8 - Freinage d'urgence

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Léo saisit fermement les épaules de Sy pour la tenir face à lui avant de choquer son front avec la paume de sa main :

_ Tais-toi. Tu réfléchis trop. Je veux m'afficher avec toi parce que je t'aime espèce d'idiote.

Était-ce le choc sur son front ou bien venait-il réellement de dire ça ? Sy n'eut pas le temps de comprendre si Léo plaisantait ou non qu'il posa un baiser sur ses lèvres.

_ Je t'aime. Répèta-t-il. Maintenant cache moi ça avant que je ne te re saute dessus. Enchaîna-t-il en désignant son soutien-gorge.

Léo attrapa le menton de Sy et embrassa rapidement ses lèvres. Il lui sourit et lui claqua même la fesse en se dirigeant vers la porte. Léo enclencha l'ouverture. Il adressa un clin d'oeil à Sy et retourna dans le wagon.

La paume de Sy la faisait souffrir. Elle baissa les yeux sur sa main et s'aperçut que ses ongles étaient plantés dans sa peau. Elle décrispa ses doigts avec difficulté. Lentement, ses yeux remontaient sur son poignet, son bras. La chair de poule la saisissait. Stupéfaite et frissonnante, Sy resta immobile pendant un instant.

Dix mille pensées lui traversaient l'esprit. L'agitation dans sa tête était aussi grande que Wall Street à l'heure d'entrée en bourse, mais son corps restait impassible. Sybille finit par secouer la tête et enfiler son sweat-shirt. Les poings agrippés dans ses manches, l'adolescente tentait de trouver une explication, une interprétation qui traduirait autre chose que le sens latéral des mots de Léo. Portant ses phalanges recroquevillées contre sa bouche, Sy commençait à paniquer.

Et si ce qu'il disait n'était pas une blague ? Si il pensait ça ? Si il éprouvait vraiment ça ? Pouvait-elle lui permettre une telle chose ? Le coeur de Sy s'affola lorsque des réponses contradictoires bataillaient devant ses yeux. Elle n'entendait plus sa voix intérieure, bâillonnée par de douloureuses sensations. Sybille sortit son téléphone de sa poche et rechercha le numéro de son cousin dans le répertoire :

_... Réponds. Souffla-t-elle après la deuxième tonalité.
_ Allô ?
_ C'est moi.
_ Princesse ! Se réjouit Oscar. Alors ? T'as réussi à attrapé ton train ?
_ Oui. Juste à temps... Mais je n'aurai peut-être pas dû.
_ Pourquoi ?
_ Tu avais raison.
_Oh mais j'ai toujours raison ma belle. Se moqua Oscar.
_ Oscar ! Gronda Sy.
_ Désolé. Rit-il. À propos de quoi ?

Sybille souffla. Elle plaqua son dos au mur et tripota nerveusement la naissance de ses cheveux. Elle glissa lentement sur le sol :

_... Il vient de me le dire.
_ Jure ! Apostropha son cousin.
_ Os', je ne sais pas quoi faire.
_ Mais si. Sourit-il.
_Non, je t'assure que non. C'est... c'est trop.
_ Trop d'émotions ? Se moqua Oscar. T'inquiètes tu vas t'y faire.
_ Oscar, je suis sérieuse. Je peux pas...
_ Moi aussi je suis sérieux. Sy, enfin merde. C'est ta dernière année de lycée. T'as pas envie d'en profiter avant de rentrer dans cette putain de vie d'adulte ?

Une vie d'adulte. Une vie qui semblait fade et sans couleur à l'entendre. Une vie remplie de convention et de responsabilité. Bizarrement, Sy ne se sentait pas concernée. Pas parce qu'elle avait toujours vécu en marge de tout ces protocoles. Ni parce que ses parents et Lutz avaient planifié les dix prochaines années et qu'elle n'avait donc pas à y penser.

Sy ne se sentait pas concernée car il lui était impossible de s'imaginer autrement. Elle n'imaginait pas des rides aux coins de ses yeux, ni des enfants en train de faire leurs devoirs dans la cuisine. Elle ne se voyait pas avec un mari, ni avec des dossiers à rendre pour le lundi matin.

L'art de la Nudité - tome II {Terminé}Where stories live. Discover now