PROLOGUE

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— Appelez la police, s'il vous plaît.

Saint avait compris. Il avait senti en passant par ce chemin sinueux que, au fond de cette rivière dont l'eau était trouble, un corps gisait. Son caractère déterminé, il l'avait acquis durant ses années d'étude à la faculté de journalisme de Bangkok, c'est pourquoi, sans hésitation, il avait sauté à pieds joints dans cette eau qui ne dépassait pas les dix degrés. Et lorsqu'il était remonté à la surface, tenant un corps en position de secourisme, les quelques personnes présentes l'avaient regardé comme s'il sortait tout droit de l'asile. Mais peu importe le regard des gens, il avait simplement demandé, et d'un ton très calme, d'appeler la police.

La portière de la Mercedes claqua bruyamment lorsque Zee pénétra sur les lieux. Il n'était qu'un chef d'équipe, un jeune lieutenant de la brigade criminelle, mais accompagnait son supérieur la plupart du temps. Ce dernier trouvait en Zee ce petit truc qui était un plus. Un sens de l'observation hors du commun, ainsi qu'un sang-froid inégalable.

Dès leur arrivée, les scellés jaunes étaient déjà installés et on les fit passer par-dessous. Le corps en décomposition de ce qui semblait être une jeune femme gisait sur le sol humide. L'odeur d'aliments rances stagnait, bien qu'ils furent à l'air libre. Zee se couvrit discrètement le nez en s'approchant et s'accroupit finalement en regardant l'état du cadavre. Ses vêtements avaient été arrachés, il ne restait qu'un morceau de t-shirt rose, laissant apercevoir un sein de la victime. Sur son abdomen, il remarqua une tache verdâtre. Elle n'en était pas à son paroxysme, ce qui laissait penser que la victime avait été tuée il y avait moins de 48 heures. Ce n'était là qu'un signe prouvant le début de la décomposition.

— Que s'est-il passé ? lança Chai Kaenkoon, le commissaire.

Une équipe de police était déjà sur les lieux et un des cadets s'avança vers lui, les mains moites. Il ne semblait pas tenir le choc face à la femme en putréfaction ayant été tirée de l'eau. Son visage était livide.

— Un garçon... un... un garçon l'a sortie de l'eau. Elle était dans le fond d'après lui, mais il dit avoir vu un sac à main flotter. D'après son témoignage, il aurait directement compris ce qui se passait.

— Elle était dans le fond ? demanda Zee, sourcils froncés. Comment est-ce qu'elle aurait pu être...

Il a crevé l'estomac, le côlon et les intestins. Bien sûr, il faudrait l'avis du légiste, mais c'est une hypothèse qui tient la route.

Se fichant pas mal des scellés de police, un jeune homme pénétra dans l'enceinte du périmètre délimité.

— C'est qui, celui-là ? chuchota Zee.

Ce dernier se releva vivement et lui fit face. Il s'apprêtait à prendre la parole lorsque le jeune homme fit tomber le masque couvrant le bas de son visage, dévoilant des traits doux, semblables à ceux d'un ange. Une innocence pure. Ses lunettes rondes lui donnaient un air geek, mais tout autant que ses lèvres pulpeuses, ses grands yeux clairs montraient à quel point il y avait, chez ce garçon, une partie enjôleuse qui ne pouvait être niée. Le grain de sa peau, semblable à de la porcelaine, laissa Zee sans voix, il n'arrivait même plus à respirer correctement. Quelque chose le déconcertait, et il ne parvenait pas à mettre le doigt dessus.

— Lieutenant, commença le garçon à lunettes en regardant la plaque sur le gilet de Zee, j'ai vu ce sac flotter et je voulais le rapporter à la police. Ensuite, j'ai senti mon pied heurter quelque chose dans l'eau. J'ai tout de suite compris.

— Et vous l'avez ramené sur la terre ferme sans penser qu'il s'agissait là du travail de la police, évidemment, gronda le commissaire.

Le jeune homme aurait pu baisser les yeux et s'excuser, mais il n'en fit rien et leva même le menton un peu plus haut.

— D'ailleurs, qui êtes-vous ?

— Saint Suppapong Udomkaewkanjana, je travaille pour le journal local de Nakhon Pathom.

— Tiens, un journaliste ! Il ne manquait plus que ça, grogna Zee.

Saint croisa les bras sur sa poitrine, affichant un air de défi face au jeune lieutenant aux cheveux noirs. Le commissaire était hors de discussion, comme si le monde s'était arrêté pour ne laisser que ces deux-là ensemble. Une bataille de regards sans merci avait commencée.

— Le légiste arrivera d'ici exactement deux minutes.

Zee regarda furtivement sa montre, comme un réflexe.

— Et il vous dira que les organes ont été perforés pour que le corps ne remonte pas à la surface, expliqua Saint. Vous lisez la presse ?

— Pardon ?

— Est-ce que vous lisez la presse lieutenant...

En remontant les lunettes sur son nez, Saint regarda de nouveau la plaque qui ornait fièrement l'uniforme du jeune homme.

Merde, il a l'air d'avoir un corps aussi beau que son visage, pensa le journaliste.

— Lieutenant Pruk Panich(*), c'est bien cela ? Est-ce que vous lisez la presse ?

— Qui ne lit pas la presse ? demanda froidement Zee.

— Si vous fouillez attentivement dans les archives, vous pourriez vite comprendre qu'il s'agit là de l'œuvre d'un Copycat.

— Un Copycat ? souffla le commissaire avant de ricaner.

Saint acquiesça vivement, un petit sourire sur les lèvres.

— Je n'en dis pas plus, puisqu'il s'agit du travail de la police.

Il lança un clin d'œil, suivi d'un wai(*), et s'éclipsa en laissant Zee sans voix, encore une fois. Il regarda le jeune journaliste s'éloigner en soupirant longuement.

— C'est qui celui-là ? répéta-t-il, suspicieux.

Mais il eut à peine le temps de s'attarder sur ce personnage qui semblait à la fois cinglé et sournois que la voiture du légiste fit son arrivée. Zee regarda de nouveau sa montre et fronça les sourcils.

Deux minutes... Comment pouvait-il savoir que le légiste arriverait dans exactement deux minutes ?




***




· Un wai : C'est de cette manière qu'on salue en Thaïlande, en joignant les mains, comme lors d'une prière.

· Les prénoms : En Thaïlande, beaucoup de gens ont un surnom donné depuis leur jeunesse. Exemple : Le véritable prénom de Zee est « Pruk » et son nom de famille est « Panich », mais son surnom est « Zee », c'est pourquoi il s'appelle ainsi. ''Zee'' Pruk Panich. Pareil pour Saint, qui porte en fait le prénom de Suppapong. 




***


Et voilà ! ☺

Le prologue est en ligne, et j'espère que ça vous plait déjà ! En tout cas, c'est vraiment un plaisir de vous retrouver. J'avais hâte de vous revoir ! 🥺

Donnez-moi vos premières impressions, ce serait un plaisir ! ❤

On se retrouve lundi prochain, 

LOVE. ❤

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