𝐋𝐞 𝐌𝐚𝐫𝐜𝐡𝐚𝐧𝐝 𝐝𝐞 𝐑𝐞̂𝐯𝐞𝐬 「enhypen 」

- 𝑃𝑟𝑜𝑙𝑜𝑔𝑢𝑒 -

Les deux garçons étaient assis l'un en face de l'autre sur le sol infiniment sombre, entourés de dizaines de petites sphères lumineuses sans couleur qu'ils avaient récolté tout au long de la journée.
Le blond en prit une dans ses mains et regarda à l'intérieur, admirant l'image du sous-bois calme et ensoleillé qu'il venait de lui fabriquer. Il posa cet boule à ses côtés et en prit une autre pour créer une nouvelle image, un nouveau souvenir pour un nouveau rêve.

Le brun, qui l'avait regardé faire, lui prit la sphère qui brillait maintenant d'une lueur verte entre ses doigts fins en se concentrant dessus.

— Que fais-tu ? Lui demanda le blond en relevant la tête vers lui.

Le brun ne lui donna aucune réponse et ferma les yeux en rapprochant la sphère de son visage. Une lumière sombre et froide passait de ses doigts à l'intérieur de la boule, plongeant les sous-bois dans les ténèbres. Il y ajouta une meute de loups aussi blancs que la pleine lune, dormant paisiblement sur les brindilles et les feuilles séchées d'automne.
Le brun rouvrit les yeux et sourit en reposant la boule entre son ami et lui.

Le blond le regardait créer d'autres images du même genre sans rien dire. Bien que ses souvenirs l'inquiétaient beaucoup et qu'il lui arrivait d'être mal à l'aise en les observant, il enviait les créations du brun et la facilité qu'il avait d'imaginer des détails précis et de créer des images sombres et puissantes.

Il levait les yeux et admirait les bulles au dessus de leur tête. Une infinité de bulles de quelques mètres de diamètre flottaient constamment, illuminant le monde vide et noir dans lequel ils se trouvaient.
Chacune de ces bulles appartenaient à un enfant, et elles contenaient leur univers, leur souvenirs les plus récents ainsi que les plus enfouis.

Les deux garçons créaient alors les rêves, voyageant à l'intérieur de ces bulles et en y laissant des sphères, qui finissaient par se fondre dans le décor et agrandir leur univers.

Le blond était le Marchand de Rêves. C'était avec plaisir qu'il veillait sur les nuits de chaque enfant en leur offrant des rêves doux et paisibles, ressassant les bons moments, même les plus insignifiants.

Ils rassemblaient leurs sphères et les rangeaient dans leur sac où des millions d'autres boules se trouvaient à l'intérieur, même si cela paraissait difficile à croire.
Ils se dirigèrent vers une des bulles pour entrer à l'intérieur et l'explorèrent, jouant avec des chats qui passaient par là, saluant des gens qui ne les voyaient pas, ou s'asseyant sur un banc dans la cour de récréation d'une école, où tous les élèves semblaient s'amuser.

Le brun s'approcha soudainement d'un enfant et lui toucha l'épaule. celui-ci fit tomber son ballon au sol, qui se brisa tel un œuf et se mit à cuire comme sur une poêle chaude. Le petit garçon se mit à pleurer.

— Non ! Arrête ça ! Cria le Marchand de Rêves en lui tirant le bras.

Il fit malencontreusement tomber le sac du brun, dont des sphères sombres s'échappèrent et roulèrent dans la cour, sous leur yeux.
Les deux garçons observaient l'ombre des boules se répandre à une vitesse effrayante dans la cour, faisant pleurer tous les enfants qui s'y trouvaient.

— Je suis désolé, je... Je ne voulais pas ! Dit le brun en perdant tout ses moyens, essayant de ramasser quelques unes de ses sphères.

Les enfants cessèrent de pleurer et se tournèrent vers les deux garçons, les fixant sans bouger, puis la bulle se mit à trembler.

— Il faut partir. Tout de suite !

Le blond tira le brun en dehors de la cour et les deux garçons se mirent à courir le plus vite possible pour s'échapper de la bulle.

Une fois sur le sol et à court de souffle, ils regardèrent la bulle sombre flotter au dessus d'eux parmi les autres bulles qui elles, brillaient d'une lumière vive.

— Tu recommences ! Cria le blond.

— Je ne voulais pas que cela se finisse comme ça, je te le jure. Laisse-moi essayer autre chose, s'il te plaît. Suppliait le brun.

Il regardait autour de lui, et ses yeux se posèrent alors sur une petite bulle, celle d'un jeune enfant.
Il s'en approcha, comme attiré par elle, puis il posa sa main dessus et ferma les yeux.
La bulle de ce petit garçon était vide de souvenirs, sans doute dû à son jeune âge.

Le brun se concentra dessus, fouillant parmi les seuls souvenirs qu'il pouvait trouver, puis sourit.
Il y voyait les bras d'un père et d'une mère aimants et entendait des rires, ceux du petit garçon.
Puis l'image devint soudainement très floue et le brun se crispa à la vue d'un pont. Cette dernière image le mettait mal à l'aise, mais il tenait à arranger cela.

— Ça suffit comme ça ! Intervint le blond, remarquant des ombres se propager dans la petite bulle.

Le brun retira sa main, terrifié et le souffle court.

Il était le Marchand de Songes Noirs. Plein d'imagination et de créativité, il créait malgré lui les mauvais rêves, étranges et dérangeant, mais parfois d'une beauté sans pareil.
Mais le Marchand de Rêves devait être près de lui, car sans le savoir, en cherchant dans les plus sombre souvenirs ou traumatismes, les songes noirs devenaient des cauchemars.

Cette fois-ci, il était allé beaucoup trop loin. Le Marchand de Rêves s'approcha de lui, les larmes aux coin des yeux, et posa sa main sur son épaule.

— Je suis désolé... murmura le blond.

— Non s'il te plaît, attends !

Le Marchand de Rêves passa la main devant les yeux de son ami qui perdit l'équilibre et le posa délicatement sur le sol, puis il laissa ses larmes chaudes couler.

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