Chapitre 23 (Fin)

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- Monsieur Granwall, venez à mon bureau s'il vous plait.

J'attrapai mon sac à dos et mes livres et me dirigeai vers le bureau de Mr. Johnson.

- Vous vouliez me voir ?

Il me scruta quelques secondes avec un air de jugement que je ne saurais réellement interpréter.

- Vous avez écouté mon cours aujourd'hui.

- En effet Monsieur.

- Et j'ai par ailleurs eu l'occasion de lire votre nouvelle durant les vacances. Nouvelle que vous m'avez miraculeusement rendue à temps !

Je lui souris faiblement ne sachant vraiment quoi faire d'autre.

- Sid, votre histoire était incroyable.

Je le fixai à mon tours un peu désemparé:

- Vraiment ?

- Tout à fait. J'ai été très touché par votre style d'écriture et vos descriptions. Bien entendu, le sujet a beaucoup aidé, c'était sincèrement une des nouvelles les plus émouvantes que j'ai eu à lire durant mes années en tant qu'enseignant.

- Je crois que vous exagérez légèrement Monsieur.

Il poussa un long soupire et remonta les manches de sa chemise.

- Non, je ne crois pas exagérer. Vous m'avez convaincu à vous garder dans mon cours. Je crois que cette année sera un nouveau départ pour vous. Je constate déjà que vous vous recentrez sur vous-même, ce qui est une première étape très importante pour vous épanouir correctement après ce que vous venez de traverser.

- C'est toujours difficile Monsieur, ça ne fait que deux semaines.

- Et comment vous sentez-vous ?

Je pris quelques secondes pour réfléchir à ma réponse. Ça me paraissait si compliqué de mettre des mots sur mes émotions. Comment décrire tout ce qui me passait par la tête en ce moment ?

- Je me sens terriblement mal, mais j'essaie d'extérioriser, d'en parler ou bien d'écrire. Ça m'aide à lâcher prise et à penser à autre chose.

- C'est la meilleure chose à faire.

Je sentis alors mon cœur se serrer contre ma poitrine, et j'eu soudain des difficultés à respirer.

- Sidney vous allez bien ?

Je joignis alors mes mains à ma gorge et à mon torse et essayai de respirer profondément en fermant les yeux et en me penchant en avant. Petit à petit, la douleur se dissipa et je me relevai vers Mr. Johnson.

- J'ai fais une crise. Ça m'arrive régulièrement depuis... depuis. Répondis-je en agitant la main afin de lui faire comprendre de quoi je faisais allusion.

- Est-ce que vous voyez quelqu'un ?

- Quelqu'un ? Un psychologue vous voulez dire ?

Il hocha la tête.

- Oui j'en vois un deux fois par semaine. Ça me fait du bien je crois.

- N'hésitez pas à venir me voir pendant votre temps libre si vous avez besoin de parler.

- Merci Monsieur pour votre soutien. Maintenant veuillez m'excuser mais je dois aller voir quelqu'un.

- Je vous en prie, je vous libère.

Je remontai alors les marches de l'amphithéâtre lorsqu'il m'interpella une dernière fois:

- Puis-je vous poser une dernière question ?

- Oui.

Il sembla hésiter un instant avant de reprendre la parole:

- Quand est-il décédé ?

Un frisson parcouru mon corps à l'entente de ces mots. C'était comme si en prononçant cette phrase, je m'étais replongé dans la réalité. Est-ce qu'un jour je pourrai écouter et répondre à cette question sans flancher, en gardant la tête haute et sans plisser les yeux pour m'empêcher de pleurer ? Je l'espérai.

- Il est mort le jour de Noël, le 25 décembre.

Je vis son visage grimacer.

- Je suis désolé, merci d'avoir répondu. Je vous souhaite une bonne journée.

Je sortis finalement de la pièce et me rendis au fond des jardins du campus, derrière le mur en brique, et je m'assis autour de la table ronde en bois.

- Bonjour Sid.

Je tournai la tête vers mon interlocuteur et lui souris.

- Salut Elliott.

Il s'installa à ma gauche et nous commençâmes notre déjeuner en discutant.

- Un jour il m'a avoué que son plus grand rêve était d'aller sur la lune. M'annonça t-il en observant le ciel.

Je levai alors les yeux à mon tours et remarquai que le ciel éclaircit nous permettait de voir la lune de là où nous étions.

- Peut-être qu'il y est maintenant.

- Sur la lune ? Non, il doit être en train de courir quelque part sur la plage si tu veux mon avis. Affirma Elliott.

- Pourquoi ne serait-il pas dessus ?

Il dévia son regard vers moi et me fixa pendant plusieurs secondes.

- Il doit probablement t'attendre pour que vous fassiez le voyage ensemble.

Je soufflai amusé de sa remarque et croquai dans mon habituel sandwich.

- Qu'il ne m'attende pas, je compte bien profiter de la vie pour nous deux avant de mourrir.

On continua alors de discuter de toi, de tout ce que tu nous avais apporté et de tout ce qu'on aimait chez toi. Peu importe l'année à laquelle je rédige ceci, il faut que tu saches que je ne t'ai jamais oublié et que tu m'as aidé à devenir l'homme que je suis aujourd'hui. Il ne se passe pas un seul jour sans que je pense à toi, mais je voulais te faire savoir que j'ai réussi à tourner la page même si traverser le deuil n'a pas été simple. Je pense que tu es heureux désormais, en tout cas j'espère que tu l'es et que tu te souviendras toujours de moi. Tu me manques, mais je continue à me battre pour toi ici sur Terre.

À bientôt sur la lune,

Sidney August Granwall.

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