• Chapitre 37 •

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Naomi

— Passez une bonne journée, Paul.
J'enfile ma veste et repousse mes cheveux derrière mes épaules. Paul affiche un sourire poli et répond de son timbre rauque habituel :
— Vous aussi, mademoiselle Anderson.
Je quitte l'étage, mon sac à main sur l'épaule et envoie un message à Adan qui doit m'attendre dans le hall - s'il a terminé son entretien à l'heure.
{— Je viens de terminer, est-ce que tu es là ?}
Le message à peine envoyé, Adan m'offre sa réponse. J'en conclus que son entretien est terminé, à moins qu'il ne l'ait interrompu afin de me répondre ? J'en doute fort.
{— Oui, j'attends dehors, ne tarde pas trop.}
J'appuie sur le bouton du rez-de-chaussé lorsque je remarque que l'ascenseur doit s'arrêter à l'étage du dessous. Quelqu'un de la comptabilité ? Je me positionne dans le fond et laisse pendre mes mains devant moi.
Le ding carillonne et les deux portes se scindent en deux, laissant place à une jeune femme et à Clarence Caldwell. Ses cheveux blonds ne sont plus coiffés comme d'habitude mais hirsutes, je remarque également qu'il ne porte plus sa cravate. La jeune femme, quant à elle possède un style particulier. Un style que j'aurais aisément complimenté lors de ma période gothique, ses cheveux éclaboussés de mèches rouges et noires sont en désordre et ses joues, d'un rose vif. Je me retiens de sourire et dis avec humour :
— Bonjour, passez-vous une bonne matinée ? Je suppose qu'ils étaient seuls dans un bureau pour finir dans cet état.
— Bonjour, Naomi. Très bonne matinée effectivement, et vous ?
La jeune femme se retient de pouffer de rire et baisse les yeux sur le sol, les lèvres pincées.
— Parfaite. réponds-je, jetant un coup d'œil à la demoiselle avant de revenir vers Clarence.
Son sourire en coin me laisse deviner qu'il sait que je me doute de quelque chose. Il se racle la gorge, amusé et redresse les pans de sa veste froissée. J'ai toujours trouvé cet homme extrêmement intimidant, il incarne une force d'esprit extraordinaire et lorsque je n'étais qu'une simple employée de bureau, je faisais toujours en sorte de bien me conduire, de peur de me faire gronder. Dès à présent, je travaille avec lui sur de gros dossiers ! La classe !
Lorsque l'ascenseur remue avant de s'immobiliser, Clarence me fait signe d'avancer la première :
— Après vous, mademoiselle Anderson.
— Merci, au revoir et bonne journée !
— Vous aussi, à bientôt.
Je quitte l'ascenseur, les commissures redressées et accours dans le hall en direction de la sortie où m'attend Adan. La porte ouverte, un ample coup de vent frais gagne mon visage et j'inspire goulûment cette odeur d'hiver. Je niche mon nez au creux de mon écharpe et embrasse du regard les alentours. Adan est là, appuyé contre la portière de sa voiture, le visage plongé sur son téléphone.
Mutine, je décide de sortir mon téléphone afin de lui envoyer un message.
{— Finalement je vais être un peu en retard.}
Adan fronce les sourcils et bougonne dans sa barbe. Hilare, je pouffe de rire et il relève enfin le nez de son portable. Son visage vire à l'exaspération et j'éclate de rire et trottinant vers lui.
— Trouves-tu que cela est drôle ?
— Un petit peu. chantonné-je, levant les talons du sol pour déposer un baiser sur ses lèvres.
— Il s'est passé quelque chose ? Je te trouve bien euphorique.
— J'ai croisé Clarence Caldwell.
— Oh. répond-t-il, interrogé. C'est lui qui t'amuse autant ?
— Non, il était avec une jeune femme et j'ai simplement constaté que nous étions pas les seuls à échanger quelques baisers au travail.
Un sourire naît sur ses lèvres et il enclenche la poignée pour déverrouiller l'Aston Martin.
— Je vois, tu montes ?
— Bien sûr.

Assise sur le siège moelleux du véhicule, je boucle ma ceinture et souffle sur le bout de mes doigts glacés. Adan se glisse à son tour dans la voiture et égare entre deux regards vers la route :
— Le camion de déménagement est déjà sur les lieux, Chesters et Victoria seront également là pour assurer notre protection.
— Ils vont nous aider ?
— J'ai du mal à nous imaginer porter un canapé de plus que cent kilos.
— Je croyais que les déménageurs s'étaient occupés des gros meubles ?
— Oui mais, il faut les remonter. Balance-t-il, chaperonné d'un regard moqueur. Oh, ça risque d'être plus compliqué que prévu.
Je n'aurais peut-être pas dû remettre en cause l'idée d'Adan. Les déménageurs nous auraient bien aidés sur ce coup-là. Nous traversons l'avenue principale lorsque j'aperçois au loin Chesters, au téléphone. Il semble furieux, ses mâchoires sont serrées, à tel point que je crains qu'elles ne se brisent.
— Chesters semble avoir un souci...
— Il est étrange en ce moment, je le trouve à cran.
Chesters hurle brusquement sur son téléphone et le fourre dans sa poche de costume. Whaou, que peut-il bien se passer ? A-t-il des problèmes personnels ? Adan se gare près du trottoir et coupe le moteur. Aussitôt, Chesters reprend un visage neutre et se rue vers la voiture pour m'ouvrir la porte.
— Bonjour mademoiselle Anderson, comment allez-vous ?
— Très bien merci Chesters, et vous ?
— Bien, mademoiselle.
Son ton plus que normal est particulièrement inquiétant. Je sors de la voiture et lève le nez vers le ciel. Les nuages sont gris aujourd'hui, j'ai comme la sensation qu'il va neiger. Adan arrive dans mon dos et souffle :
— Prête ?
— Prête à porter mon poids multiplié par dix, oui.
Il rit et s'élance vers le camion qui, peu à peu s'ouvre. C'est un nouveau pas qui se mouve dans ma vie, un déménagement...un vrai déménagement. Dans un appartement qui nous appartiendra, qui nous suivra et dans lequel nous évoluerons. C'est un grand pas...

Je dépose le carton sur le sol du salon et grogne des insultes plus jolies les unes que les autres en me redressant. Mon dos craque et deux ou trois vertèbres se remettent en place. Je ne pensais pas qu'un déménagement me donnerait 70 ans de plus ! Je n'ai cessé de faire des allers-retours et mes cuisses sont en compote de chair et d'os.
J'agrippe le gros carton avec écrit «literie » et file dans le couloir, menant à nôtre chambre. Mais, avant même de lâcher le carton sur le matelas, le scotch se déchire et les draps propres lèchent mes pieds.
— Merde !
Avec un effort que je caractériserai comme insupportable, je m'accroupis et commence à ramasser les débris de tissu. Des pas se font entendre dans le couloir et une voix à bout de souffle me surprend.
— Naomi ?
Je me retourne et découvre Adan, appuyé contre l'encadrement de la porte, son t-shirt à manches courtes trempé. Des gouttes de sueur perlent de son front et ses cheveux ramenés vers l'arrière sont humides.
— Tu as terminé ?
— Presque, Chesters prépare le reste des meubles à monter, est-ce que ça va ?
— Oui, sifflé-je, troublée par cette vision digne d'une film classé X. Le carton était mal scotché.
— D'accord, ne te surmène pas trop.
— C'est plutôt à moi de te dire ça ! Ris-je, un sourcil de relevé.
Ses dents blanches s'animent et il fait volte-face afin d'aider Chesters qui doit être lui-même, épuisé puisqu'il a délaissé sa veste de costume. Je range les affaires comme je le peux et gagne une nouvelle fois le salon pour cette fois, ranger les ustensiles de cuisine. La porte d'entrée s'ouvre et Victoria s'élance vivement vers la large table en bois. Elle dépose un carton qui doit peser une sacrée tonne et pousse un soupir éreinté.
— Est-ce que vous voulez un verre d'eau, Victoria ?
Elle couine de surprise et me fait face. Whaou, quel sursaut.
— Oh, mademoiselle Anderson, je ne vous avais pas vue excusez-moi. Je veux bien un verre, merci.

Après m'être également assurée de l'hydratation de Chesters et d'Adan, je gagne la salle de bain reliée à la chambre et commence à retirer mes chaussures. Mes orteils souffrent et je transpire de la tête aux pieds avec ce sport de déménagement. Soudain, un pincement douloureux surgit dans le bas de mon ventre et je grimace. Outch ! J'ai sûrement trop forcé pour que mon corps - si peu - athlétique le supporte...
— Anderson ? Tu es là ?
La voix d'Adan me fiche une gifle invisible et je me redresse, ne sentant plus cette infime douleur qui vient tout juste de me saisir.
— Je suis dans la salle de bain.
En un coup de vent, Adan apparaît et je prends sur moi pour ne pas saliver sur son torse mis à nu.
— Chesters et Veronica sont rentrés chez eux et le camion a été emmené, tout est réglé désormais.
— Oh, parfait.
Je souris, déconcentrée et Adan penche la tête sur le côté, d'un air innocent.
— Qu'y a-t-il ?
— Rien, tu comptais te doucher ?
— Eh bien, oui, toi aussi ? demande-t-il, soudainement proche de moi.
— Non, il faut que je range le reste des affaires alors...
Je contourne son corps, cherchant à fuir loin de lui et de ses phéromones tentateurs lorsqu'il attrape mon poignet avec une douceur inquiétante.
— Adan ! Grondé-je, tu es tout collant et...transpirant !
— Et puis ? Toi aussi, non ? C'est de ta faute si je suis collant, transpirant et courbaturé.
— Ah ! Tu plaisantes, j'espère ?
— J'en ai l'air ? réplique-t-il, le visage plus que sérieux.
— Crétin...sifflé-je tandis que ses lèvres s'ourlent dangereusement. Il est inépuisable...

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Haut Niveau - Tome 2 -Where stories live. Discover now