17.Elle

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Je dévale les escaliers à toute allure comme si j'avais le diable aux trousses. J'entends ses pleurs résonner, j'accélère l'allure. Je ne veux plus les entendre. Ils me rappellent que je suis la cause de son chagrin.

Je le laisse au pire moment, je le sais. Mon comportement est celui d'une lâche mais je n'ai plus la force de rester près de lui et le voir souffrir par ma faute.

En sortant, une pluie froide s'abat sur moi avec violence. À cause de notre dispute je n'avais pas remarqué qu'il s'était mis à pleuvoir. Je m'engouffre vite dans ma voiture, la valise posée côté passager. Ce n'est qu'à cet instant que je me permets de souffler. Le temps s'accorde avec cette soirée sordide.

J'attrape mon téléphone dans la poche de mon manteau et compose un numéro que j'ai fait trop souvent à mon goût depuis peu. Entre chaque sonnerie je m'évertue au calme. Mon corps tout entier tremble.

La personne décroche mais avant même qu'elle réponde je lui coupe la parole.

- Allô... c'est... c'est fait. Rejoins-le, s'il te plaît, je ne veux pas qu'il soit seul ce soir.

Je ne le laisse pas répondre et raccroche.

Je n'ai pas envie de m'épancher davantage, surtout pas avec lui. Je ne sais toujours pas ce qu'il me veut exactement et tant que ce ne sera pas le cas, je ferais en sorte de l'éviter le plus possible.

Je quitte ma résidence le cœur lourd, l'imaginant seul et pleurant dans les marches. Je ne reviendrai sûrement pas... ou plus dans les mêmes circonstances du moins. Une page de mon histoire est entrain de se tourner et ça fait un mal de chien. Je n'aurais pas cru qu'un lieu pouvait tant nous importer, mais il a été le témoin de tellement de choses de ma vie qu'il aura toujours une place dans ma mémoire et dans mon cœur.

Quelques dizaines de minutes plus tard, je me gare devant une grande maison d'architecte, celle de ma meilleure amie. Je déteste cette baraque où le fric prédomine mais ce soir je n'ai pas vraiment le choix.

J'adore cette femme, mais sa façon de montrer qu'elle est blindée, m'a toujours saoulée. Une des facettes de sa personnalité que mon mari a toujours détestée, une parmi tant d'autres.

Nous avons toujours été différentes sur de nombreux points. Le physique, notre façon de voir l'avenir mais c'est aussi ce qui nous avait rapprochés. Le Yin et le Yang, voilà comment je nous voyais. Aujourd'hui j'ai la sensation que nous n'avons plus grand chose en commun. Je me rends compte seulement maintenant que nous n'avons jamais été aussi proche que je le pensais. J'ai été plus souvent là pour elle, que l'inverse. Les années ont fini de nos séparer. Mon mari me l'a souvent répété sans que je ne veuille le voir.

Je sais aussi que je vais devoir lui expliquer la situation et qu'elle va jubiler. Elle n'a jamais compris pourquoi j'avais épousé l'homme qui ce soir, à cause de moi, voit sa vie s'écrouler.

Je ferme les yeux quelques instants, j'ai besoin de ces précieuses secondes avant de devoir frapper à sa porte et d'être happée par une tornade brune.

J'ai conscience que les questions vont fuser et qu'elle va m'en vouloir de ne rien lui avoir confié pendant tout ce temps. Mais c'était mon jardin secret, mon havre de paix, je n'y voulais personne d'autre que lui et moi. Une partie de moi que je préférais garder dans l'ombre.

Je souffle un grand coup et ouvre la portière. Go, ma grande ! Ma course est ralentie par la pluie battante. J'ai à peine passée le perron que la porte s'ouvre à la volée et que ma meilleure amie se jette dans mes bras. Elle et ses grandes effusions !!

- Ma chérie, ça va ? Elle desserre son étreinte et me scrute de la tête au pied, l'air de chercher une quelconque trace suspecte sur moi.


Qu'est-ce qu'elle me fait ?

À l'ombre d'une vieWhere stories live. Discover now