Chapitre 10

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J'appelle les abonnés absents avant de fermer les portes. Toutefois j'ai omis d'appeler Amandine. Je n'ai pas envie de lui parler. Je rentre chez moi. Les rues sont toujours aussi sombres, ils pourraient venir remettre le courant de cette rue qui réussit à être peu éclairée par celles adjacentes. J'aperçois quelqu'un au loin, évidemment c'est elle. Pile je gagne, face tu perds ! J'ai envie de jouer. Des côtes fêlées ne m'ont pas servie de leçon ? Il faut croire que non. Comme au premier jour je piste ma proie, elle ne m'a pas encore remarquée. J'accélère car nous ne sommes plus très loin de son immeuble. Ça y est, elle se sent traquée et avance plus vite. J'en fais de même pour coller à ses talons. Elle court. Je cours. Elle est à sa porte d'entrée. Je dois détacher mes yeux de mon antilope. Allez ! Regarde le code qu'elle tape, 10... 25...A ! Elle entre et je halète derrière la porte. Je contrôle à peu près la quinte de toux qui veut sortir de ma gorge et chatouille ma langue.

- C'est toi ?

- Oui. Rassurée ?

- Un peu.

- Si j'étais toi je ne me sentirais pas à l'abri.

- Pourquoi ? Il y a une porte massive entre toi et moi.

Je commence à taper sur le digicode.

- Tu bluffes.

- Certaine ?

Je finis et le grésillement de la porte qui accepte la bonne combinaison retentit.

- Cours !

Et la voilà au pas de course. Elle choisit les escaliers, l'ascenseur aurait été trop lent.

- Alors, on peut dire que j'ai eu la main heureuse sur ce coup.

- Tu ne m'auras pas.

- C'est bien l'auto-conviction.

Cinquième et dernier étage, je commence à brûler des muscles ainsi qu'au niveau de mes poumons. Elle continue à monter, sous les toits, peut-être y a-t-il d'autres appartements aménagés sous les combles. J'entends ses clés. Je la vois mais il est trop tard. Trop tard pour elle. Je la plaque violemment contre sa porte.

- Tu as perdu.

- Tu es morte !

- Toi aussi, mais contrairement à toi j'ai la hargne donc encore de l'énergie.

- Alors ? Tu as gagné... Et que vas-tu faire ?

Mes mains tétanisées, comme le reste de mon corps, tremblent mais passe sous son pull et le soulève légèrement. De mon autre main je tourne la clé déjà en place et pousse la porte pour que nous franchissions le pas. Je la maintiens de nouveau contre un mur et plonge mon regard dans le sien.

- Dis-le.

- Quoi ?

Mon étreinte se fait plus dure.

- Dis-le !

- Je suis désolée...

- Non pas ça.

Je l'embrasse fougueusement. Son baiser est au premier abord réticent puis sa langue se délie. Quand sa bouche se détache de la mienne je soupire à nouveau ces mots:

- Dis-le...

- J'ai envie de toi...

Ça y est ma proie m'octroie son dernier souffle. En moi circule une divine chaleur. Je suis affamée d'elle, pourtant je prends le temps de me retourner pour jeter un œil sur son lieu de vie. Je sens mon bras se plier, je n'ai pas l'opportunité de riposter et elle me bloque à terre après une petite béquille suivie d'un croche-patte.

Self ControlWhere stories live. Discover now