Chapitre 3

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 Maxence

Trois jours. Trois jours que je me fais chier à récupérer les fringues dont les gens ne veulent plus. Trois jours que je les trie dans un entrepôt où la clim fait cruellement défaut. Mais trois jours que je côtoie Anne-Lise, que j'apprends à mieux la connaître.

Parfois, je me dis qu'elle ne vit pas du tout dans le même monde que moi. Elle paraît si naïve sur les relations homme/femme, que sa vision ressemble à celle des Bisounours où tout le monde est gentil et honnête.

Elle m'a présenté son ami Thibault, et j'ai bien remarqué le regard mauvais qu'il m'a lancé, tout en enlaçant la taille fine d'Anne-Lise. S'il avait été un chien, il lui aurait pissé dessus pour marquer son territoire. Pathétique !

— Dis-moi, Max, tu fais quoi ce soir ?

La question est susurrée par une grande brune, qui répond au prénom de Caroline. Contrairement à Anne-Lise, elle n'a rien de la fille de bonne famille. Plutôt de celles qui traînent en boîte en quête d'un mec à ramener pour finir la nuit.

Et depuis mon arrivée, elle me drague sans aucune discrétion.

— Je sais pas trop encore, j'ai rien décidé.

Elle attrape ma main, et, avec un gros feutre noir, note son numéro de téléphone.

— Si tu as besoin de compagnie, appelle-moi !

Vivement, elle me plaque un smack à la commissure des lèvres avant de partir avec un petit salut de la main. Un instant, je mate son joli petit cul se dandiner, l'imaginant très bien en levrette devant moi.

— Anne-Lise, tu veux que je te raccompagne ?

Voilà le toutou qui vient quémander l'attention de sa belle.

— Non, c'est bon Thibault. Je rentre avec Maxence.

Ah bon ? Première nouvelle. Je jette un œil à Anne-Lise qui me supplie du regard de ne pas la contredire. Je m'approche d'elle, passe un bras sur ses épaules et l'attire à moi. Elle se raidit un peu, mais se laisse aller contre mon flanc.

Son corps épouse le mien, son odeur naturelle – je sais qu'elle ne porte pas de parfum – vient me chatouiller les narines. Ma queue qui apprécie ces différents contacts frétille dans mon boxer.

— Oui, Anne-Lise me fait visiter la ville.

Je lance un sourire goguenard à Thibault, et sans lui laisser le temps de s'incruster, entraîne Anne-Lise dehors. À regret, je la relâche, mais elle ne s'éloigne pas tant que ça. Nos bras se frôlent, nos doigts s'effleurent.

Je pioche mon portable dans la poche arrière de mon jean entre le numéro de Caroline dans mes contacts.

— Tu... tu vas l'appeler ?

— Peut-être.

Du coin de l'œil, j'observe ses réactions. Ma réponse ne semble pas lui plaire, ses lèvres sont pincées en une fine ligne de mécontentement.

— Tu ne devrais pas ! assène-t-elle.

— Ah bon ? Et pourquoi ?

— Ce n'est pas une fille... convenable.

— C'est-à-dire ?

Levant les yeux au ciel, Anne-Lise rougit avant de dire très vite.

— Elle couche avec tous les garçons.

Mon rire s'étouffe dans ma gorge devant son air outré.

— Et donc ce n'est pas convenable ?

— Bien sûr que non ! Elle aurait dû se préserver pour son futur mari, au lieu de se vautrer dans le stupre et la luxure !

Stupre ? Luxure ? Non, mais sérieux, où va-t-elle chercher tous ces mots ?

— Mais comment savoir si celui qu'elle va épouser sera celui qui lui donne le plus de plaisir, si elle n'en essaie pas plusieurs avant ?

Vu la tête que fait Anne-Lise, je dois parler une autre langue.

— Quel est ton parfum de glace préféré entre fraise et pistache ?

— Quel rapport...

— Réponds, je t'expliquerai.

— Fraise.

— Mais tu as déjà goûté la pistache ?

— Oui, mais je n'aime pas.

— Eh bien, le sexe, c'est pareil. Tu testes plusieurs partenaires et tu choisis celui avec lequel tu accroches le plus.

— Mais... et l'amour ?

— Pas besoin pour finir dans un lit.

— Moi, je ne pourrai pas. Quand tu couches avec la personne que tu aimes, c'est encore plus magique, plus intense. Tu as l'impression que ton corps s'embrase, que le temps s'arrête. C'est comme une symbiose !

Au bout de sa longue tirade, Anne-Lise s'arrête, un peu haletante, le rose aux joues. Je la scrute un moment. Serait-elle moins innocente que je ne le pensais ? Et quel homme a eu le plaisir de caresser ses courbes ? Pitié, me dites pas que c'est ce petit merdeux de Thibault !

— Et tu sais tout ça parce que tu as déjà couché avec ton copain ?

Anne-Lise sursaute, rougit un peu plus.

— Thibault ? Non, bien sûr que non.

Merci mon Dieu ! Et pourtant je ne suis pas croyant.

— Donc, avec qui ?

— Mais... aucun voyons !

— Alors... comment peux-tu affirmer tout ça ?

Cette fois, elle devient plus rouge qu'une pivoine.

— Tu promets de ne pas le répéter à Père ?

— Croix d'bois, croix d'fer, si j'mens...

— Ne jure pas ! s'exclame-t-elle en posant un doigt sur mes lèvres.

L'envie de le prendre dans ma bouche, de le suçoter, de le mordiller, me tenaille. Comment réagirait-elle ? Je n'arrive pas à deviner si elle est aussi novice qu'elle le paraît, ou si elle cache bien son jeu envers ses parents.

— C'est bon, je ne dirai rien, tu as ma parole.

— J'ai des amies qui m'ont offert une liseuse dans laquelle elles avaient téléchargé des romans... enfin, tu vois.

Cette fois, j'éclate de rire. En fait, elle ne connaît rien de rien que ce soit pour l'amour ou le sexe. Juste ce qu'elle a lu dans des récits érotiques.

— Ne te moque pas de moi !

— J'oserai pas...

Mais ma quinte de rire repart de plus belle.

— Est-ce que, au moins, tu as déjà embrassé un garçon ?

Alors qu'elle s'apprête à ouvrir la porte de l'immeuble, elle se tourne vers moi, me jette un regard noir avant de rétorquer vertement.

— Bien évidemment !

Et elle grimpe rapidement les escaliers en me laissant en plan.

Mon interdit (Edité chez Vipérine)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant