Chapitre 21

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Mon coeur s'arrêta de battre l'espace d'un instant. Je sentis le sang s'enfuir de mon visage, des sueurs froides me lacérant le dos. Que voulait-il dire par "nouvelles accablantes" ? L'angoisse inexplicable qui me déchirait les entrailles m'empêcha de sortir le moindre mots, bien que je sentis tous les regards se tourner vers moi. Malheureusement - ou heureusement - personne ne fit un pas vers moi, de par mon titre. Mais il suffit que je croise le regard douloureux de deux hommes de l'assistance pour que je me reprenne. Je devais tenir mon rôle, au moins jusqu'à l'annonce du verdict, car je sentais que si la crainte brûlante qui me déchirait de l'intérieur se réalisait, je ne serais plus à même de me contenir. Impatiente, terrifiée, je jetai mes yeux sur l'homme qui m'avait pendue à ses lèvres. Sentant les visages se braquer de nouveau sur lui, il reprit, la voix altérée : " Nous avons appris que lors de l'attaque, sur la plage, après que la princesse se soit faîte emmenée, le prince Maxime s'est vaillamment battu."

J'avais envie de lui crier d'en finir, de me libérer de cette atroce douleur qui s'employait à attiser mes craintes les plus sombres. Pourtant, comme s'il semblait ne pas entendre mes suppliques muettes, il continua avec un débit de parole beaucoup trop faible pour me permettre d'espérer. "Mais il s'est, lui aussi, fait kidnappé, par d'autres pirates. Jusque là, s'était tout ce que nous savions. Mais ce matin-" Je n'en pus alors je me levai d'un seul coup, renversant ma chaise, surprenant l'assistance, et criai les yeux déjà rouges de larmes anticipées : "Est-il vivant ?!"

Le conseiller planta son regard sur moi, me scindant l'âme en deux. Si seulement il savait qu'il tenait mon coeur entre ses mains, qu'à tout moment il pouvait l'arracher de ma poitrine, dégoulinant de larmes refoulées. Mes mains crispées sur le bois tendre de la table, souffrantes de ces échardes plantées par dizaines, ne reflétait pas même une infime part de toute l'agitation qui m'animait. Son regard refléta la pitié que je semblais inspirer à cet homme. Je crus mourir quand il ouvrit la bouche. Il concéda enfin, d'une voix lente : "Il est bien en vie."

Et ce fut tout ce qu'il me fallut pour éclater en larmes, devant plus d'une dizaine d'inconnus. Je retombai lourdement sur la chaise, qui par je-ne-sais-qui avait été relevée. Me cachant la bouche de mes mains, tentant en vain d'endiguer le flot de mes larmes, libérées au moment de la révélation. Des bras vinrent encercler mes épaules, me recouvrant d'un manteau consolateur. Je pris plusieurs grandes bouffées d'air, et l'air chaud du Royaume de Saphir me calma.

Je séchai mes larmes, tentant de reprendre un minimum de dignité, tandis que les bras protecteur se transformèrent en visage. Akim s'agenouilla devant moi, ayant quitter sa chaise, le regard tendre, presque suppliant, il chuchota : " Par pitié, ma douce, cesse de pleurer. Tes larmes me sont intolérables..." Il embrassa le plus doucement qu'il put mon front, je parvins enfin à me calmer totalement. Il émanait comme une aura protectrice de lui, en cet instant. Peut être était-ce parce qu'il m'avait protégée des regards apitoyés des autres personnes présentes... Il repris place sur sa chaise et fit un geste en direction de Adalburge. Je ne compris ce qu'il souhaitait qu'elle fasse que lorsqu'elle revint avec une trousse de soin. Prenant un petit tabouret, elle s'installa à ma droite, du côté de la chaise non-occupé par la présence du prince. Puis elle me prit doucement les mains. Je ne remarquai qu'à cet instant la table écorchée et mes mains dégoulinantes de sang, tout comme mon épaule, dont la blessure s'était rouverte et avait trempée le bandage d'un rouge écarlate.

Assise tranquillement à me faire soigner, je priai l'homme du regard de continuer ses révélations sur mon frère. Hochant simplement la tête, comprenant peut être mon tourment, il se décida à y mettre fin : "Tôt, ce matin même, nous avons appris qu'il avait été repêché, couvert de bleus et de cicatrices légères, sur une plage du Sud du Royaume. Il était inconscient et ne s'est réveillé qu'il y a quelques heures. Tout ce qu'il put dire avant de se rendormir fut que les pirates l'avaient enlevés, avant de supplier tous ceux qu'il voyait de retrouver sa soeur." Mes yeux me lancèrent à nouveau, mais je retins de justesse la crise de larmes. Il allait bien, il irait bien. C'était du moins ce que je me répétais pour calmer mon coeur tambourinant dans ma cage thoracique. "Il a été immédiatement pris en soin intensif et est hors de danger. Il semble avoir reçu d'horribles traitements lors de, ce qu'il semble être, sa captivité. Il se trouve encore dans le village côtier de Izmir.

Le Joyau de la CouronneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant