63 - Robin

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- Dis papa, s'agita Aurore, elle est partie où Jane ?

Je baissai les yeux vers la petite et lui caressai les cheveux. Je n'avais pas de réponse de Marianne, et cela m'inquiétait. De quoi ajouter en sentiments négatifs qui m'habitaient. Tristesse, deuil. Jane était morte paisiblement... Selon Arthur elle n'avait pas souffert... Mais cela ne changeait rien... Jane était partie, et comment expliquer à une enfant de trois ans ce qu'était la mort ? Cette chose cruelle, injuste, horrible. Aurore vivait dans un monde merveilleux, où les gentils, nous, résolvaient tous les problèmes.

Je la regardai. Ses cheveux bruns descendaient juste en-dessous de ses oreilles et encadraient un visage curieux surmonté de deux iris verts brillants.

- Jane... Ma puce... Elle est partie dans un endroit meilleur où elle n'aura plus jamais mal.

- Ah ? Alors, elle est heureuse ?

- Oui, mais, tu ne pourras pas la voir avant un long moment tu sais.

- Mais pourquoi ? C'est nul ! Moi, je veux la voir !

- Je sais, princesse, je sais...

Je lui embrassai le crâne et, à la mine épuisée de Petit Jean qui arrivait, je sus que Roland s'était réveillé dans de bruyants pleurs. Retenant un soupir fatigué, je me levai et laissai les jouets de la petite près d'elle. Insouciante, elle continua son jeu, restant près des femmes qui fabriquaient différentes choses, comme des bougies ou du savon, rafistolant de vieilles couvertures ou vêtements usés, comme je lui avais ordonné quand je ne pouvais pas être près d'elle.

Les pleurs de Roland m'irritèrent les tympans à plusieurs mètres de la cabane. Une rapide inspection m'apprit qu'il fallait changer ses langes et, soupirant et jurant sous la tâche ingrate qui m'attendait, je récupérai les affaires nécessaires. Le pire était que je devais nettoyer ses langes ; personne ne voulait le faire et Mathilde ne m'avait pas laissé le choix. Je le faisais et ne léguais pas cette corvée à un autre. Retenant au maximum mon souffle, je me dépêchais de l'échanger sous ses mimiques ravies.

J'aurais dû m'y attendre ; je m'étais moqué de James la première fois que cela l'avait fait avec Will, c'était un juste retour des choses. Mais Roland m'urina dessus et éclata de son rire de bébé en créant ma mine dégoûtée. Attrapant un linge, je m'essuyai et me résolus à aller me laver le plus rapidement possible. Une fois bébé habillé, je jouais avec lui et l'emmenai avec moi, le garnement décidé à ne pas faire la sieste.

Entendant l'arrivée de quelqu'un, je me retournai et vis mon frère. La mine triste, il tenta de me sourire mais échoua.

- Tu tiens le coup ? interrogea-t-il.

J'acquiesçai rapidement, peut-être trop. James ne fut pas dupe et préféra changer de sujet. Désignant Roland du menton, il se moquait :

- Il t'a uriné dessus ?

La situation eut au moins le mérite de lui redonner un mince sourire.

Je lui grognai dessus ; qu'il évite tous commentaires désobligeants, cela serait sympathique pour moi. James tenta de retenir son sourire mais eut énormément de mal et consentit ensuite à venir me porter secours avec mon fils qui s'agitait beaucoup trop.

Il me pressa ensuite l'épaule, appuyé d'un dernier sourire destiné à me rassurer, puis me quitta. Je soupirai doucement ; il pouvait penser ce qu'il voulait. Cela faisait une semaine que Jane était morte, et cela faisait une semaine que je n'avais pas de nouvelles de Marianne, sans avoir la possibilité de vérifier qu'elle allait bien, dans la mesure possible d'un deuil forcément.

Robin des BoisWhere stories live. Discover now