Chapitre 23.2

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Cette découverte m'avait assommée, un sentiment étrange jamais ressenti auparavant venait de faire son apparition. Il ne parlait jamais de ses parents, de son enfance, et en découvrant ses photos, bien que nullement cachées, me donnait l'impression d'avoir trahi sa confiance. Nous n'avions pas reparlé d'Anaïs depuis ces révélations sur le fait qu'il faisait semblant de ne pas savoir jouer au bowling uniquement pour la laisser gagner, et j'évitais soigneusement d'aborder le sujet. Quand il était revenu dans la chambre, j'étais encore secouée de ma découverte, bien que parvenue à ne rien en laisser paraître.

– Non, c'est difficile d'en parler, et puis hier c'était son premier Noël sans elle, ça a dû être horrible pour lui. Déjà moi, j'ai eu un coup de blues alors que je n'étais pas proche de maman, je n'ose pas imaginer ce qu'il a pu ressentir...

Sam, à qui je continuais de révéler la moindre nouvelle concernant l'ombre, se doutait qu'il s'agissait d'un proche d'Éric. Il m'incitait à en apprendre davantage sur Anaïs, mais je n'avais pas encore eu le courage de le faire, ne voulant pas remuer le couteau dans la plaie. Pour lui, elle devait certainement se servir de moi pour faire passer un message à son frère. Il supposait également qu'elle m'avait choisie, car j'avais perdu ma mère en même temps qu'elle était décédée, très certainement aux mêmes dates, me rendant plus réceptive à la percevoir. Et si elle répétait constamment de m'accrocher, c'était, selon lui, m'accrocher à son frère puisque depuis le départ elle tenait à ce que je le rencontre. J'avais réponse à toutes mes questions.

– C'est sûr que ça n'a pas dû être un jour très heureux, confirma Laura, d'autant plus que ça n'a pas l'air d'être l'harmonie parfaite entre lui et ses parents.

– Je me trompe sûrement, ce n'est qu'un ressenti, si j'avais possibilité de te montrer le cliché peut-être que tu ne verrais rien d'anormal, mais pour moi c'est flagrant. Il y a de l'animosité entre les enfants et les parents. Et le fait qu'il ne parle jamais d'eux ou qu'il coupe court dès que l'on aborde le sujet, qu'il ne retourne que très rarement les voir, ne fait qu'accentuer cette impression.

– C'est toi la spécialiste des photos ! Tu dois sûrement avoir raison.

J'acquiesçais et poursuivis :

– Si Anaïs tient à ce que je m'accroche à Éric, c'est peut-être pour cette raison qu'elle n'est pas réapparue après qu'on se soit embrassés.

Je ne l'avais pas revue depuis la fois où j'avais éprouvé, en plus de sa tristesse, une sorte de satisfaction. Sans doute que de savoir le chagrin de son frère estompé la rassurait.

– Sans doute. Tu continues de tout noter dans ton carnet ?

– Oui toujours, mais je ne vois pas ce qu'elle aimerait dire à son frère ? À part qu'elle veille sur lui depuis tout ce temps ?

– Possible, supposa Laura en haussant les épaules. Et lui n'a pas cherché à en savoir plus sur l'ombre que tu vois ?

Je décroisai mes jambes qui commençaient à fourmiller pour m'asseoir sur mes genoux.

– Non, rien, et d'un côté tant mieux. Je n'ai pas envie de lui dire que je vois sa sœur depuis des mois, alors que je n'ai rien à voir avec elle et qu'il préférait sans doute être à ma place. Moi la première j'ai été déçue de découvrir que ce n'était pas maman. C'est vrai, pourquoi elle n'est pas allée directement vers lui ? Il devait sûrement être plus à même de la percevoir que moi !

– Je ne sais pas Julie, mais avoue qu'elle t'a permis d'avoir la vie dont tu as toujours rêvé ?

– Touché ! dis-je en soupirant. En fait je suis bien contente qu'elle soit venue vers moi. T'imagines si ça avait été Gwen ! Ou ta sœur !

Danse pour moiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant