Le séducteur qui ne savait pas draguer

Prologue : La séduction, plus qu'un art, une passion

Lents et furtifs étaient mes pas lorsque je m'approchais d'elle, avec une infime douceur, plus silencieux qu'une ombre glissant sur un mur.

Mes pieds semblaient presque voler, ne touchant quasiment pas le sol qui s'étendait sous moi. Je progressais sur ce terrain hostile, mètre après mètre, centimètre après centimètre.

Tel le prédateur que j'étais supposé être, je me laissait lentement glisser vers ma proie réduisant de plus en plus l'écart qu'il y avait entre nous.

Ma pauvre prochaine victime me tournait le dos, encore trop insouciante pour se douter de ce qui allait lui arriver dans les secondes à venir. Elle était si seule et semblait si fragile dans ce long couloir, inconsciente du danger qui, tel une épée de Damoclès, s'apprêtait à s'abattre sur sa nuque.

Elle était la proie idéale, je ne pouvais rêver mieux, pensai-je les yeux rivés sur sa longue chevelure sombre. C'était le moment ou jamais. Je n'avais plus le droit de laisser passer ma chance. Je devais passer à l'action et attaquer immédiatement :

— Salut jolie demoiselle. Vous êtes perdue ?

Cette belle brune au corps élancé que j'avais depuis un moment dans mon champ de vision, sursauta brusquement et me dévisagea à travers ses beaux yeux noisettes écarquillés par la surprise.

Prêt à sortir le grand jeu, je lui offris l'un de mes plus beaux sourires que je réservais spécialement pour l'occasion.

Mes sublimes rictus étaient réputés pour faire fondre les jeunes femmes comme de la neige en été. Quoique, c'était assez rare de voir de la neige en été.

Je n'avais même pas à envier la notoriété de ces chanteurs aux mèches blondes puisque sans même avoir besoin de chanter des chansons à l'eau de rose, toutes les femmes dotées d'un minimum de bon sens se jetaient à mes pieds :

— Je suis vraiment désolé, continuai-je en optant pour une mine faussement navrée. Je ne voulais en aucun cas effrayer une fille aussi sublime.

La jeune adolescente aux yeux de biche plia en quatre la feuille de papier qu'elle tenait entre ses mains aux ongles parfaitement manucurés et la fourra dans son sac de cours.

Celui-ci semblait être lourd et devait comporter une dizaine de ces manuels scolaires que je perdais tout le temps.

Étant un parfait gentleman, j'aurais dû proposer à cette jeune femme de lui porter ses affaires pour alléger le poid de la pression qu'exerçait le sac sur ses épaules, mais je ne pouvais pas me permettre de tordre mon dos si droit simplement pour elle. Il y avait des limites à ne pas franchir !

Je savais pertinemment mon sourire aveuglant, mais il était en plus de cela très contagieux. En effet, à peine quelques secondes plus tard la jeune fille releva à son tour le coin de ses lèvres et me répondit avec un petit rire niais :

— Pas de problème, ne t'en fais pas pour moi.

Et comme si mon magnétisme et mon charme naturel l'obligeait à se confier, elle continua d'un ton aimable :

— En réalité je suis nouvelle ici et je ne connais rien ni personne. Je cherchais juste mon casier en fait...

Je savais pertinemment que cette charmante lycéenne était nouvelle à Lincoln. J'avais un œil expert dans l'art de repérer les jolies demoiselles. Quant à elle, avec sa longue chevelure noire, sa peau sombre et ses grands yeux obscurs, je ne l'avais jamais encore vue auparavant.

En réalité, belles ou pas, j'avais l'œil pour repérer les fragiles demoiselles en détresse qui ne demandaient qu'à ce que je vienne les séduire.

— Enchanté, répliquai-je en m'attribuant une voix des plus charmantes, même si j'étais persuadé qu'il lui en fallait déjà moins pour tomber son mon charme.