PROLOGUE

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Ses yeux étaient plongés dans le vide. Comme si une brume opaque obscurcissait son champ de vision, la vieille sibylle proclamait sa prophétie. Absorbée par l'essence divine qui l'incarnait, elle détachait chaque syllabe de ses paroles oraculaires dans un débit lent et complètement atone.

« L'Aurore approche... et un bonheur inouï attendra le héros de l'Aurore. Fièrement accompagné, il saura contourner les dangers et provoquer sa destinée, à travers les couailles de la convoitise et de la perversité.

Sa fortune n'égalera tous les joyaux et les terres de nos Terres, car rien n'égalera tout l'or de l'Aurore, ni tout ses bienfaits...

Mais sa liesse ne pourra être si et tant que l'un ou l'autre s'ignore.

Car ce n'est que, lorsqu'au fond du puits, il n'espèrera plus rien de la vie, que les rayons éblouis révèleront le trésor de l'Aurore... »

La transe s'évapora aussi vite qu'elle était venue, et sous le regard hébété de son interlocuteur, la prophétesse reprit ses esprits, complètement hagarde. Voyant les yeux ronds incrédules de son dernier visiteur, elle s'excusa :

— Ai-je dit quelque chose de mal ?

Le voyageur n'eut que faire de lui répondre... Il se redressa, aussi rapide que l'éclair, et déguerpit de la bicoque de l'oracle en se répétant au mot près ce dont il avait été témoin.

De son côté, écarquillant les yeux et dans le brouillard total, la vieille femme contestait à peine le départ précipité de son client. Scrutant sa silhouette s'éloigner au-dehors, elle fut prise d'un soubresaut dégoûté. Il ne l'avait pas payée.

La Quête de l'AuroreWhere stories live. Discover now