Théa

9.

THÉA m'a déjà fait pleurer, j'crois.

C'était en cours d'anglais, la prof demandait "si vous pouviez faire revenir une personne dans votre vie, qui serait-ce ?"

Tout le monde est parti afficher ses "mon grand père" "mon chat" "mon frère".

Puis la prof a regardé Théa.

"Mon amie." sa voix dure qui résonne, ses yeux secs dans le vide qui semblent pas me voir alors que j'voulais soutenir son regard, lui dire que j'étais là.

"Mes condoléances." a répondu la prof, toute gênée.

"Oh non elle est pas morte. Elle veut juste plus faire partie de mon quotidien. C'était la seule personne que je voulais jamais voir partir de ma vie et elle est partie. Elle m'aime plus, elle a tout fait pour moi et elle est partie, elle veut plus de moi maintenant, c'est fini."

Son rire amer au bout des dents qui me perçait le cœur puis les larmes qui ont commencé à couler en torrent le long de ses joues.

Chaise qui chute, elle qui court, qui s'enfuit et moi qui la suit.

"Tu m'veux quoi, bordel", elle a les maux violents Théa ils lui hantent le cœur et l'esprit et ils hurlent dans nos têtes comme des fantômes vengeurs.

"Est-ce que t'es sûre que ton amie t'aime plus ?"

"Je le sais mieux que toi, Timéo. Elle me hait c'est foutu, j'suis la pire personne du monde, elle a donné ce qu'elle pouvait pour moi et j'étais pas capable de la remercier." son sourire mesquin perce ses lèvres et ses yeux rougis s'enflamment. "Ah tu croyais que c'était toi que je voulais faire revenir, Timéo Gaudin ? Tu déconnes, t'es rien dans ma vie. T'es du vent et tu seras ça pour tout le monde. T'es rien. Rien rien rien. J't'ai jamais perdu, en plus, vu que j't'ai jamais eu et que j'ai jamais cherché à t'avoir.."

Elle est belle quand elle me détruit, Théa. Et je me laisse faire, menotté de ma stupeur et prisonnier de mes désirs.

"On est rien pour les gens, finalement, on irait plutôt pas mal ensemble, sauf que je t'ai jamais aimé."

Son silence qui cassent les mots qui résonnent, elle me fixe, pleine de spasmes, et j'dois craquer.

Nos lèvres qui s'écrasent, nos corps qui s'embrasent.

Mes yeux fermés qui se rouvrent; moi en sueur sur mon oreiller trempé de larmes.

Théa me plait c'est indéniable, sauf que je suis le roi du déni et que je vais tout masquer et faire comme si rien ne s'était passé. Comme si je n'avais rien rêvé. Comme si sa vision nocturne m'avait jamais tiré des larmes alors que c'était qu'un mensonge. L'aimer c'est être amoureux du mensonge.