Chapitre 6

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//PDV ERWIN\\

*9 mai 837*

Une demi-heure que Clémens posait des questions au témoin. Compte tenu de son amnésie, elle n'avait rien à nous apprendre. Erna, qui nous attendait sur le quai de Shiganshina lorsque le bateau s'y était amarré, nous avait prévenus à ce sujet, et que nous devions y aller lentement avec Mademoiselle Aguilera — ça lui avait fichu un coup d'apprendre que sa famille et les domestiques aient été les victimes de l'incendie de sa maison. Savoir qu'elle était l'unique survivante — avec les collègues de son père —, et qu'elle souffrait en plus de perte de mémoire à cause du choc avait été terrible. Mais le médecin avait déclaré notre témoin apte à parler avec nous, à la condition de ne pas la fatiguer au bout d'une demi-heure. C'était assez raisonnable.
Erna avait ajouté qu'elle s'était permise de prévenir en personne les Brigades Spéciales et la Garnison du réveil de Nasrin Aguilera, hier après-midi, comme les trois corps d'armée travaillaient ensemble sur cette affaire. Deux soldats de la Garnison étaient venus à l'hôpital de Shiganshina la veille au soir, imités par deux soldats des Brigades Spéciales. Ce qui était bien, chez Erna, c'était qu'elle prenait son travail très à cœur. Elle avait bien fait de prévenir les autres corps d'armée.
Pour revenir sur le vif du sujet, l'attente était extrêmement longue et ça se faisait ressentir.
- Qu'est-ce qu'ils fabriquent, là-dedans ? soupira Akiko, alors qu'elle s'adossait contre le mur. Ça fait trois plombes qu'elle dure, leur causette. Ils ne veulent pas du café et des gâteaux, aussi, pendant qu'ils y sont ?
C'est vrai que ça s'éternisait, et on commençait à s'inquiéter.
Je rassurai mon amie qu'il devait y avoir une bonne raison, que le témoin s'était peut-être souvenu d'un détail oublié à cause du choc, mais moi-même je n'étais sûr de rien. Ce que je disais n'étaient que des théories pour expliquer pourquoi l'interrogatoire durait depuis un moment. Les questions se bousculaient dans nos esprits. Mon propre visage prenait un air songeur en songeant à tout cela.

Nos interrogations s'interrompirent quand un « Tonton Erwin ! » nous fit sursauter. Viktor, le fils de 6 ans de Clémens et Erna, courut dans le couloir et nous sauta dessus dans un éclat de rire, ses cheveux ébouriffés donnant l'impression d'être mal coiffés.
- Tiens ! Nous avons un jeune visiteur, rit Akiko. Allez, viens par là, toi.
Sans hésiter, Akiko souleva le petit garçon et le fit s'asseoir sur ses genoux. Viktor restait étrangement très calme. Akiko adorait les enfants, et avait le don de se faire aimer par eux. Ce n'était donc pas étonnant que le fils de notre chef d'escouade, qui avait pourtant hérité du caractère blagueur de son père, se montre plus sage en la présence de notre amie. Pour ça, elle était championne du monde !
Erna fit son apparition juste après, Théa dans les bras et Julia tenue par la main. L'inquiétude se voyait sur son visage. Elle fut contente de voir son fils en notre compagnie.
- Ah ! Parfait, Viktor est avec vous. Il m'a distancée très rapidement et je craignais qu'il ne quitte l'hôpital.
Elle regarda autour d'elle, réalisant l'absence de son mari.
- Clémens n'est toujours pas sorti de la chambre ? s'étonna-t-elle.
- Pas depuis une demi-heure, lui apprit Mike. On se demandait de quoi il pouvait bien parler avec le témoin.
- Elle a peut-être fait un malaise au cours de l'interrogatoire, raisonna Akiko.
C'était la question à un million de pièces d'or. Cette éventualité m'avait traversé l'esprit, moi aussi. Mais s'il y avait eu réellement un malaise, pourquoi n'étions-nous pas au courant ? On aurait pu apporter notre aide. Erna lâcha un soupir désemparé.
- C'est pas vrai... Mon chef va me passer un savon, si jamais il apprend que la demi-heure n'a pas été respectée.
Ses sourcils se froncèrent de contrariété, tel un tir à l'arc que l'on pare pour préparer une flèche à envoyer droit dans la cible, tandis qu'un nouveau soupir sortit de ses lèvres. Du fait de leur jeune âge, Viktor et Julia ne comprenaient pas un mot de notre échange. Et en tant que tout jeune bambin, Théa posait son regard intrigué un peu partout à travers le couloir. J'échangeai un regard entendu avec Mike et Akiko.
Peut-être que Clémens rassurait notre témoin quant à son amnésie, et lui révélait le peu qu'on savait pour l'enquête en cours. C'était une possibilité comme une autre.
Viktor, qui était assis sur les genoux d'Akiko, brisa alors le silence en demandant où était son père. C'est seulement là que je réalisais que plus le petit prenait de l'âge, plus il ressemblait de plus en plus à Clémens. Il n'y avait pas photo là-dessus, Viktor n'était pas son fils pour rien. Sentant qu'il fallait intervenir, Akiko prétexta alors que son père était parti faire une course, et qu'il n'allait pas tarder à revenir — que cela concernait l'enquête. Point. Viktor n'eut pas l'air de réaliser aux mots d'adultes, mais heureusement il sembla se contenter de ces réponses car il ne posa pas d'autres questions. On poussa un soupir de soulagement. Erna remercia silencieusement Akiko d'avoir dit le minimum, pour ne pas inquiéter le petit. Une chance que mon amie sût y faire avec les enfants...

« 𝓢𝓸𝓾𝓿𝒆𝓷𝓲𝓻𝓼 𝓸𝓾𝓫𝓵𝓲𝒆́𝓼 [SNK ~ Erwin x OC] » / TERMINÉOù les histoires vivent. Découvrez maintenant