Chapitre 67 - San

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- Jane ? Jane ! C'est fini. Il faut que tu rentres chez toi maintenant. Tu veux que je te raccompagne ? 

Ma conscience : Tu l'as entendu ? C'est fini. Terminé. Bye bye. Chao.

Non. Non, non, non, non, non, non...

~ Un peu plus tôt ~

Le jour J était déjà arrivé ; celui des résultats de la procédure d'appel que nous avions lancée suite au refus d'accorder le droit d'asile à nos protégés. Tous les retours d'audience avaient été négatifs. Un coup dur qui ne nous arrêta pas. Les deux jours qui nous avaient été accordés étaient passés à une vitesse vertigineuse. D'ailleurs, j'avais passé ces deux jours avec Maître Chen, l'avocate que Lony avait trouvée pour moi. 

Ayant une parfaite connaissance de chaque dossier, je l'avais assistée dans toutes les démarches à effectuer. J'avais également passé beaucoup de temps avec mes élèves pour les préparer au mieux. Nous leur avions fait répéter plusieurs fois les réponses aux différentes questions qui allaient leur être posées. Nous nous sommes également assurées que le récit de leur périple était cohérent et suffisamment argumenté. Pour certains, j'avais mis le paquet sur les cours de français afin qu'ils s'expriment tous le mieux possible. Je n'avais pas pu fermer l'œil plus de deux minutes d'affilé en plusieurs jours, et sans café ni cachet pour me rebooster, ça commençait sérieusement à tirer. Mener une vie saine demandait bien plus d'efforts que je ne l'aurais cru. Je n'avais qu'une envie : retomber dans mes anciens travers. Mais ce n'était pas une option. Je devais tenir encore.

Pour cause, dès que nous avions reçu les réponses négatives suite aux audiences, il nous a fallu rédiger les déclarations d'appel, les déposer au greffe du tribunal et préparer une meilleure défense. Mais nous avons également dû rassurer les principaux intéressés, répondre à leurs questions, être présentes pour eux ; le tout en un minimum de temps. En trois mots : on était charrette. 

Me retrouver avec une quantité aussi astronomique de boulot, sans aucun rapport avec l'art, après avoir passé des semaines sans me servir de mon intellect, était d'une violence extrême. J'avais dû retrouver tous mes mécanismes de travail en un éclair et les adapter à des domaines complètement nouveaux. Contrairement à ce qui arrivait à l'agence, je n'étais pas sollicitée toutes les trente secondes sur un sujet différent ; mais me retourner le crâne en boucle sur les mêmes problèmes n'était guère plus reposant. 

Ces cinq jours étaient revenus à baigner dans nos propres excréments sans jamais pouvoir prendre de recul, car la moindre seconde de perdue était un risque de passer à côté de quelque chose, et nous ne pouvions nous permettre aucune erreur. 

Tout cela nous amenait à cet instant. J'attendais le jugement définitif sur le parvis du tribunal où Nabil m'avait rejointe. J'étais éreintée. La seule chose qui me maintenait éveillée était l'angoisse du verdict. Comme si tout cela ne suffisait pas, c'était une de ces journées typiques de novembre : si grise qu'il avait fait nuit presque toute la journée ; si froide qu'il n'y avait nul endroit dehors où se mettre à l'abri ; le vent soufflait tant que les fines gouttes de bruine tombaient à l'horizontal... Rien de plus déprimant. Tout ce que nous pouvions encore faire à ce stade, Nabil et moi, était de croiser les doigts et d'attendre que les secondes s'égrainent les unes après les autres. C'était comme observer un par un des grains de sable s'écouler d'un sablier. Le sablier de la mort.

Maître Chen était à l'intérieur avec tous les demandeurs d'asile depuis des heures, et nous étions impatients de les voir ressortir. L'attente était d'autant plus insupportable que le froid glacial de novembre s'infiltrait absolument partout sous nos vêtement. N'y tenant plus, je sortis une cigarette de ma poche. À bas les bonnes résolutions, il y avait des problèmes bien plus graves dans l'immédiat. 

Le San et l'interdit (Fanfiction Orelsan)Tempat cerita menjadi hidup. Temukan sekarang