Chapitre 8

1.7K 155 42
                                    

Le repas venait à peine de se terminer, Rogue était parti avant le dessert rejoindre sa classe où l'attendait une pile imposante de parchemins. Il était plus que courant que certains sorciers lui commandent des potions qu'il était un des seuls à savoir préparer à la perfection.

Sainte Mangouste lui demandait souvent, entre autre et de façon fixe, des potions à but médical. Le ministère lui-même faisait ses réserves secrètes auprès de Rogue.  Plusieurs fois il avait envisagé de quitter son poste à Poudlard pour vivre uniquement de sa véritable passion. Severus n'était pas d'un naturel dépensier. La majorité de ses dépenses se trouvait dans l'achat d'ingrédients pour ses potions, dont certains étaient relativement onéreux.

Il était indéniable que la vie au château présentait certains intérêts purement pratiques : les repas, le ménage, les lessives... Mais il dû reconnaître que le gros inconvénient était les élèves. Sans eux, le travail devenait plutôt acceptable.

Mais une des raisons qui le retenaient au château était sa loyauté envers Dumbledore. Il aurait préféré mourir plutôt que de l'avouer, mais le vieil homme était nécessaire à son équilibre. Il l'avait recueilli après l'impardonnable. Il avait été le seul à le voir autrement que comme le bras droit du Lord noir. Dumbledore avait toujours su voir le meilleur en lui, même caché sous cette énorme couche de violence et de mépris.

L'autre raison qui faisait qu'il ne quitterait pas Poudlard résidait dans la personne même qui le détestait le plus. Ce jeune homme aux cheveux noirs indomptables et aux yeux d'émeraude. Lorsque Harry était arrivé au château, cela faisait déjà 11 ans que Rogue le haïssait.

Ce jour maudit était gravé en lui. Dès qu'il avait appris la terrible nouvelle, il s'était précipité chez Lily avec l'espoir un peu puérile de la retrouver vivante, blessée... mais vivante. Espoir si insensé. Il était entré dans la maison et s'était directement dirigé vers l'étage enjambant le corps de James Potter sans un regard.  Puis il avait pénétré dans la chambre du bébé. Il avait crû mourir en découvrant la scène qui s'offrait à lui. Il aurait préféré mourir. Le chaos régnait dans cette chambre qui avait dû être accueillante avant. Et Lily... sa Lily, son amie d'enfance, sa seule amie. Il l'avait serrée contre lui en pleurant, hurlant... il n'avait jamais plus pleuré depuis ce jour-là. Il avait un trou béant à la place du cœur. Une plaie que rien ne pourrait cicatriser. Et dans le lit à barreaux juste derrière cet ange roux, cet abominable enfant qui avait survécu. Il avait pris la vie  de sa mère ! Il le haïssait, s'il n'avait pas existé... Lily ne serait pas morte.

Et il avait serré dans ses bras la jeune femme et lui avait promis la seule chose qu'il pouvait encore faire pour elle :  veiller sur l'enfant et le protéger. Voilà pourquoi il se devait de rester au château. Mais depuis la première année de Harry à Poudlard les choses avaient bien changées. Dans un premier temps il n'avait vu en cet enfant que le digne héritier de James Potter... Combattre un troll, trouver la pierre philosophale. Il n'avait rien trouvé de mieux pour attirer l'attention sur lui. La deuxième année lorsque la chambre des secrets avait été ouverte... il avait d'abord pensé que le gamin en était l'auteur. C'était bien dans le genre des maraudeurs ! Puis Hermione "Je sais tout" avait été attaquée, puis l'unique fille Weasley... non assurément, ça ne pouvait pas être lui. Puis contre toute attente il s'était inquiété pour ce jeune arrogant. Il savait quel genre de monstre pouvait se trouver dans cette fichue chambre, il était le directeur de Serpentard après tout.

Puis plus Harry grandissait, plus son obsession augmentait. Cette honte ! Sa douce Lily en aurait été dégoûtée. Il avait d'abord pensé que sa tendresse pour le jeune homme était provoquée par ses grands yeux verts. Il y revoyait sa tendre amie... mais rapidement il su que c'était plus que cela. Et chaque regard courroucé du jeune brun était une lame de couteau dans son cœur. Le même regard que Lily lui avait lancé lorsqu'il l'avait traitée de Sang de Bourbe.... Oh Merlin qu'il regrettait. Qu'allait-il donc advenir de lui ? Il enfouit son visage dans ses mains. Il se leva, il voulait retourner dans son appartement, prendre un verre de ce délicieux nectar moldu.

On frappa à la porte. 

Bon sang ! La retenue donnée à Potter ! 

- Professeur... risqua Harry en entrant dans la salle.

Rogue s'était rassis précipitamment et faisait mine de lire du courrier très important. Il grogna pour montrer au jeune Gryffondor qu'il avait noté sa présence. Il le laissa attendre devant lui sans rien dire, sans lui jeter un coup d'oeil. 

Harry ne savait pas quoi faire. Devait-il s'asseoir ? Devait-il partir ? Devait-il interpeller l'homme assis à son bureau ? Après plusieurs minutes à être ignoré de la sorte, il sentit la colère monter en lui. Subir les sarcasmes, oui ! Subir les injustices, ok aussi ! mais l'indifférence, ça il ne pouvait le tolérer. Il attrapa son sac et se dirigea vers la porte. 

- Où allez-vous Potter ? lança Rogue des éclairs dans les yeux. Vous ai-je dit de partir ?

- Non, monsieur... à vrai dire, vous n'avez rien dit. Je suppose que vous ne vous souciez pas de ce que je dois faire.... lâcha Harry caustique.

- Sachez que vous n'êtes pas la priorité de mes pensées, je devais finir de lire un courrier important du ministère. Mais que votre Grandeur m'excuse de l'avoir fait patienter ! 

Il regardait Harry d'un air mauvais. Le jeune homme soutenait le regard Onyx de son professeur sans faillir. 

- Il y a dans le fond de la salle une dizaine de chaudrons à récurer... Ils n'attendent que leur sauveur, ricana Rogue... bien sûr ils sont trop fragiles pour qu'on utilise sur eux des "récurvites".

Harry tendit un grand sourire à son professeur, posa son sac et dans la foulée se dirigea vers le fond de la classe pour commencer à nettoyer les vieux chaudrons inutilisés depuis des mois. Rogue resta interloqué par ce franc sourire. Il venait de donner une affreuse corvée à son élève et lui, il lui donnait le plus touchant des sourires. Rogue sentit son estomac se retourner. 

- Ainsi votre passion dans la vie est de manier les balais, les serpillières et les éponges ? demanda-t-il avec mépris.

- Une passion, non, monsieur... mais une habitude oui. Et je fais ça assez bien il me semble...

- Ah bon ? Les Elfes de maison ne nettoient pas la tour des Gryffondor ? Le grand Potter n'aime pas qu'on touche à ses affaires ?

Harry fit fi du sarcasme dans les questions...

- Si les elfes de maison font le ménage chez nous comme partout ailleurs dans le château monsieur, c'est chez mon oncle et ma tante que j'ai appris... l'art du ménage, finit le jeune garçon quelque peu amer.

Rogue s'interrompit. Que racontait-il ? Potter, l'enfant chéri du monde sorcier, celui qui avait réduit quasi à néant le seigneur des ténèbres et qui était appelé à l'anéantir totalement... cet enfant faisait le ménage chez ses moldus ? Ce n'était pas possible. Le gosse se victimisait encore une fois. 

Severus se souvenait de Pétunia la sœur de Lily. Antipathique certes... Mais Lily disait qu'elle n'était pas méchante, seulement triste. Severus savait qu'elle était certainement tristement jalouse de sa sœur. Il ne l'avait pas vue souvent. Elle ne l'aimait pas. Severus était un sorcier il le savait bien avant de recevoir sa lettre pour Poudlard et il savait depuis longtemps que Lily l'était aussi... Pétunia détestait Severus pour la même raison qu'elle détestait sa propre sœur : ils étaient différents.

Il resta un long moment, le nez dans ses parchemins imaginant Harry domestique de cette famille. Non il ne pouvait le croire. Albus n'aurait jamais laissé faire ça. Harry était son protégé, son enfant chéri, il était impossible qu'il ait accepté une telle chose.

- J'ai fini avec les chaudrons... il y a-t-il autre chose que vous vouliez que j'astique ? demanda-t-il ironiquement.

- Retournez dans votre tour !

Rogue ne pouvait supporter la pensée de voir cet enfant, qui n'en était plus vraiment un, traité comme un domestique. Harry Potter le fils de Lily devait être choyé... pas parce qu'il était le Sauveur, Celui-qui-a-survécu... mais parce qu'il était le fils de Lily, parce qu'il était Harry. Il n'osait y croire !

Il s'était approché des chaudrons. Ils étaient parfaitement reluisants. A n'en pas douter le gosse savait se servir d'une éponge moldue et avait effectivement l'habitude de faire parfaitement le ménage. Comment avait-il pu laisser ça se produire ??

De rage il envoya valser tous les chaudrons qui tombèrent au sol dans un fracas assourdissant.

Le jour d'aprèsWhere stories live. Discover now