Chapitre 56 - Clélio

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Clélio

J'ouvre les yeux en sursaut, oppressé.
- Il nous a vu ! Ça va devenir une habitude, à force !
Tout est noir autour de moi. J'essaye de me relever, mais je me sens comme prisonnier, pris dans une boîte. La panique commence à m'envahir quand enfin je me souviens ! Je suis dans un cercueil !
Les mains tremblantes, j'essaye d'ouvrir cette fichue boîte, mais sans succès. Je mets quelques minutes avant d'y parvenir, bientôt aidé par Astraia. Une fois à l'air libre, j'essaye de reprendre mon souffle avant de saisir la main qu'elle me tend. J'ai les joues rouges de gêne, d'avoir été surpris dans un tel moment de faiblesse.
- Plus jamais ... murmuré-je. Je ne sais pas comment tu fais pour dormir là-dedans !
- Rassures-toi ! Sourit-elle. Je n'y arrive pas non plus !
Je lui rend son sourire, apaisé par sa confidence. Je saisis alors sa main et sors. Là, nous quittons le dortoir pour nous arrêter sur le pont menant à la salle commune.
- Toi aussi tu as fait ce rêve ? Tu sais qui c'est ce type qui nous regardait ?
- Oui ! Murmure-t-elle. Je ne sais pas qui c'est mais ... il est flippant !
- Comme tu dis !
Je marque une pause avant de reprendre :
- J'espère que le vieux va bien !
- Moi aussi !
Nous reprenons donc notre route pour rejoindre Edern-Maglaï le rouge dans la petite salle attenante à la salle commune. Avant cela, nous débouchons dans la salle commune. Si au départ j'avais dans l'idée de la traverser très vite sans prêter attention à qui y est et qui fait quoi, je change très vite d'idée, sous le coup de la surprise.
Si Louis est assis en tailleur, les yeux fermés, semblant méditer, une petite rousse avec une longue tignasse bouclée et emmêler dort non loin de lui, en position foetale. Mais ce qui me surprend le plus et me laisse sans voix, c'est l'hologramme qui diffuse un clip au milieu de la pièce. C'est radioactive d'Imagine Dragons. Pourtant, je ne vois aucune machine qui semble le diffuser !

Après quelques secondes - minutes passées à suivre le clip, je reprends conscience de mon objectif premier, et surtout, je réalise qu'à part eux, il n'y a personne d'autres !
- Ils dorment ou sont partis manger, murmure la voix de la russe dans son sommeil. Moi c'est Maddy ... Bonne nuit !
- Allez-y ! Elle vous y attends ! Murmure Louis, toujours les yeux clos. On verra vos questions plus ...
- Merci ! Répond Astraia, m'entrainant par le bras vers la petite salle.

La petite salle.
La première chose qui me frappe, c'est de voir Maglaï le rouge endormi dans un cercueil de verre. Cassandre est assise au sol, tout contre le cercueil, toute recroquevillée. Elle semble avoir pris 20 ans d'un coup, tellement le chagrin l'afflige.
- Vous avez essayé de l'embrasser ? chuchoté-je, pris dans l'ambiance.
Cassandre lève la tête vers moi, le regard noir. Elle met un moment à me répondre, comme choquée par ma question.
- Tu t'es cru où ? Dans un Disney ? Fait-elle, sèchement, le visage dur un moment, avant de se détendre et de poursuivre, souriante. Asseyez-vous, les enfants ...
Astraia part s'assoir tout contre Cassandre, passant un bras autour de sa taille et posant sa tête sur son épaule. Tandis que je m'assois à mon tour, un peu en retrait, je les regarde. C'est magique comme ce simple geste semble illuminer et aider Cassandre, qui attendrie, passe à son tour son bras autour de la taille d'Astraia.
- Comment va-t-il ? Chuchote-t-elle, comme si elle ne voulais pas le réveiller.
Cassandre tourne la tête vers Edern-Maglaï le rouge et le regarde. Un voile de tristesse passe sur son visage et je peux sentir son coeur se serrer. Pourtant, quand elle reporte son attention sur nous, elle essaye vaillamment de sourire.
- La stase a réussi, grâce à Maddy ! Elle a donné toute son énergie pour tenter de le guérir, mais ... sans grand succès ! La pauvre ! Elle doit être épuisée !
Elle lève la tête, le regard dans le vague. Elle semble songeuse et vouloir dire quelque chose.
- Et lui ! Fait-elle en hochant la tête vers les pieds d'Edern-Maglaï le rouge. Il ne l'a pas quitté un seul instant ! Il est tellement bouleversé par tout cela ...
Je suis son regard, et vois, en boule, aux pieds du cercueil de verre, Gebril Malek endormi, épuisé. Quand Cassandre le regarde, elle a les yeux pétillants de larmes, attendrie et touchée ... Elle le regarde comme une mère regarderait son enfant.
- Jessica va faire de son mieux avec les Sahrah pour trouver un remède ... Murmure Gebril Malek, faussement endormi, apparemment. En attendant, Maddy va passer régulièrement et ... faire de son mieux !
- Merci ! Sourit Cassandre.
- Je t'en prie ! Avec plaisir ma belle ! Comme j'aurais aimé pouvoir faire plus ! Mais ...
- Mais il n'y a que nous qui pouvons, n'est-ce pas ? Termine Astraia, timidement. Louis nous a montré comment ... on a fait, pour papa !
- Ça c'est tout lui ! Sacré Louis ! Sourit Gebril Malek. Il donne toujours l'impression de faire le pitre, de tout prendre par dessus la jambe, mais ... pas du tout !
Il marque une pause, où il nous regarde longuement, semblant nous étudier, nous ou nos pensées, je ne sais pas trop.
- Prenez votre temps, les enfants ! Quand vous vous sentirez prêt, sûr de vos pouvoirs ... vous pourrez le ramener ! Nous on va veiller sur lui, en attendant. Et puis ... Pour votre père ... J'ai fait ce que j'ai pu pour le guérir, après que vous l'ayez ramené, mais ... je n'ai jamais pu entièrement lui rendre son bras !
- Tu as fait du bon boulot, Gebril Malek ! Merci ! Répliqué-je, peut-être un peu sèchement et maladroitement.
Gebril Malek me regarde donc, mi-surpris, mi-amusé.
- Merci, princesse ... Lance-t-il, avec un clin d'oeil amusé. Qui pourrait croire que derrière cet être bougon se cache une princesse Disney ?
- Personne ! Et vous allez garder votre langue, monsieur ! Surtout si vous voulez rester vivant ! Menacé-je.
Mais cela ne réussit qu'à le faire rire aux larmes.
- Mais oui, gros dur ! Se moque Cassandre. On y croit tous très fort !
Je la regarde, surpris de la voir entrer dans le jeu de Gebril Malek, surtout à un moment pareil.
- Dites ... Poursuit-elle. N'oubliez pas de dire au revoir à vos parents, cette fois ! Pensez à ceux qui doivent les gérer, après !
Astraia lève la tête vers elle, rougissante. Personnellement, je ne me sens pas honteux, surtout en voyant cette lueur espiègle qu'elle parvient presque à cacher au fond de ses yeux.
- De ce pas ! Fais-je, en me redressant. Où sont-ils ?
- Au labo !
Encore une fois, il me semble déceler au fond des yeux de Cassandre un petit quelque chose ... mais je décide de ne pas y prêter attention.
- Je verrais bien sur place, de toute façon ! Pensé-je, haussant les épaules.

Nous nous rendons donc au laboratoire de Jessica, en passant par la salle commune ... où visiblement Imagine Dragons tourne en boucle sur la chanson Next to me ... puis par la salle de bain.
Tout du long, Astraia, très nerveuse, ne cesse de me mettre en garde au sujet du laboratoire de Jessica. Comme elle est très maniaque à son sujet, qu'elle n'aime pas qu'on vienne la déranger, poser tout un tas de question ou toucher à tout ... C'est à un tel point qu'elle arrive à me transmettre sa nervosité ! Aussi, quand elle entrouvre la porte, tout doucement, je suis mi-nerveux, mi-impatient. Je sautille sur place, comme lors d'un match.
Astraia passe d'abord la tête, comme pour vérifier s'il n'y a pas de danger. Quand je la vois faire des yeux ronds de surprise, je m'arrête aussitôt de sautiller et passe la tête à mon tour, par dessus la sienne. Je ne peux m'empêcher de sourire en pensant à Louis quand je vois la scène qui se déroule sous mes yeux.
En silence, je pose mon menton sur la tête d'Astraia et profite du spectacle. Elle aussi sourit maintenant, les joues légèrement roses. De toute évidence, il semble clair que papa et maman ont ... « dormi » ici, ensemble. Plutôt heureux, amusé et attendri, je ne suis pas vraiment surpris, je suis peut-être un peu gêné de ne pas savoir comment réagir ...
- Pas vraiment hygiénique, tout ça ! Les charrié-je tandis qu'Astraia, surprise et choquée voit sa bouche s'arrondir.
- Clélio ! Soupire mon père, froidement, mais d'une manière qui semble beaucoup plus fausse que d'habitude. Toujours le mot pour rire, hein !
Je vois alors Jessica-maman rougir, pour la première fois. L'espace d'un instant, la ressemblance qu'elle a avec Astraia me frappe aux yeux.
- Vous voulez qu'on vous laisse ou ... on peut entrer ? Fais-je. On voulait parler avant ...
- S'il vous plait ! Rhabillez-vous ! Supplia Astraia, rouge.
- Une seconde ! Retournez-vous ! Demande mon père, tandis qu'il tend son pull à Jessica-maman.
Du coin de l'oeil, pendant qu'on a le dos tourné, je le vois remettre son pantalon tandis que Jessica-maman enfile le pull de mon père. Je ne sais pas pourquoi mais ce petit geste anodin m'emplit de bonheur. C'est comme si nous ... étions une vrai famille !
Je souris.
- C'est bon ! S'exclame Jessica-maman.
Tandis qu'on se retourne, on voit qu'elle a aussi enfilé un pantalon noir à elle, qu'elle devait probablement garder au laboratoire.
- Vous allez partir, c'est ça ? Demande-t-elle.
- Oui. Confirmé-je, après un regard vers Astraia qui me confirme d'un hochement de tête. Même si ... on ne sait pas encore où !
- Allez-y ! Faites ce que vous avez à faire ! Sourit Jessica-maman, nous donnant son approbation. Je vais faire de mon mieux de mon côté pour Edern et Cassandre.
Je les regarde tour à tour. Elle semble d'accord avec le fait de nous voir partir pour déclencher une version positive d'une Apocalypse déjà en route. Notre père, un peu moins. Il ne dit rien, cependant, et essaye de ne pas sembler trop raide et trop froid.
Astraia, elle, est totalement sous le coup de la surprise. Plus que moi, qui m'en moque un peu, il est vrai, elle ne s'attendait pas à une telle réaction venant de Jessica-maman.
- Il faut croire que l'Amour fait des miracles ! Pensé-je, ne pouvant m'empêcher de sourire.
Notre père capte tout de suite ce sourire et me jette un regard interrogateur. J'arrête aussitôt et m'apprête à sortir.
- Faites attention, les enfants ! S'exclame-t-il. Oh, et ... Même si c'est trop tôt pour un câlin ... Vous pouvez quand même dire « au revoir » !
Cette fois-ci, c'est moi qui suis surpris ! Tandis qu'Astraia s'exécute timidement, je les regarde tour à tour, comme si j'avais deux extraterrestres devant moi.
Quand Astraia revient à ma hauteur, elle me donne un léger coup de coude qui me sort de ma stupeur, avant de sortir. Aussi, sans m'en rendre compte, je leur dis au revoir aussi tout en en les prenant dans mes bras à tour de rôle.

La prophétie de Maglaï le rouge : tome 1 Les Envoyés [terminé]Donde viven las historias. Descúbrelo ahora