Chapitre 12 : Un froid cinglant (2/2)

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Minuit est passé depuis quelques heures, mais je n'ai pas réussi à trouver le sommeil. Je me tourne et me retourne dans mon lit, cherchant désespérément à balayer les images de cette journée pourrie, et étouffe dans mon propre azur chagriné.

J'ai bien tenté de me changer les idées en me levant un peu. Juste histoire de me rafraîchir avec un verre d'eau bien frais, de me défouler les jambes dans le couloir, et de m'abrutir avec la lumière aveuglante des toilettes. Lorsque je suis retourné dans mon lit, rien n'a vraiment changé. L'insomnie reste sensiblement la même et je flingue toutes mes chances de rejoindre les désirés bras de Morphées, en ressassant tout ce que j'aurais pu dire et ne pas dire. C'est toujours comme ça.

Les meilleures phrases, celles qui taclent ou apaisent le plus, selon la situation, nous viennent à l'esprit quand cette situation est dépassée justement. Et pour le coup, elle est bien – très bien ! – dépassée.

Je ne m'attendais pas à voir Angèle connectée sur Messenger au moment où j'ai fini par succomber à mon addiction pour mon téléphone, et que j'ai ouvert comme par habitude l'application. Bien sûr, j'ai tenté de pianoter quelques mots, mais tous sonnent faux, même un simple « ça va ? » car non, ça ne va pas.

Elle est en ligne parce qu'elle est aussi triste que moi, et est peut-être en train de pleurer en laissant défiler les photos de nous deux ensemble. Ou a-t-elle opté pour une série nanar – ce qui reste le meilleur outil quand il s'agit d'oublier les peines de cœur ? Je me couperai un bras pour me transformer en petite souris, me faufiler dans sa chambre et espionner ce qu'elle fait... Mais je n'y pense pas trop fort, car je ne sais pas de quoi Jack est capable de faire.

Me métamorphoser en rongeur ? Ça doit être dans ses rayons !

Mes élucubrations mentales s'étirent, de manière pas toujours très logique, et occupent mes pensées. Dès que je ferme les yeux, c'est cet après-midi ratée à la patinoire qui réapparait ; et force est de constater que ma dispute avec ma meilleure amie et les larmes de Jack, intéressent bien plus mon subconscient, que mes gamelles sur la glace.

Je sèche mes yeux humides – c'est simplement l'effet de la lumière sur mes pupilles mal dilatées, OK ? – et me tourne sur le côté. Mon mouvement est lent et silencieux pour ne pas réveiller mon étrange colocataire. À croire que cela a une importance. En cette heure avancée de la nuit, y-a-t-il quelque chose à faire ? Pourquoi attendre demain matin me semble-t-il si impossible ? J'ai cette certitude qui m'oppresse la poitrine et m'empêche de respirer, qu'il y a de ces mots qui ne savent pas attendre.

Après l'avoir serré contre ma poitrine, et avoir refoulé la peine qui me déchire le cœur, je remets l'écran de mon portable devant mes yeux, et décide de l'appeler. Je n'ai rien à perdre, de toute façon.

La sonnerie retentit quelque fois.

Mon regard est rivé vers l'écran.

Quelle personne censée téléphone-t-elle après minuit ?

Chaque « bip » m'assène un nouveau coup dans les poumons. Ils me font de la peine et finissent par faire remonter la rage. Ce n'est pas de me faire de fausses idées ou d'être parano, que d'accepter qu'elle fasse exprès de ne pas répondre. Son voyant vert n'a pas disparu. Angèle n'a juste pas envie de discuter.

Je balance mon téléphone au travers de la chambre. La chance a quand même fait qu'il soit juste tombé sur une pile de vêtements sales, que ma mère me supplie depuis deux semaines de mettre dans la machine.

Mon attention se déporte sur Jack. Je ne l'avais vu entrer, mais mon chat s'est blotti contre lui, et les deux semblent dormir paisiblement. Pourtant, c'est plus fort que moi, il faut que je trouve une oreille à qui partager tout ce qui me remplit la tête. Quand je parle de questions inutiles et sans réponse, qui pourrissent mon équilibre mental, ce sont bien elles.

Le garçon aux yeux d'hiver [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant