Résilience

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Avertissement: ce chapitre peut redéclencher un ou des traumatismes, les mots que j'utilise sont crus mais ils ont volontairement été inchangés. TW: harcèlement scolaire, harcèlement sexuel.

Quelques années plus tard on m'a parlé de « phobie scolaire », j'ai trouvé ce mot inadapté, je n'avais peur ni de l'école, ni des autres, je ne pouvais simplement plus supporter de me réveiller cinq jours sur sept en me demandant si cette nouvelle journée ne serait pas la dernière.

« Je vais te tuer à coups de marteau »,
« tu seras dans ta tombe et je cracherai dessus », « bientôt je te violerai », « tu vas souffrir avant que je ne t'enterre de mes propres mains ». Voici une infime partie des phrases que des ados entre douze et seize ans m'ont adressées.

Les filles visaient davantage le physique et l'intellect, les garçons n'hésitaient pas à faire des allusions sexuelles tournées en menaces en classe alors qu'un professeur était présent.

Je m'étais résolue à être touchée par des mains sûres d'elles, par des personnes n'ayant pas conscience d'une
notion primordiale que l'on n'aborde pas à l'école, jamais, le consentement.

Se taire pour ne pas subir plus, persuadée d'être coupable.

Par peur je n'allais pas aux toilettes du collège, je ne savais que trop bien que là-bas tout pouvait m'arriver sans témoin adulte.

L'unique fois où je m'y suis rendue des tarifs étaient écrits à côté de mon prénom, je me trouvais à deux mètres de la sortie lorsqu'un garçon me plaqua contre le mur et commença à me déshabiller en disant « pourquoi tu résistes, si ça ne se passe pas ici ça se passera tôt ou tard quand tu
penseras être tranquille », j'ai réussi à le repousser et j'ai rejoint la cour sans ne rien laisser paraître.

J'étais la coincée puis la pute. La salope intello. Le sac d'os, l'anorexique, la plate, le fantôme. La sale chienne, la muette, « mais si tu sais la meuf bizarre là, j'sais plus son nom ».

La fille de la folle et du vieux.

Celle que l'on voyait rarement à la cantine, je me cachais dans la cour et me déplaçais au fur et à mesure qu'un surveillant fouillait tous les recoins pour vérifier qu'il ne restait personne.

Mes troubles du comportement alimentaire étaient revenus sans crier gare et entraînaient avec eux des mensonges quotidiens.

Je séchais de plus en plus de cours, j'étais malade chaque jour, ce n'était pas simulé.

Mal dans ma peau entre ces murs tapissés de mappemondes et tables de multiplications, pas mieux lorsque j'en sortais et me devais de protéger celui que j'aime.

Comment pouvais-je appréhender un endroit que j'avais toujours aimé, pourquoi n'arrivais-je plus à supporter les violences, j'étais faible, je le pensais.

Des coups j'en avais déjà pris en primaire, des poings dans le ventre, des croche-pieds, des élèves qui coinçaient mes doigts dans les portes jusqu'à ce que je ne puisse plus les bouger.

Je n'avais pas cessé d'aller à l'école pour autant, quelques années plus tard, j'avais peut-être trop accumulé de maux pour résister.

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