies n'est en ville actuellement.

Allez Selena, courage !

Cette fois, j'ai choisi une tenue moins tape à l'oeil, pas de robe. Je vote pour un slim noir et un tee-shirt prune à l'encolure large, qui permet de dénuder les épaules ; une paire de talons compensés d'été et ma veste en cuir, bien que je ne pense pas en avoir besoin.

Le café Drop est un pub populaire et il y a toujours beaucoup de monde. Une clientèle plutôt 30-40 s'y retrouve pour boire un verre et danser sur des musiques un peu « has been » mais festives.
La chaleur peut y être étouffante, mais j'ai peur d'avoir froid en sortant.

Lorsque je pénètre dans le pub, je regrette de nouveau d'y arriver seule. Il y a déjà beaucoup de monde et comme pour chaque personne qui passe la porte, j'ai droit à un reluquage en bonne et due forme. Hommes, femmes, personne n'échappe à l'examen minutieux de la tête aux pieds.

« Pieds », voilà, c'est ça, me concentrer sur les miens, et ne pas soutenir les regards. C'est la méthode dans laquelle j'excelle, pour ne pas me faire draguer.

Traversant la foule, je peine à me diriger vers le comptoir quand une main m'agrippe par l'épaule. William est à un gars de moi, une bière à la main.

Malgré la foule, je ne vois que lui. Il porte un jean et un tee-shirt noir. Il se présente dans un style décontracté qui met en valeur la perfection de ses traits.
Comme à l'accoutumé, William affiche un sourire généreux et comme à mon habitude, mon bas ventre se contracte douloureusement.

— Tu es venue, super ! Viens, on a une table là-haut.

Il m'attrape la main et entame le difficile parcours pour gagner le carré réservé.
Étonnamment, je me sens fière et confiante en marchant dans ses pas.
Je suis amusée par les changements de regards des nanas sur notre passage. Elles zyeutent langoureusement William et quand elles me voient, je perçois en elles toute l'envie de m'accabler de quolibets.

Chirurgicalement vôtre ( Sous contrat d'édition )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant