Black Holes and Revelations

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- Un verre, Monsieur Hunt ?

Les yeux dans le vague, installé au comptoir, je relève la tête me détachant de l'observation absente du bar de l'hôtel.
Je logeais depuis deux jours dans cet établissement qui était mon adresse fétiche à Seattle, à Downtown : j'y avais passé de nombreux séjours par le passé entre deux avions ou deux missions.
Mon regard se pose sur Roberto, le barman de l'hôtel et je lui offre un léger sourire.

- Oui, merci Roberto.

- Qu'est-ce qui vous ferait plaisir ? Et ne vous restreignez pas, c'est pour la maison, précise-t-il avec un clin d'œil.

Je lui souris un peu plus, touché par son attention, à croire que mon attitude absente et distante n'était pas passée inaperçue.

- Un verre de Bordeaux s'il vous plaît et c'est gentil pour votre offre, mais je ne voudrais pas que vous ayez des ennuis pour moi.

- Ne vous inquiétez pas. Un verre de Saint-Emilion alors, reprend-il en me servant avec dextérité un verre d'un vin particulièrement prisé. Si vous avez besoin de quelque chose d'autre, n'hésitez pas, complète-t-il.

- Merci beaucoup, Roberto, conclus-je tout en le laissant s'éloigner et s'occuper des autres clients présents dans le bar.

Mon esprit s'évade à nouveau après cette interruption, s'arrêtant sur les deux derniers jours que je viens de passer.
Deux jours de vide, d'ennui et d'inquiétude.
J'étais plus désemparé qu'anticipé dans cette situation : sans mission, renvoyé comme un débutant.
Jusqu'alors, j'ai toujours été maître de mon contexte professionnel : mes fins de contrat étaient mûrement réfléchies ou préparées.
Après un sentiment du devoir accompli.
Ou un départ conjointement accordé quand ma lassitude était trop grande.
Mais là rien de tout ça : une sensation désagréable d'inachevé, une somme de tensions alors que contrairement à Amelia, je suis convaincu que la menace rôde toujours.
Et voilà où j'en suis : je tourne en rond depuis deux jours dans cet hôtel.
Comme un lion en cage.
Je suis resté cloîtré, pour éviter d'approcher son quartier, de surveiller son appartement, une pulsion vive pour faire taire mon mal-être et me rassurer.
Je me sens lâche en parallèle, car je n'ai même pas eu le courage d'informer Jackson ou Nathan de la situation. Je ne voyais pas comment je pouvais leur justifier la décision d'Amelia sans dévoiler ma faiblesse. Cet épisode d'égarement dont j'ai encore tellement honte et encore plus aujourd'hui après toutes les conséquences qui en découlent.



« Ce n'est plus ton problème » m'avait-t-elle dit.
Mais c'est plus fort que moi, je ne peux tourner la page aussi facilement et ne plus me soucier de son sort du jour au lendemain....après avoir vécu avec elle pendant de longs mois et avoir partagé des moments qui résonnent encore de manière inattendue en moi.
Tout cela n'était plus tenable et j'avais pris la meilleure des décisions la veille.
Il ne me restait plus qu'à attendre encore un peu....

- Bonsoir, je peux m'asseoir à côté de vous ?

Une présence inattendue se révèle à ma droite avec une voix douce et chantante.
Je tourne la tête et découvre une jeune femme à la longue chevelure brune, vêtue d'une robe blanche moulante et décolletée : elle me fixe, attendant ma réponse.

- Euh...oui, bien sûr...je vous en prie, finis-je par lui dire.

Elle s'assied aussitôt sur le tabouret à mes côtés, plaçant ses talons aiguille contre le rebord métallique pour se tenir bien droite.

BodyguardWhere stories live. Discover now