Chapitre 4

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Arakawa, 31 octobre

Hajime pousse le petit portail qui mène à la maison de ses parents et s'arrête juste devant l'entrée. Il fouille dans son sac, attrape le masque de loup-garou qu'il a acheté pour l'occasion et l'enfile sans attendre. Rah, cette horrible odeur de plastique. Et je peux à peine respirer dans ce machin. Le jeune homme réajuste le masque sur sa tête, puis appuie sur la petite sonnette.

— Je vais ouvrir !
— Atsushi !
Des pas précipités se font entendre, tandis que la voix de sa mère résonne depuis la cuisine. Sous le masque, Hajime ne peut retenir son petit rire, mais il se glisse à nouveau aussitôt dans son rôle lorsque la porte cède devant lui pour découvrir un petit garçon déguisé en ourson. Hajime lève les bras, prend un ton menaçant et s'écrie :
— Arrrrh !
Atsushi laisse échapper un cri faussement apeuré et tourne les talons pour repartir dans la maison, Hajime aux trousses.
— Je vais te manger, petit ourson ! Arrh !
— Non !

L'enfant entre dans le salon, mais son frère finit par le rattraper. Il passe un bras autour de sa taille et le fait gentiment basculer au sol avant de faire semblant de le dévorer. Atsushi rit aux éclats en gigotant, les mains agrippées à la fausse fourrure noire du masque de son frère.

Hajime retire l'objet, le jette dans un coin de la pièce, puis roule sur le dos sans lâcher Atsuhi, dont il soulève péniblement le torse à bout de bras, avant de le balancer de gauche à droite, puis de droite à gauche, en douceur.
— Et un petit ourson qui vole !
C'était plus simple lorsqu'Atsushi avait quelques années et quelques kilos de moins, mais son petit frère rit toujours aux éclats et c'est tout ce qui compte.

Hajime finit par le reposer au sol, se redresse pour s'asseoir en tailleur, et installe Atsushi entre ses jambes. Il s'amuse ensuite avec les petites oreilles d'ourson.
— Tu sais quoi, petit monstre ? J'ai un truc pour toi !
Hajime fouille dans son sac et place la boîte sur les genoux de son frère, qui bondit aussitôt sur ses jambes avant de tourner sur lui-même en piétinant.
— Trop cool, Hajime ! Merci !

— Atsushi, arrête un peu de t'agiter comme ça avant de manger !
Leur mère, Sayaka, entre en souriant dans le salon. Hajime se relève à son tour pour s'approcher d'elle et la débarrasser du grand plat qu'elle a dans les mains.
— Mais, Maman ! Hajime m'a offert la console portable que je voulais !
Sayaka scrute son fils aîné, les sourcils froncés. Hajime détourne le regard en réajustant ses lunettes sur son nez.

— Keisuke n'est pas encore arrivé ?
— Si, si, il a juste accompagné Mamoru jusqu'au konbini : on manquait de saké.
— Ah, d'accord. Au fait, j'ai aussi rapporté des bonbons !
Atsushi tend la main, mais Sayaka intervient avec autorité :
— Après manger !
— Mais Maman !
— Allez, écoute ta mère, la terreur. Et puis, tu as une nouvelle console à tester.
— Tu regardes avec moi ? On va jouer à Pokémon !
Hajime lève les yeux au ciel, mais accepte malgré tout avec le sourire.

— Au fait, Maman... je suis passé voir Ryôma tout à l'heure, dit tout à coup Hajime.
Le jeune homme observe l'écran de la console portable, tandis qu'Atsushi, concentré, tente d'attraper un Salamèche.
— Ah, raté, tiens.
— Ça va, j'ai encore des pokéballs.
Le garçonnet, un petit bout de langue au coin des lèvres, semble absorbé par son combat.
— Nous sommes allés avant-hier, pour notre part, reprend sa mère.
— Oui, il me l'a dit. Aujourd'hui, il fêtait Halloween avec les autres résidents, et il était très fier de me montrer son costume de pirate.
Hajime s'empare de son téléphone.
— Je l'ai pris en photo, d'ailleurs ! Tu veux voir ?
Sayaka sourit et s'agenouille près de son fils. Parfois, elle a la terrible impression que Hajime porte sa famille à bout de bras et, si elle lui en est reconnaissante, elle se sent aussi coupable.

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