10 things I hate about you

Une heure de cours lambda chez les terminales

La sonnerie se fit retentir dans tout l'établissement, et Eren, en élève assidu, se présenta le premier à sa salle de cours où il vint prendre place à sa table attitrée, au deuxième rang. Au programme de cette première heure de la matinée : Français avec l'implacable Keith Shadis.

Rapidement, il se fit rejoindre par ses camarades qui papotaient et qui s'installaient sans se préoccuper de lui, ni même de leur professeur qui les observait, attendant le calme accoudé sur son bureau.

Cependant, le raffut ne finissant toujours pas, l'enseignant se vit obliger de sévir et tapa vigoureusement dans ses mains, attirant d'emblée toute l'attention des terminales. Ceux-ci, effrayées par le regard globuleux de l'homme chauve se turent alors de concert.

Maintenant que le silence régnait en maître, Shadis pouvait commencer son cours. Il quitta donc son siège, un livre à la main, et se mit debout, face à ses élèves en leur demandant :

« - Bon, qu'est-ce que vous pensez de ''Le soleil se lève aussi'' ? » (Roman d'Ernest Hemingway)

Immédiatement, une petite brune au visage angélique encerclée d'une imposante couette leva sa main.

« - Mina ? Interrogea le professeur.

- Oh, j'ai adoré ! C'est tellement romantique ! Répondit-elle d'un air niais en posant sa main contre sa joue.

- ''Romantique'' ? Hemingway ? C'était un vulgaire alcoolique misogyne qu'a passé la moitié de sa vie au crochet de Picasso à lui soupirer tout ce qu'il pouvait. »

Cette intervention exaspéra au plus au point Keith Shadis, qui roula des yeux en constatant -encore une fois- qu'Eren se permettait d'émettre son avis tranché sans en avoir l'autorisation.

« - Par opposition à un prétentieux que personne ne peut sentir ! » Envoya un grand blond au fond de la classe à l'adresse d'Eren.

Mais ce grand blond n'était pas n'importe qui, c'était Erwin Smith, un des élèves les plus riches de l'établissement. De nature suffisant, il adorait jouer de son statut social et de son physique ravageur auprès de tous pour se les mettre dans la poche et ainsi obtenir tout ce dont il souhaitait de leur part. À côté de ça, ou plutôt en plus de ça, un de ses passe-temps favori était sans conteste de mettre en rogne le fils Jäger.

Fier de sa pique, Erwin vint chercher l'appui de son ami et voisin de table, Mike, en lui tapant dans la main. Puis, les deux compères explosèrent de rire.

« - La ferme, grande gueule. » S'écria le professeur au baraqué, qui perdit aussitôt son rictus moqueur.

Agacé, Eren se tourna vers Erwin afin de riposter :

« - Disons que dans notre société être mâle et trou du cul sont des qualités dignes de respect ! »

Suite à cela, la grande majorité de l'assemblée gloussèrent, faisant comprendre à Smith qu'il venait de perdre cette énième joute verbale.

Triomphal, le jeune Jäger se remit bien en place sur sa chaise, face au tableau, et interpella le dégarni en lui proposant des sujets -à son sens- nettement plus intéressants :

« - Parlons plutôt de Sylvia Plath, Charlotte Bronte ou Simone de Beauvoir ! » (Poétesse, Romancière et Philosophe)

Hélas pour lui, sa requête devra patienter puisqu'à nouveau, le cours se vit perturber quand la porte de la salle s'ouvrit, laissant apparaître un Levi décontracté, nullement soucieux d'arriver en retard.

« - Qu'est-ce que j'ai manqué ? » Demanda-t-il alors en restant prostré à l'encadrement de la porte.

Eren lui jeta un rapide coup d'œil et reporta ses grands yeux de jade sur l'enseignant, visiblement indisposé à répondre tant il était sur les nerfs. Pour lui, la venue d'Ackerman, ce délinquant réputé entre-autre pour son absentéisme, c'était la goutte d'eau qui faisait déborder le vase.

Jäger abaissa alors sa tête, regardant son cahier et rétorqua d'un air las au retardataire :

« - Les valeurs patriarches à l'oppressive que rejettent notre éducation. »

Après une courte réflexion, Levi dit :

« - ...Ok. »

Et il ressortit de la salle comme il était entré : comme un courant d'air.

« - Hey ! Reviens ici ! » Hurla Keith Shadis en le pointant du doigt.

Cependant, il était déjà trop tard, son élève s'était enfui.

« - Monsieur Shadis, auriez-vous l'obligeance de dire à Eren de prendre ses calmants avant de venir en classe ? » Déclara Erwin, la main tendue en l'air.

Cette réplique eut plus de succès que la précédente et provoqua l'hilarité générale dans la salle. Le moqué lui, sourcils froncés, se pivota derechef en direction de son assaillant, le fixant d'un regard noir et tandis qu'il s'apprêtait à lui répondre, Shadis le devança et signala au plaisantin :

« - Un de ces jours tu vas prendre une raclée et ce n'est pas moi qui vais m'interposer ! Et Eren... Interpella l'enseignant en braquant ses yeux cernés sur le brun aux cheveux long. Je te remercie pour ton point de vue... »

Celui-ci sourit à l'entente du compliment, qui fut malheureusement de courte durée lorsque l'homme enchaîna :

« - ...Je sais tout le mal que tu as dû avoir, à surmonter toute ses années d'oppressions, mais à ta prochaine croisade au comité des parents d'élèves, quand tu exigeras un auteur digne de toi, demande-leur pourquoi ils n'achètent pas de livre écrit par un noir.

- Ça c'est parler, Monsieur ! Proclamèrent deux rastas en tendant leur poing en l'air en signe de soutien.

- Ne commencez pas vous deux ! Cria Shadis, les yeux exorbités.

- Autre chose ? Questionna Eren dans le plus grand des calmes.

- Oui. Va au bureau de la directrice. Tu me fais suer.

- Pardon, Monsieur Shadis ?! S'insurgea-t-il, totalement abasourdi.

- Assez ! » Conclut le professeur d'un signe de la main en retournant à son bureau.

Excédé par ce qu'il prit pour de l'injustice, Eren bondit de sa chaise, rejeta négligemment son sac sur son épaule et prit dans ses bras ses affaires trônant sur sa table. Finalement, c'est sans un mot qu'il quitta la salle de classe en prenant le soin d'heurter à son passage le crâne d'Erwin d'un coup de livre.