Mardi de la deuxième semaine

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J'avais été secouée comme un shaker afin qu'on me réveille. Je n'avais pas arrêté de grogner et de maudire intérieurement la personne qui m'avait réveillée. Je m'aperçus au bout de cinq minutes que c'était Antoine, sourire aux lèvres.

Jeanne avait quitté la tente vers trois heures du matin, pour aller faire pipi soi-disant. Alors qu'elle ne revenait pas, j'étais partie à sa recherche et l'avais retrouvée endormie et emmitouflée dans son sac de couchage, sur le canapé du salon. Je lui avais donc ramené une couverture en plus - elle adorait avoir chaud lorsqu'elle dormait - et avais calé sa tête sur un oreiller. Le camping n'était pas fait pour elle, apparemment.

Alors, j'étais revenue dormir dans la chambre. Antoine dormait encore.

Et maintenant, il me réveillait. Les rideaux étaient tirés et le soleil baignait la chambre de sa lumière orangée.

- Flo ? murmurait-il.

Son visage était à quelques centimètres du mien.

- Quoi ? marmonnai-je, la voix pâteuse.

J'arrivai à ouvrir l'œil droit, non-opérationnel jusqu'alors. Il souriait tellement que les coins de ses lèvres pouvaient atteindre ses oreilles. Il ne disait rien pourtant. Je me redressai, manquant de me cogner contre le sommier du lit d'Antoine, et m'étirai de tout mon long.

- Il est quelle heure ? arrivai-je à articuler, avant de bailler à m'en décrocher la mâchoire.

- Cinq heures et demie.

- Putain, mais pourquoi tu me réveilles à cette heure-ci ? Il se passe quelque chose ?

- Joyeux anniversaire, murmura-t-il.

- Vas te faire foutre, Antoine.

Il éclata de rire.

- Je voulais m'assurer d'être la première personne à te le souhaiter.

- Espèce de petit con de mes deux, râlai-je avant d'enfouir ma tête dans l'oreiller. Ferme les rideaux, je veux dormir.

- Je me suis dit que si le monde appartenait à ceux qui se lèvent tôt, comme on dit, ça aurait fait de toi la reine de la journée, pour ton anniversaire.

- Antoine... chuchotai-je, mon murmure étouffé par l'oreiller contre mon visage.

- Je ne veux que ton bonheur pour cette journée.

- Mon bonheur, c'est dormir, dis-je en redressant la tête vers lui.

- Excuse-moi, alors...

Il se releva, et monta sur son lit. Je soupirai.

- Antoine ?

- Oui ?

- Merci.

J'attendis quelques secondes, et souris. Je le voyais pencher sa tête depuis le bout de son lit afin que je le vois. Les gens n'avaient pas le même visage, à l'envers. Celui d'Antoine ressemblait à celui qu'il avait dix ans auparavant.

- Antoine ?

- Oui Princesse ?

Je souris.

- Tu veux venir ?

Il sourit à son tour, puis descendit d'une manière acrobatique de son lit, pour se glisser directement dans le mien. Il ramena la couverture au-dessus de lui, et me serra contre lui.

Sauf que je ne me rendormis pas. Lui non plus d'ailleurs. On resta longtemps en silence, puis on commença à parler. De Jeanne, de mes amis, des siens parce qu'on avait vite fait le tour des miens. Antoine me parlait tout en faisant des petits cercles à l'aide de son doigt sur mon bras. Lui avait beaucoup d'amis, il me parlait des bêtises qu'ils avaient faites, comme de leurs disputes et de leurs meilleurs moments. Il parlait plus de ses amis du lycée et ne me parlait pas de ceux de l'université où il était.

Les gens changentWhere stories live. Discover now