Jeudi de la deuxième semaine

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La première chose que je vus en me réveillant fut le visage d'Antoine, à quelques centimètres du mien. Et la première chose à laquelle je pensais fut nos baisers.

Antoine et moi nous étions embrassés. Fougueusement embrassés. Et je m'étais rendue compte que j'avais attendu ce moment durant des années entières.

Je m'extirpai de mon lit avec lenteur. Antoine dormait à poings fermés, la moitié de son visage enfoui dans mon oreiller. Il était beau quand il dormait. Je me levai et sortis de la chambre sans faire de bruit, tout en pensant à la manière dont je m'étais endormie. Après nous être embrassés, nous étions restés silencieux, les yeux dans les yeux. Aucun de nous n'osait parler. Puis il avait murmuré qu'il fallait que l'on dorme, et il s'était penché pour éteindre la bougie. Et plongés dans le noir, nos lèvres s'étaient retrouvées par elles-mêmes, et après ça, nous nous étions endormis, nos baisers et nos caresses étant la seule berceuse capable de nous faire trouver le sommeil.

Je me rendis dans la chambre de mes parents, qui était vide. Je me faufilai sous la douche dans la salle de bain, et me perdis dans mes pensées. L'eau glissait sur mon corps et je me demandais ce qui allait se passait, maintenant. Comment en étions-nous arriver là ? Comment pouvions-nous être proches, nous quitter, puis nous retrouver et nous embrasser d'une telle façon ?

J'allai directement sur la terrasse après m'être lavée. Le soleil resplendissait, le jardin se baignait dans les rayons chauds et lumineux. La terrasse était trempé et les parents avaient du essuyé la table pour pouvoir s'asseoir à la grande table en bois.

- Bonjour, bien dormi ? me salua mon père.

Bien dormi. Plus que ces derniers jours, en tout cas.

- Pierre a ramené des croissants de la boulangerie.

Je lançai à ce dernier un regard plein de reconnaissance. Il rit, puis me demanda si son fils était réveillé.

- Comment pourrais-je le savoir ? demandai-je nerveusement.

- Eh bien, vous dormez dans la même chambre.

- Ah, euh...

- Je suis là, ne vous inquiétez pas.

Je me tournai vers Antoine. Il avait enfilé un autre t-shirt que celui qu'il portait cette nuit. Son regard se baissa vers moi, et je rougis instantanément avant de faire volte-face et d'enfourner un croissant dans ma bouche.

- On part quand ?

- Dès que vous serez prêts, mais si vous pourriez vous dépêcher, ce serait super, lança ma mère.

Je les regardai un à un. J'avais beau me creuser la tête, je ne voyais pas de quoi ils parlaient.

- On part où, déjà ? demandai-je la bouche pleine.

- C'est pas vrai, Flo, on en parle depuis deux jours, râla mon père.

- On va faire du canoë. On pique-nique là-bas, répondit ma mère.

- Toujours aussi tête en l'air, remarqua Pierre en riant.

J'esquissai un sourire et baissai la tête vers mon verre de jus d'orange. Antoine s'était assis à côté de moi entre temps, et sentir sa présence près de moi ne me rassurait pas.

- Flo ? m'appela-t-il.

Je fis mine de ne pas l'entendre et portai mon verre à mes lèvres. Il soupira et demanda à ma mère de lui tendre un croissant. Je terminai le mien en deux bouchées et partis m'habiller, prétextant qu'on était déjà assez en retard pour perdre du temps à prendre le petit-déjeuner.

Les gens changentWhere stories live. Discover now