2. Lilith

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N.b. :

J'utilise l'italique pour deux raisons : Retranscrire les pensées du personnage ET utiliser un mot dans la langue d'origine des personnages. Même si la plupart des dialogues devraient être en anglais, pour des raisons évidentes, le texte est entièrement écrit en français. Ceci dit, parfois, Lilith emploie du français et les autres personnages de l'anglais. Je le signale en utilisant l'italique (ouais, je sais c'est confus, là, mais vous comprendrez en lisant ;-) )

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Assise sur le banc accolé à la cabane en bois, Lilith contemplait la lumière de fin de journée se refléter sur les immenses poteaux en acier.

The Lightning Field.

La jeune femme pouvait enfin observer l'œuvre pour laquelle elle était venue se perdre sur ce plateau du Nouveau Mexique. Son regard embrassait les gigantesques pylônes. Elle espérait de tout son cœur qu'ils attireraient la foudre cette nuit-là. En attendant, elle jetait des coups d'oeil furtifs aux nuages sombres, priant les dieux païens de lui accorder ce pour quoi elle avait parcouru tant de kilomètres.

Elle resserra sa veste en laine autour de son corps frissonnant. La fraîcheur de ce début de soirée lui rappelait qu'elle se trouvait à plus de deux mille mètres d'altitude. Helen l'avait d'ailleurs avertie.

— Couvre-toi bien, lui avait-elle dit. Les nuits ont tendance à être froides, même en cette saison.

La jeune Française n'avait pas bougé de son poste d'observation depuis que Helen l'avait laissée seule une heure plus tôt. Elle était fascinée par cette vaste étendue qui s'offrait à elle. Une étendue déserte.

Elle se trouvait au bout du monde. Loin de tous ceux qu'elle connaissait, loin de tous ceux qu'elle aimait.

Libre d'être enfin elle-même, comme elle l'avait désiré en entamant ce périple.

Son estomac émit un faible gargouillis. Elle s'étira pour chasser la raideur qui s'était emparée de ses membres, et décida de rentrer dans la cabane afin de manger la fin du sandwich acheté à l'aéroport.

L'obscurité avait déjà pris possession des lieux, si bien qu'elle fut obligée d'allumer une bougie avec le briquet que Helen lui avait prêté. Tout en regardant d'un air absent la flamme naissante, Lilith songea qu'elle avait eu de la chance de tomber sur une femme aussi prévenante qu'elle. Elle aurait pu la laisser se débrouiller, accepter son argent pour la nuit passée sur le site et ne pas se préoccuper de son bien-être. Elle aurait pu agir comme n'importe quelle autre employée lambda d'une fondation artistique. Après tout, elle était payée par la Dia Art Foundation pour transporter les gens jusqu'à l'œuvre et venir les chercher le lendemain midi. Ni plus, ni moins.

Pourtant Helen s'était assurée que la jeune femme avait bien de quoi se nourrir. Elle avait vérifié que son sac de couchage était assez épais pour la protéger de la fraîcheur nocturne et elle avait pris le temps de se promener avec elle entre les immenses cylindres d'acier, lui racontant toutes les anecdotes qu'elle avait engrangées au fil des années.

Et son sourire était le premier souvenir que Lilith avait tenu à conserver dans son carnet.

Elle en avait noté les contours avec ses mots. Elle en avait gardé la trace, le faisant renaître sur les pages blanches.

La jeune voyageuse tira de la poche avant de son énorme sac à dos un bout de sandwich aplati. Elle commença à mastiquer le pain ramolli.

Ce fromage n'a décidément aucun goût, pensa-t-elle.

After the Storm (sous contrat d'édition)Where stories live. Discover now