𝓉𝓌𝑒𝓃𝓉𝓎 𝑒𝒾𝑔𝒽𝓉.

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28 avril 2025, à l'hôpital.

Le chemin vers la sortie de l'hôpital se fait dans le silence. Je me demande si ce silence va durer jusqu'à ce qu'on arrive à destination. Mais à peine avons-nous passé les portes menant vers l'extérieur que Charlie se met à parler, continuant son récit.

- C'était un soir de septembre, commence-t-il, on avait rendez-vous chez Izzy et vous êtes arrivées un peu plus tard avec Sav. On a reçu un mail de Kenny nous disant que Netflix avait programmé une dernière tournée hommage après l'annulation de la série. On ne savait pas si c'était une bonne idée mais on a quand même décidé d'accepter.

Il fait une courte pause dans son récit avant de reprendre, la voix chargée d'émotion.

- Les répétitions ont commencé, on avait retrouvé peu à peu l'équilibre du groupe avec le reste du casting et on s'est dit qu'on avait vraiment bien fait de dire oui, ça a en quelque sorte redonné une seconde chance à notre « famille » de se reformer. Même si on s'était perdus de vue depuis un moment les choses semblaient naturelles. On avait déjà vécu tellement de choses ensemble.

Je ne reconnais pas le chemin que nous prenons, aucun indice ne me permet d'émettre d'hypothèse sur l'endroit où nous nous rendons mais mon mauvais pressentiment ne faisait que grandir après avoir quitté l'hôpital. Je n'ai rien répondu et Charlie a continué à parler.

- Notre premier concert était à LA, dans la fameuse salle où tout a commencé. On avait tous de l'appréhension mélangé à l'excitation de revenir sur nos pas après ces mois passés loin les uns des autres. La nuit ne s'est pas exactement déroulée comme prévu.

Sa voix se brise à la fin de sa phrase, signe que quelque chose de grave est arrivé. Je ne reconnais toujours pas la route sur laquelle nous nous trouvons mais quelque chose cloche. Je sais qu'il n'y a pas d'habitations dans ce quartier de la ville signe que nous ne nous rendons pas exactement chez quelqu'un.

- Nous étions tous euphoriques, le début du concert a été magique, c'était comme si nous ne nous étions jamais séparés, comme si on avait toujours été sur scène tous ensemble, comme si rien n'avait changé. Puis c'est arrivé.

Nous passons un grand portail noir et l'appréhension me submerge lorsque je lis le panneau à l'entrée, « cimetière » ...

- Je crois qu'Owen est le premier à avoir compris ce qu'il se passait. Il a lâché ses baguettes et s'est précipité vers les autres pour les mettre en sécurité. Madison était à côté de moi et m'a entrainée avec elle pour nous mettre en sécurité. Je pensais que tu nous suivais, tu n'étais pas très loin derrière nous. Lorsque je me suis retourné pour vérifier où tu étais j'ai vu Savannah tomber à terre.

Les larmes coulent à présent de ses yeux verts et je sais tout au fond de moi ce qu'il s'apprête à dire, mais je refuse de le croire, je ne peux pas, c'est inimaginable. Je ne peux pas croire que ma meilleure amie soit morte et que je ne m'en souviens pas.

- Je me suis précipité vers elle et je l'ai tirée dans les loges avec moi, je ne savais pas où tu étais et pourtant je ne suis pas revenu te chercher, sa voix se brise, j'aurais dû venir te chercher, c'est moi qui aurais dû te sauver. J'aurais dû vous sauver toutes les deux.

J'entends ce qu'il dit mais c'est comme si mon cerveau s'était déconnecté, nous zigzaguons à travers les allées et il reprend la parole, sa voix se brise à chaque nouvelle phrase.

- Elle a été touchée au ventre, d'après les médecins la balle avait transpercé son foie avant d'exploser un de ses reins. J'ai essayé d'arrêter l'hémorragie mais elle perdait beaucoup trop de sang. Tout s'est passé très vite. J'aime à penser qu'elle n'a pas souffert. Elle luttait pour rester éveillée mais je voyais bien que c'était dur pour elle et...

Il étouffe un sanglot tandis que mes yeux se remplissent d'eau qu'ils laissent rejaillir sans aucune retenue.

- Elle est morte dans mes bras, je n'ai rien pu faire pour la sauver et je ne t'ai pas sauvée non plus. Je n'ai sauvé personne en fait. Lorsque les secours sont arrivés et nous ont sortis de là j'ai paniqué. J'ai paniqué parce qu'on ne vous trouvait pas. J'ai paniqué quand on vous a trouvé parce que c'était lui qui t'avait sauvé, c'est lui qui a su te mettre en sécurité. Et je m'en suis tellement voulu d'avoir été si égoïste parce que putain ma meilleure amie est morte dans mes bras et je ne pensais qu'à mon putain d'égo.

Il a arrêté le fauteuil quelques secondes après, malgré ma vue brouillée par mes larmes j'ai pu apercevoir son nom sur la pierre tombale. Je ne pouvais pas croire que c'était vrai, je ne voulais pas y croire. C'était forcément faux. J'étais encore enfermée dans mon rêve et j'allais me réveiller tôt ou tard, il le fallait.

Charlie a fait le tour du fauteuil et ses agenouillé devant moi. Il a passé ses pouces sous mes yeux pour essuyer mes larmes et a emprisonné mes mains dans les siennes. Je n'arrêtais pas de secouer la tête de gauche à droite. Ce n'était pas réel, rien de tout ça ne l'est.

- Nous avons perdu deux amis ce soir-là, continue-t-il le voix tremblante.

Un sanglot s'échappe de ma gorge, non, pas ça. C'était déjà assez dur à encaisser, j'ai secoué la tête de plus en plus fort.

- Margaux il faut que tu m'écoutes, il faut que tu saches toute la vérité pour pouvoir te reconstruire, je sais que c'est dur à entendre mais je dois le dire.

Mes sanglots redoublent d'intensité, je sens mes épaules décoller à chacun d'entre eux et mes larmes coulent à torrent. Je sais qu'il a raison, je sais qu'il faut que je le sache, mais c'est tellement dur.

Il me laisse quelques temps pour me calmer, et lorsque mes tremblements diminuent il continue d'une voix nouée par l'émotion.

- Jer s'est pris une balle perdue, il est mort sur le coup, personne n'aurait rien pu faire. C'est Sacha qui a tiré son corps sans vie à l'abri, pour le préserver, pour Carolynn et les enfants, ça l'a détruit mais il l'a fait. Sa tombe est un peu plus loin si tu veux aller lui rendre visite, on peut tout aussi bien faire ça un autre jour, c'est toi qui décides.
- Allons-y maintenant, j'arrive à articuler.

Il se redresse et nous éloigne de la tombe de ma meilleure amie, autant en finir aujourd'hui, je ne supporterais pas de devoir subir ça un autre jour. Le chemin n'est pas long et lorsque nous arrivons devant la tombe de Jer les larmes se remettent à couleur. J'assimile à peine les informations qui viennent de m'être données et dieu seul sait si je vais réussir à m'en remettre un jour.

J'aurais pu espérer ne jamais me réveiller de ce coma dans lequel mon subconscient m'a plongé, mais ça n'aurait pas été juste. Ça n'aurait pas été juste pour les gens que j'aurais laissé derrière moi, et ça aurait été encore plus injuste pour ceux qui nous ont quitté. Car ce jour-là je me suis promis une chose : j'allais vivre pour eux.

Vous voyez la chanson qui dit « if one of us dies, i hope i die first, cause i don't want to live without you »? Lorsque je mourrai, j'espère mourir la dernière, parce que je refuse que les gens que j'aime aient à subir un jour la peine et la douleur que je ressens à l'heure actuelle.

𝐄𝐃𝐆𝐄 𝐎𝐅 𝐆𝐑𝐄𝐀𝐓.Where stories live. Discover now