Chapitre 47.

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Je suis heureux que l'idée du dîner ait plu à ma mère. Le repas s'est vraiment bien passé dans l'ensemble. Ma mère nous a parlé de son travail, Ariana nous a exprimé son point de vue concernant les stéréotypes de genres et j'avoue avoir été admiratif face à ses propos. C'était un bon moment. Je réalise maintenant que cela faisait longtemps que je n'avais pas passé un moment aussi simplement agréable.

-Oh, Dereck, j'allais oublier. déclare soudain ma mère.

Je détache mon attention d'Ariana sur qui je fixais mon regard et tourne une figure curieuse vers ma mère.

-J'ai eu le médecin de ta sœur au téléphone et il doit nous annoncer une nouvelle.

-Une mauvaise nouvelle ? m'enquis-je.

-Je ne sais pas. Prions pour que non.

-Hum. bronchai-je.

Un court silence s'installa suite à cette nouvelle, mais qui heureusement fût brisé par la voix d'Ariana.

-Dereck, est-ce que tu peux aller me chercher de la moutarde s'il te plaît ? demande-t-elle alors, d'une voix innocente.

-Euh, oui. dis-je, avant de me lever de table en direction de la cuisine.

Maintenant devant le réfrigérateur, je m'empare du produit quémandé et m'interroge soudain de sa nécessité. Ariana ne prend jamais de moutarde, qu'importe le plat. Un doute illogique m'envahit alors. Puis, fatigué à l'idée d'une quelconque réflexion, je haussai les épaules et retournai dans la salle à manger.

-Tiens.

-Ah oui, merci. fait-elle, avec hésitation.

*

Allongé sur mon lit, je m'interroge au sujet de ma sœur et de son état. Que va-t-il nous annoncer ? J'avoue ressentir un soupçon d'appréhension à l'idée de cette nouvelle qu'il va nous apprendre. Je ne pense pas réussir à dormir après avoir su ça. Aussi, le silence environnant de ma chambre n'aide pas. Je décide, pour me changer les idées, de mettre un peu de musique mais à ce même instant, un fond de bruit s'éleva alors. C'est sans aucun doute Ariana; me dis-je avec évidence. Me trouvant désormais devant sa chambre, je toque et réussis à entendre un semblant de réponse m'incitant à entrer.

-Oui ? s'enquit Ariana, allongée sur son lit.

Mon attention d'abord posée sur elle, s'attarda ensuite sur le bruit devenu maintenant une étonnante mélodie.

-Dereck ?

-Qu'est-ce que c'est ? demandai-je.

-Quoi ? La musique ?

J'acquiesce, avec la légère impression d'être un enfant curieux de ce qu'il ne connaît pas.

-Tu ne connais pas ? fait-elle, prise d'étonnement. C'est " I like me better " de Lauv, tu aimes ?

-Non, enfin si... C'est étonnant comme son. répliquai-je, avec difficulté.

-Je trouve les mélodies étonnantes davantage bénéfique pour le moi intérieur, personnellement. rétorque-t-elle, avec confiance.

-Le moi intérieur ? m'enquis-je, dépassé.

-Oui, bon maintenant écoute...

Je lui adresse une figure signifiant mon attente à sa phrase mais elle ne dit rien.

-Oh, je voulais dire "écoute" la musique. reprend-t-elle, plus clairement.

Je me laisse donc tomber sur un coin libre de son lit et débute une écoute attentive à la musique.

-"I like me better when i'm with you"... commença à chantonner Ariana de sa voix apaisante.

Commençant une traduction personnelle de certaines paroles dans ma tête, je réalise qu'elles décrivent partiellement ce que je ressens concernant Ariana.

-Dereck ? Oh là, j'ai l'impression que je te perds. déclare-t-elle, avant de baisser le volume de la musique.

-Non, t'inquiète. fais-je, mêlé d'un rire nerveux.

*

Assis sur les sièges de la salle d'attente de l'hôpital, ma mère et moi essayons tant bien que mal de ne pas penser au pire. Une bonne vingtaine de minutes s'écoulent avant que j'aperçoive notre médecin s'avancer vers nous. Désormais à notre hauteur, il nous salue et nous propose de le suivre jusqu'à la chambre de Sia. Tout au long du trajet, je ne peux m'empêcher d'imaginer le pire. Devant la porte de la chambre de ma soeur, le médecin nous arrête et se tourne vers nous l'air solennel.

-Très bien, je préfère vous avertir avant: votre proche à perdu quelques cheveux dû au traitement. Mais de vous inquiétez pas ! C'est tout à fait normal ! ajouta-t-il, voyant la réaction horrifiée de ma mère.

-Est-ce..est-ce que le traitement l'a fait souffrir ? s'enquit ma mère, les larmes montant aux yeux.

-Cela dépend des patients, mais je dirai que non. répondit le médecin, d'un ton certain.

Le médecin se tourne vers la porte de la chambre qu'il ouvre. Au moment de rentrer dans la chambre, je sens une pression chaude dans ma main droite. C'est ma mère. Elle renferme sa main sur la mienne, comme si elle avait peur de ne pas pouvoir supporter ce qu'elle est sur le point de voir. À cet instant, nous pénétrons dans la pièce à la température légèrement basse comparé au couloir duquel nous venons. Et là, sur un de ces terribles lits aux couleurs pâles, Sia. Une violente pression au creux de ma poitrine m'envahit à la vue de sa personne. J'essaye de ne pas porter attention à sa visible perte de poids ainsi qu'à sa conséquente absence de cheveux à certains endroits de son crâne. Malgré tous ces désagréments physiques, le plus horrifiant est le vide qui s'est installé dans son regard depuis notre dernière visite. Je me positonne au bout de son lit, tandis que ma mère m'abandonne pour s'asseoir aux côtés de Sia. Le médecin s'adresse à cette dernière, ainsi qu'à ma mère et moi.

-Mlle.Hadisson réagit normalement au traitement, ce qui est une bonne nouvelle. Sachant que nous avons maintenant un traitement adapté à votre soeur et à votre fille, nous allons pouvoir le programmer en conséquences. déclare le médecin, visiblement optimiste.

-" Le programmer en conséquences ", c'est-à-dire ? m'enquis-je.

-Hum, et bien cela signifie que désormais, nous pouvons administrer à votre soeur la dose approprié à sa maladie. En vérité, il est impératif de prendre le temps qu'il faut pour s'assurer que le traitement se coalitione parfaitement avec l'organisme de la patiente. Ce qui est visiblement le cas avec votre soeur ! ajouta-t-il, satisfait de son travail.

Mon regard se détache du médecin pour retomber sur ma soeur. Malgré le discours optimiste et convaincant du docteur, je ne peux m'empêcher de trouver les conséquences du traitement désagréables. Je ne savais pas que ce traitement vaudrait de voir ma soeur dans un tel état. J'avoue avoir du mal à réagir normalement. J'affiche malgré tout un léger sourire lorsque Sia m'adresse un regard. À cet instant, une infirmière fait son entrée dans la pièce,  nous salue et s'avance auprès de Sia.

-Mlle.Hadisson, c'est l'heure de faire votre prise de sang et quelques autres tests. Je crois qu'il serait bien que vous attendiez dans le couloir, si ça ne vous dérange pas. dit-elle à l'intention de ma mère et moi, d'un air sympathique.

Ma mère se relève de sa chaise et lâche la main de sa fille avant de lui embrasser le front d'un air maternel. Sia adresse un regard révélant un vide inquiétant à l'intention de ma mère, mais quelques secondes après, un doux sourire se dessine sur son visage désormais lumineux. Ce simple sourire produit une merveilleuse chaleur au creux de moi. Je m'approche à mon tour de ma soeur et, dans un élan d'amour inconditionnel, l'enlace avec l'idée qu'elle est la lumière de mon moi intérieur. Je laisse errer un sourire après avoir déposé un baiser chaste sur son front. L'image de son sourire s'inscrit dans ma rétine tandis que je sors aux côtés de ma mère dans le couloir.

chasse gardée.Opowieści tętniące życiem. Odkryj je teraz