CHAPITRE II - SAINT

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         Le visage livide du lieutenant me prouve que rien de bon n'est en train de se passer. Ce n'était pas un appel anodin de son chef, si j'en crois mes fortes intuitions. Il souffle longuement, passe une main dans ses cheveux soyeux et dépose un billet sur le comptoir avant de se lever en trombe.

— Où allez-vous ?

— Je dois me rendre à Bangkok, ils ont... pour une affaire.

Je sais exactement ce qu'il se passe.

Je me lève à mon tour et le rattrape en trottinant.

— Je viens avec vous !

— Hors de question, grogne-t-il.

— Je viens avec vous, je peux vous aider à y voir plus clair et...

Il me coupe au milieu de ma phrase et se retourne vers moi, sourcils froncés. Je reste subjugué par la force avec laquelle son regard plonge dans le mien, faisant frissonner l'entièreté de mon corps. Le lieutenant Pruk Panich est quelqu'un qui instaure un sentiment de sécurité mais qui, avec des yeux si noirs, peut faire trembler vos jambes en moins d'une seconde. Seulement, moi, je n'ai pas peur et j'estime avoir le droit d'être au courant, après toutes les révélations,

— Tu ne viens pas avec moi, parce que le chef me tuerait d'arriver avec un journaliste au bras, c'est clair ? Et puis, putain, je déteste la presse ! Vous êtes toujours dans nos pattes à essayer de jouer les flics, mais c'est un métier, tu le sais ?

— Journaliste est un métier qui pourrait grandement vous aider, me défends-je d'une voix froide.

Un sourire ironique ourle ses lèvres.

— Ecoute, toi tu écris des articles et moi je cherche des tueurs. Tu vois, on ne joue pas dans la même cour, tous les deux. Alors, mêle-toi de tes petites annonces et laisse-moi faire mon boulot.

Il me tourne le dos, mais il est hors de question que je le laisse dans cet état. Alors, plutôt violemment, j'attrape son bras et le force à se retourner de nouveau. Bien sûr, il se dégage violemment, mais je sors une carte de visite de mon portefeuille et lui enfonce dans la poche de sa veste en cuir. J'appuie plusieurs fois et tapote à l'endroit de son biceps.

— Bien, si vous pensez pouvoir résoudre l'énigme du Copycat tout seul, que grand bien vous fasse. Si, en revanche, vous avez besoin de quelqu'un pour vous éclaircir, mon numéro est inscrit sur la carte.

Il est contrarié. Son visage est fermé et son nez légèrement retroussé par un élan de colère qu'il garde au fond de lui. Je ne me laisse pas impressionner et le devance pour sortir du bar. Avant de rejoindre la ligne de métro, je jette un œil à mon téléphone et remarque que ma batterie est presque pleine. Je ne lui laisse pas deux jours avant de me passer un coup de fil.

Donc, il déteste la presse, et je ne suis pas un grand fan de la police. La raison est simple : ils ne font pas leur boulot pour trouver un tueur et sauver des victimes, ils le font pour prouver au chef qui est le meilleur de l'équipe.





*





— P'Peak, je te le demande comme je pourrais le demander à un ami. D'ailleurs, tu es mon ami depuis longtemps !

— Saint, je ne peux... merde, c'est de la déontologie.

Je baisse les yeux, essayant de me montrer le plus adorable possible. Bien sûr, je sais que Peak a eu un faible pour moi à l'époque et bien sûr que c'est la raison pour laquelle je suis venu le voir. En fait, c'est le seul policier que je supporte, parce qu'il est un tout petit peu plus vieux que moi et que je l'ai déjà aidé à y voir plus clair au sujet d'une ou deux affaires, tout en restant anonyme. Et aujourd'hui, alors que la plupart des équipes sont à Bangkok afin de collaborer avec la police de la ville, je suis venu le voir et lui soutirer des infos.

COPYCAT || DISPO SUR AMAZONWhere stories live. Discover now