Chapitre 27

5.7K 442 53
                                    

Pdv Katsuki
Ça fait deux jours que je l'ai perdu. Deux putains de jours passés tout seul, à me rejouer la scène dans ma tête, à me faire des films.
Je suis retourné au dojo tous les soirs. Il y était pas.
Je me sens tellement stupide d'avoir agi comme ça. Mais j'avais vraiment envie de lui prendre la main. De retrouver tout ce que j'avais laissé chez Eijiro. Parce que c'était juste parfait. Mais j'ai pas fait gaffe à ce que lui voulait. Comme lors de la soirée.
Je me sens tellement con. Et tellement incapable. Je l'ai perdu tellement de fois...
J'ai jamais autant regretté quelquechose.
Je sens un bras passer par-dessus mon épaule.
"- Qu'est-ce que tu crois que tu fais?", je lance de mauvaise humeur.
"- Je te réconforte", me répond Eijiro.
Merde, j'ai vraiment l'air aussi désespéré?
"- De quoi tu parles? J'ai pas besoin de ça", je dis en le repoussant.
"- Pour arrêter de déprimer ou juste en général?
- Les deux."
Merde, qu'est-ce qu...
"- Ouuuuh, donc Katsuki déprime. Et on peut savoir pourquoi?
- Putain, je suis comme d'habitude, arrête de raconter des conneries! Et quand bien même je le serais pas, vous pourriez toujours courir pour que je vous en parle!"
Ils me regardent, le regard plein de suspicion. Aucun ne me croit. Même moi, j'y crois pas.
Denki reprend :
"- Mec, y'a un problème?
- Putain mais non, vous êtes sourds ou vous le faites exprès pour m'énerver encore plus?
- Déprimé ET énervé", dit Mina.
"- Allez vous faire foutre. Ça vous va?"
J'ai plus la force de m'engueuler avec eux ou de nier quoi que ce soit. J'ai besoin d'en parler à quelqu'un. Je vais devenir dingue sinon. C'est juste que... je sais pas, je déteste montrer que je suis faible. Ils le savent très bien, ces bâtards.
"- Mec, tu sais que tu peux nous en parler, pas vrai?", lance Hanta.
"- Mais pourquoi vous dites ça? Vous cherchez vraiment à m'inventer un malheur? J'ai rien, bordel!
- T'as clairement quelquechose, mec. En temps normal, tu nous aurais déjà éclaté la gueule dans cette situation. Je t'ai jamais vu aussi... las. Comme si tu t'en foutais de ce qu'on disait. Qu'il y avait quelquechose de plus important. Et de beaucoup plus triste, vu la gueule d'enterrement que tu fais depuis tout à l'heure.
- ...
- On va pas t'obliger à en parler.
- Vous en êtes pas capables, de toutes façons.
- Pas faux, " sourit Mina. " Mais si tu veux en parler, si t'en as besoin, on sera là pour t'écouter.
- Mais pourquoi j'aurais besoin de ça, putain? J'ai rie...
- D'habitude, tu mens un peu mieux. On veux juste t'aider."
Je cherche même pas à répondre. Je sens que je vais craquer si ils continuent comme ça. J'ai pas envie d'en parler mais j'en ai besoin.
Mais c'était entre le vert et moi. Et je voulais garder ça pour nous.
"- Katsuki."
L'entente de mon prénom me fait relever la tête. J'ai pas l'habitude. Eijiro me regarde dans les yeux.
"- Raconte."
Il a l'air sincèrement concerné. Et j'en peux juste plus.
Merde. Je soupire.
"- Denki?
- Oui?
- Tu te souviens de ce gage à la con que tu m'as filé, chez Eijiro?
- Heu... ouais, pourquoi?
- Tu te souviens du mec?
- Izuku? C'est un super pote, il est...
- Bah il se trouve que je l'avais repéré avant ce putain de jeu. Et qu'il est grave mignon."
Aucun d'eux ne parle. Je vois Mina esquisser un début de sourire. Je lui renvoie un regard noir. Je crois que c'est la seule à avoir déjà tout compris. Les autres attendent la suite. Ils savent déjà que je suis gay. Je l'ai jamais caché. Ils ont jamais fait un commentaire dessus. Ils s'en foutent, en fait. C'est pas ça qui les intéresse. C'est plutôt le fait que j'avoue que je trouve un mec pas mal.
Même si lui, il est beaucoup, beaucoup plus que pas mal. Et qu'il embrasse bien. Mais ça, ils peuvent toujours courir pour que je leur dise.
"- Et il se trouve que du coup, ce gage m'intéressait vraiment.", je poursuis. " Sauf que je m'attendais pas à ce que ce soit aussi... aussi bien. Je voulais pas que ça s'arrête. Mais t'as fini par réussir ton gage.", je dis en désignant Denki du menton. " Et moi, je suis parti juste après, comme un con. Sans prendre son num, ou quoi que ce soit. Et depuis, j'arrive pas à me le sortir de la tête." Je marque une pause. " Je l'ai recroisé au dojo. Tout le monde dit qu'il a toujours combattu là mais je l'ai jamais vu. C'est un peu un hasard de merde qu'il se pointe pile à ce moment-là, non?"
Je soupire.
"- Et là encore, j'ai joué au con et je l'ai perdu. Et je me sens juste super mal."
Je baisse le regard. Je déteste devoir avouer ce genre de truc. D'habitude, je le garde pour moi.
Denki finit sa bière à moitié pleine d'un coup.
"- J'en avais besoin", dit-il aux autres abrutis qui le regardent chelou. " C'est pas tous les jours que Katsuki accepte de nous parler de ce genre de truc.
- Je vais t...
- C'était pas méchant ou moqueur, mec! Je suis vraiment en train de réfléchir pour t'aider, là!
- J'ai pas besoin qu'on m'aide, bordel! J'aurais jamais dû vous raconter tout ça de base", je crache en détournant la tête.
"- C'est ça. T'aurais préféré tout garder pour toi jusqu'à plus être capable de te contenir?", demande Mina.
Je réponds pas. Bien sûr que non, j'en ai pas envie. Ça fait déjà suffisamment mal comme ça en 4 jours.
"- Il est là."
Je regarde Mina.
"- Qui?
- Izuku. Il est là.
- Nan, sans blague", je ricane. " Ça fait longtemps que je l'ai vu, merci.
- Non, je veux dire là, juste là. Ici. En bas. On peut le voir."
Je me retourne et regarde en bas de la mezzanine sur laquelle on est posés depuis tout à l'heure. J'ai pas besoin de chercher longtemps. On remarque que lui. Que ses cheveux verts. Que ses yeux magnifiques. Que son sourire. Que son corps qui bouge avec souplesse. Putain, parce qu'il danse super bien en plus. Est-ce qu'il y a une seule chose qu'il sache pas faire?
J'entends un murmure derrière moi. Merde, j'avais oublié ces cons!!!
Je me tourne vivement et commence à chercher une insulte. Mais aucun ne se moque. Ils me regardent tous, l'air souriant et attendris. Quels enfoirés. J'ai dû faire une tête chelou pour qu'ils soient comme ça. J'aurais jamais dû leur raconter.
Même si je me sens un peu mieux.
Mais plutôt crever que de leur dire.
"- J'accepterai aucun commentaire, aucune remarque, aucun signe de moquerie de votre part", je leur lance. " Et si vous en parlez à qui que ce soit, je vous tue.
- Tu rigoles? Une info pareille, on la garde pour nous!", répond Denki. " Maintenant, faut penser à comment tu vas l'aborder.
- J'vous ai déjà dit que j'avais pas besoin de vous.", je réplique en me levant.
"- Mec? Tu... fais quoi, là?
- Je me casse, ça se voit pas? J'ai perdu assez de temps comme ça", je rajoute à voix basse.
Je veux le voir. Je veux lui parler, lui expliquer.
"- Mais t'as réfléchi à ce que tu vas faire?!
- Depuis quand j'ai besoin de réfléchir?", je lance depuis les escaliers.
"- Bah, manifestement, ça t'arrive de plus en plus ces derniers jours," répond Mina.
Je remonte les quelques marches et me plante devant elle. Je me sens déjà assez mal à l'aise de leur avoir parlé de ça, je vais pas les laisser se foutre de ma gueule en plus.
Elle me regarde longuement avant de continuer :
"- C'était pas méchant, Katsuki. Et je me moquais pas non plus. On se fout pas de toi. On veut juste t'aider.
- Et j'en ai pas besoin.", je lâche avant de repartir.
Au milieu de l'escalier, je m'arrête.
"- Eijiro?"
Il descend et me rejoint. Je le regarde un long moment dans les yeux. Il se met à sourire.
"- De rien, mec. Je leur transmet. Bonne chance."
Je continue à descendre.
On se connaît depuis suffisamment longtemps pour qu'il sache que ça veut dire merci. Et que je le leur dirai jamais à voix haute.
Je lâche un petit "tch". Ça me fait encore bizarre de leur avoir parlé du vert. Mais ça m'a fait du bien. Un peu.
Bon. Il est où, maintenant? Vu que je suis descendu, la foule m'empêche de le voir. Putain, mais dégagez tous de là! En plus, les lumières des stroboscopes bougent trop pour voir quoi que ce soit.
Bordel. J'ai vraiment besoin de lui parler.

Juste cette fois!Où les histoires vivent. Découvrez maintenant