Chapitre 4

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- Gauthier ? Viens à mon bureau.

Le susnommé leva la tête en direction de l'enseignant et se dirigea vers lui, les sourcils froncés, pendant que ses camarades prenaient la porte les uns après les autres. En tournant la tête, il croisa le regard de Clément qui était visiblement curieux de savoir pourquoi l'enseignant souhaitait lui parler. Gauthier l'avait aussi été pendant l'espace d'un instant, avant de comprendre. Il n'y avait pas plusieurs raisons possibles à cet appel : il avait fait une bêtise et allait être puni.
Alors il soupira intérieurement en s'approchant du bureau. Ce n'était pas une bonne manière de commencer la semaine.

Il ne fit pas le malin quand il se retrouva face à l'adulte alors que tous les garçons étaient à présent sortis de la salle de classe. Il était impressionnant de par sa carrure, encore plus avec le regard qu'il lui lançait. Il le prenait très clairement de haut, comme tous les professeurs qui enseignaient ici. Les élèves n'étaient pas encore digne de leur respect, jusqu'à ce qu'ils soient de bons adultes.

- Tu sais pourquoi je veux te parler, Gauthier ?

Le garçon secoua lentement la tête de gauche à droite, le menton baissé vers le sol.

- Vendredi soir, les toilettes du hall ont été retrouvées dans un état pas possible. La gouvernante nous a ensuite dit qu'elle t'avait vu avec de la terre sur tes vêtements.

Gauthier insulta mentalement cette dernière. Il lui avait donné une fleur et c'était de cette manière qu'elle le remerciait. Personne n'était de confiance ici, même quand on le pensait.

- Je voulais lui offrir un-

- Ne réponds pas. Tu seras collé toute cette semaine, une heure chaque soir. Tu nettoieras les murs extérieurs et les tables de cette salle.

Gauthier acquiesça, docile.
L'enseignant décida pour une raison inconnue de faire passer une longue minute dans le silence, probablement dans un but d'asseoir son autorité. Gauthier osait à peine respirer.

- Tu peux aller rejoindre la gouvernante dehors, elle t'attend pour te donner le matériel, dit finalement l'adulte.

Le garçon, les mains dans le dos, baissa légèrement son buste respectueusement en direction de l'adulte avant de quitter la pièce en silence.

Lors des trois premiers jours de la semaine, il s'était effectivement attaqués aux murs extérieurs. Il faisait froid, c'était encore l'hiver. Mais pour les adultes de l'internat, ce n'était pas une raison suffisante pour ne pas le laisser une heure dehors à frotter les saletés tout en restant quasiment immobile. Ils eurent seulement pitié en fin de semaine quand il se mit à pleuvoir.

Ce jeudi, Gauthier était donc seul dans la salle de classe et nettoyait depuis plusieurs minutes le bois d'une table. Il y avait des taches d'encres et d'usure qui partaient difficilement sous ses coups de chiffon. Son esprit s'était égaré quand la porte de la salle s'ouvrît dans son dos. Il sursauta et tourna la tête.

- Entre, tu aideras Gauthier. Et ne t'avises pas de recommencer.

Gauthier arrêta tout mouvement en observant Clément entrer. La porte se referma derrière lui et leur regard se croisèrent dans un silence.

- Qu'est-ce que tu fais là ? demanda Gauthier.

- J'ai répondu au surveillant.

Gauthier lâcha son chiffon pour se tourner entièrement vers lui. Clément aussi en tenait un dans une de ses mains, une éponge dans l'autre.

- Pour être avec moi ? Tu es fou, tu aurais pu être bien plus puni.

- Je suis un bon élève, je savais que je ne risquais pas grand chose. Et puis je culpabilisais un peu, c'est de ma faute si tu as été puni toute cette semaine.

Gauthier esquissa un sourire. C'était leur faute à tous les deux. Pourtant, il n'avait plus l'impression d'être en punition maintenant qu'il était avec Clément.

- Je suis content que tu sois là. Viens, je vais t'apprendre à nettoyer une table. Ce n'est pas super intéressant mais ça a un côté satisfaisant.

Le brun pouffa en se plaçant à côté de Gauthier et ils firent tous les deux face à la table.
Gauthier posa son éponge sur le bois et Clément l'imita. Il répéta des mouvements circulaires, mais rapidement son auriculaire se posa sur le dos de la main du brun, qui arrêta aussitôt son geste.
Par réflexe, Clément leva les yeux vers les fenêtres. Heureusement, personne n'était dehors par ce temps pluvieux.

- Je ne t'ai pas pris dans mes bras depuis trois jours, marmonna Gauthier.

- Tu me manques aussi.

Gauthier soupira puis sur un coup de tête, il se tourna vers le brun pour serrer son corps contre le sien. Il sentit Clément se crisper et essayer de reculer, mais Gauthier l'en empêcha.

- Gauthier, arrête. Lâche-moi.

Le plus grand cacha son visage dans le cou du brun et y posa un baiser avant de le laisser s'éloigner.

- Ne fais plus ça, quelqu'un aurait pu entrer, le réprimanda Clément.

- Mais personne n'est rentré.

Le brun roula des yeux en cognant doucement son épaule contre la sienne.
Gauthier n'avais pas aussi sourit depuis des jours. C'était incroyable la manière dont sentir la présence de Clément à ses côtés le rendait pleinement heureux.

- Tu es super beau aujourd'hui, j'aime tes cheveux, fit Gauthier en touchant avec son index quelques mèches.

- Arrête, grogna Clément en repoussant sa main.

Gauthier afficha une petite moue puis examina rapidement la pièce d'un coup d'œil.

- Viens.

Il se dirigea vers l'un des coins de la salle, juste derrière la porte d'entrée et en face du bureau du professeur. Il posa son éponge sur ce dernier et s'accroupît contre le mur, faisant silencieusement comprendre à Clément de faire de même.

- Regarde, on ne voit pas les fenêtres d'ici. Et si jamais la porte s'ouvre, je ferai mine de nettoyer le tableau et toi le bureau. Ok ?

Clément hésita un instant avant d'acquiescer en prenant place à côté de Gauthier. Ce dernier ne patienta pas plus et se pencha alors vers lui pour encadrer son visage de ses mains et poser ses lèvres contre les siennes à plusieurs reprises.

- Tu es fou, c'est risqué, marmonna le brun contre lui.

- Je ne te force pas à rester m'embrasser, tu sais.

- Je t'ai dit que tu me manquais...

Gauthier rit en enroulant ses bras autour de sa taille, sa tête prenant place sur son épaule. Il sentait Clément se détendre peu à peu contre lui.

- Si seulement il était possible de changer de chambre... Pierre m'a clairement dit hier qu'il avait besoin de dormir avec une fille car il en avait marre de se toucher seul. Je suis sûr qu'il fait ça quand je dors, berk.

- Ew... Moi j'aime bien être avec Louis. Mais il ne fait que travailler, des fois je m'ennuie avec lui.

- On ne s'ennuiera jamais tous les deux. On pourra habiter ensemble plus tard. Chez nous. Tu voudrais ?

- Evidemment.

- Alors je ferai tout pour que ça arrive. Quoi qu'il se passe.

- Promis ?

Gauthier hocha vivement la tête.

- Promis, assura-t-il en posant un baiser sur la joue du brun.

- Je t'aime Gauthier.

- C'est moi qui t'aime, murmura le plus grand en retour.

Les deux profitèrent de quelques minutes de silence avant de reprendre conscience de la situation et des risques qu'ils prenaient à rester l'un contre l'autre aussi longtemps.

- On devrait reprendre ou ils ne verront aucune différence sur les tables, soupira finalement Clément.

Gauthier et lui se levèrent donc et s'éloignèrent à contre cœur l'un de l'autre.
Ils passèrent le restant de l'heure à discuter et rire. Cette heure de retenue était maintenant loin de la notion de punition. Gauthier aurait même souhaité que cela dure encore des heures.

Secret SecretWhere stories live. Discover now