FOREIGNERS.47.

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Alea.

On est en route pour les festivités, enfin, si je peux appeler ça comme ça. Personne ne parle, ni lui ni moi n'osons briser le silence qui s'est installé à l'instant où nous sommes montés dans cette voiture.

Je ne sais pas quoi penser ou dire. Je suis mitigée entre cette situation très spéciale et le geste de Nacio. Un geste qui m'a touchée plus qu'il ne le devrait, on ne m'a jamais fait une telle attention. Venant d'un homme qui me détestait et qui m'a tiré dessus, c'est étonnant. On n'a jamais vraiment parlé de ce que l'on représente l'un pour l'autre, mais, je sais que je ressens plus que de la sécurité, c'est comme un besoin, une drogue. Une drogue extrêmement addictive portant le nom de Nacio Arpidio. Quand on y touche une fois, on est foutu, dans la merde.

On s'est créé une sorte d'habitude. On pourrait dire que notre relation est malsaine, mais moi, je ne la vois pas comme ça. Je la vois plus comme ma résurrection, j'ai pu prendre mes ailes et m'envoler de tous mes mal-être. Je n'ai pas la prétention de dire que je suis guérie, parce qu'on ne guérit jamais complètement de traumatismes, mais j'ai su les contourner.

Ma façon de penser a complètement changé. Il y a quelques années, j'étais au bord du suicide, tandis que maintenant, je vis avec. Ce n'est pas si simple de vivre chaque jour d'une vie avec quelque chose qui vous pèse sur le cœur, c'est même impossible. J'ai réalisé que la vie était semée d'embûches, que chacun ne méritait pas ce qui lui arrivait, mais que la vie était faite ainsi. Beaucoup d'injustices existent, mais il faut toujours se relever. Si je n'étais pas sortie de cet hôpital de malheur, je serais sûrement dans un caniveau en train de me faire bouffer par les rats. C'est triste de penser comme ça, mais nos esprits sont contaminés par des idées noires, des idées que j'ai su surmonter avec difficulté. Quand on veut, on peut, il faut juste un petit peu de détermination et beaucoup d'envie.

- Alea ?

Je tourne la tête en direction de sa voix.

- Hum ?

- Tu pensais à quoi ?

Je soupire doucement avant d'observer la nuit tomber par la fenêtre.

- À plein de choses.

Je sais qu'il est stressé et angoissé à cause du rôle révélateur qu'il va devoir jouer. Voir Nacio dans cet état est perturbant, il est tout le temps tellement sûr de lui que le voir douter ou hésiter m'angoisse. Il est malheureux de devoir reprendre ce business, il ne m'a rien raconté sur l'histoire de tous ses traumatismes, mais ce cartel en fait clairement parti. Nacio est très pudique sur sa vie, et même sur ses relations. Il reste discret et n'exprime pas ses sentiments, pourtant ses yeux ne trompent pas. Ils ont pris cette couleur gris foncé presque noir, qui me prouve qu'il n'est pas dans son état habituel.

- Tu sais, ma grand-mère me disait toujours que les défunts veillaient sur nous via les étoiles. Alors, dis-toi qu'Erina t'observe et est fière de toi et de l'homme que tu es devenu.

Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai envie de le rassurer. Sa vie n'a pas été facile, mais jamais, il ne s'est apitoyé sur son sort. Je l'admire pour sa force et sa loyauté.

- J'espère qu'elles sont fières de moi.

Sont ?

Alors, elles sont deux.

Il inspire un coup et se lance.

- Ma mère.

Je fais les liens dans ma tête et réalise tout à coup.

- Mais... Tu m'as donné son collier ?

Il acquiesce et garde le regard fixé sur la route.

Pourquoi-a-t-il fait ça ?

ForeignersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant