21 avril 2025, à l'hôpital.
Cela fait trois jours que je suis en pleine possession de ma conscience. Trois jours pourtant que je suis dans le flou le plus total et que personne ne semble disposé à répondre à mes questions.
J'ai appris par mon infirmière que seuls les membres de ma famille étaient autorisés à me rendre visite, raison pour laquelle les seules interactions que je puisse avoir avec le monde extérieur sont Owen et Charlie. Je me suis laissé entendre que ce dernier s'était fait passer pour mon frère afin de pouvoir entrer dans l'hôpital mais je ne suis pas dupe. Je sais bien que quelque chose cloche.
La raison pour laquelle j'ai décidé de ne pas fouiner outre mesure reste mon état de fatigue extrême. Malgré le fait que j'ai dormi pendant plusieurs mois mon corps n'a pas récupéré, bien au contraire. Ce matin, je dois commencer les séances de rééducations pour réapprendre à mon corps comment fonctionner par lui-même. Ça me terrifie.
- Prête pour le grand plongeon ? s'exclame Allie, mon infirmière tout sourire.
J'essaie de lui répondre que oui mais le son reste bloqué dans ma gorge et je grimace. Seigneur je suis plus stressée que je le croyais.
- Allons, je suis sûre que tu vas t'en sortir ! Owen a insisté pour être présent, il est passé par là lui aussi mais si tu préfères le faire seule je n'aurai aucun scrupule à l'envoyer balader.
- Ça devrait aller, je marmonne.
Voilà deux jours maintenant que nous avons eu « la discussion », à savoir qu'on ne m'a pas laissé en placer une et que Charlie et Owen ont mis un point d'honneur à m'empêcher de poser des questions. D'après eux je suis encore trop fragile pour connaitre tous les détails, je sais juste qu'Owen et moi avons eu un « accident » qui m'a plongé dans le coma et a failli couter sa jambe au batteur.
Autant dire que cette explication ne m'a pas suffi.
Je rumine encore et encore cette histoire tandis qu'Allie pousse mon fauteuil jusqu'à l'ascenseur pour rejoindre la piscine. Car oui, ce n'est pas un hasard si cette dernière m'a parlé de « grand plongeon ». Nous arrivons à destination à peine quelques minutes plus tard et je laisse la kiné m'expliquer les bienfaits de l'eau et de la nage dans la rééducation. Mon regard est fixé vers l'entrée où j'attends impatiemment l'arrivée d'Owen, n'écoutant que d'une oreille distraite son discours.
Il ne tarde pas à arriver, perché sur ses béquilles. Cela me fait encore drôle de le voir aussi faible après plusieurs mois de rééducation mais Allie m'a laissé entendre qu'il avait dû se faire réopérer il y a peu de temps. Il n'est vêtu que d'un t-shirt et de son slip de bain, laissant apparaître sa jambe blessée sur laquelle il peine à s'appuyer.
- Salut les filles, prêtes à barbotter comme des nouveau-nés ? lance le blond avec un sourire en coin.
- Owen, arrête ton cirque et viens m'aider à la mettre dans l'eau, lance la kiné.
Je ne peux empêcher mes yeux de parcourir son torse musclé tandis qu'il ôte son t-shirt et se glisse dans l'eau. On me dépose sur le bord de la piscine et le batteur m'attrape par les hanches pour me maintenir en position assise. Puis, doucement, il me fait descendre contre son torse dans l'eau tiède. Je ne sais pas ce qui me fait le plus de bien entre l'eau qui clapote sur ma peau ou la chaleur du corps de mon partenaire de baignade. Cela fait si longtemps que quelqu'un ne m'a pas pris dans ses bras, du moins pas de cette manière-là.
Nous évoluons dans le bassin à une lenteur exaspérante. Mais ça fait du bien d'être près de lui, de sentir son souffle dans mon cou tandis qu'il pousse sur ses jambes pour nous faire avancer. J'ai déjà tant de mal à me tenir avec fermeté à son corps, je n'aurais pas pu imaginer une seule seconde pouvoir rester à la surface seule. Ma vue se trouble et je retiens de toute mes forces les larmes qui montent en moi, je ne me souviens pas un jour m'être sentie aussi faible.
