Chapitre 1 : Métro, boulot, dodo

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Bip. Bip. Bip.

Je passais inlassablement les articles devant moi, sans vraiment m'en rendre compte, ce même air jovial peint sur le visage depuis plusieurs heures maintenant. Quand le dernier produit fut passé devant la lumière rouge, le client me tendit une petite carte. Je le remerciai, la passait elle aussi devant le scanner et tapotai plusieurs fois sur l'écran.

-Ça vous fera 110 euros et 13 centimes, monsieur, déclarai-je poliment.

Il avait déjà sorti la carte dorée, qu'il inséra dans le lecteur sans perdre de temps. A cet instant, la sonnerie retentit dans tout le magasin.

« Il est vingt heures, votre magasin ferme ses portes. La direction et le personnel vous souhaite une bonne soirée. »

Mon client retira sa carte, la machine sortit son ticket, que je lui tendis avec mon plus beau sourire.

-Au revoir, monsieur, passez une bonne soirée.

-A vous de même, répondit-il avant d'embarquer son sac et de quitter le magasin presque vide.

Le téléphone sonna alors, signe que j'allais enfin pouvoir m'en aller. Je décrochai vivement le combiné blanc cassé et le portai à mon oreille.

-Tu peux fermer ta caisse, la compter et t'en aller, dit simplement Mélissa depuis l'accueil du magasin.

-Merci, Mel.

Je raccrochai, appuyai sur un bouton et le chiffre lumineux qui me surplombait passa au rouge. J'ouvris le tiroir et entrepris de compter pièces et billets. Je fis attention à ne faire aucune faute, et quand la tâche fut finie, je me levai et amenai la boite sombre à l'accueil.

-A demain, lançai-je d'un ton fatigué.

Mélissa m'adressa simplement un signe de la main, et je rejoignis les vestiaires pour me changer. Une jolie fille blonde aux grands yeux gris attendait là, les yeux rivés sur son téléphone portable, la jambe repliée, un pied posé sur le mur carrelé.

-T'es encore là, Lucie ? demandai-je surprise en ôtant mon tee-shirt, que je fourrai maladroitement dans mon sac.

Elle releva les yeux et me sourit.

-Oui, je t'attendais. Je n'avais pas vraiment envie de prendre le bus seule, et de nuit en prime.

-T'as bien raison, on ne sait jamais ce qui peut arriver.

Je finis de m'habiller, passai mon grand manteau doublé d'une moumoute bien chaude et nous quittâmes l'enceinte du magasin.

-Pfiou, dure journée ! s'exclama Lucie en s'étirant comme un chat. J'en peux plus, de ce boulot, les journées passent trop lentement.

Je soupirai.

-M'en parle pas, j'ai fait l'ouverture et la fermeture, aujourd'hui, grommelai-je en replaçant la lanière de mon sac sur mon épaule. J'ai cru que je n'allais jamais sortir de là !

Nous traversâmes la route et parvînmes à l'arrêt de bus à peine éclairé par la lumière jaune du lampadaire. Je m'assis sur le banc et étendit les jambes devant moi. Il faisait déjà nuit et le vent froid pénétrait à l'intérieur de mon manteau, mordant la chair et glaçant le sang. Lucie me parlait de choses et d'autres, mais je n'écoutais pas vraiment, hochant la tête de temps à autres quand elle me posait une question. Mon attention se portait plus sur les ombres dansantes de la nuit, à l'affut de la moindre présence anormale. J'avais l'impression de devenir parano. Cela faisait plusieurs mois que, la peur au ventre, je guettais chaque mouvement, prête à en découdre en cas d'attaque.

Celte Tome 2 : Les héritières de LugWhere stories live. Discover now