Chapitre 17 : l'heure du reveil a sonné

28 6 2
                                    


«Entre les deux, mon cœur balance.»

Charles-Guillaume Étienne

***

On me saisit par les épaules et une douleur fulgurante monte dans mon épaule droite, celle qui a heurté le mur en premier.

–Éléonore, c'est moi ! Ne bouge pas ! Je vais t'enlever ça ! Que s'est-il passé ?! s'inquiète une voix familière.

On m'enlève le sac et j'aperçois le proprio, le visage déformé par l'inquiétude. Je ne peux m'empêcher de détourner la tête lorsqu'il pose ses yeux sur moi. Je ne dois pas ressembler à grand chose... Je ne veux pas qu'il me voit si faible... J'ai honte. Honte de ne pas m'être défendue. Encore une fois. Je suis d'habitude plus forte que ça. C'est décevant ! Je me déçois.

Il me prend dans ses bras et me serre fort. Il rapproche ma tête de son torse. Je peux entendre les battements de son cœur battre à une vitesse folle. Je sens son doux parfum. Je perçois la fermeté de son torse musclé. Ancrée dans le moment présent, mes sanglots se tarissent et je me sens rassérénée.

–Je suis venu aussi vite que j'ai pu quand j'ai entendu les cris, annonce-t-il. Yuan est enfermé dans une cellule plus loin, Maria essaye de lui ouvrir.

Il m'écarte de lui et observe les liens qui entravent mes poignets dans mon dos. Je suis son regard effrayé. Tout est couvert de sang, tellement j'ai essayé de m'extirper de là. Même constat pour la paume de ma main, où coule du liquide rouge vif à partir d'une entaille probablement faite par le coupable.

Il regarde autour de lui et voit quelques mètres plus loin le couteau qu'il m'a donné. Il est plein de sang, assurément le mien. Il secoue la tête et prend son visage dans ses mains.

–C'est de ma faute. Je n'aurais jamais dû te donner ça ! À quoi je pensais ?!

Je n'ai pas le temps de nier, car Yuan arrive, talonné par Maria. Dès qu'elle entre, elle observe les murs, atterrée. Nous suivons son regard. En effet, la scène paraît tout droit sortie d'un film d'horreur. «Épouse-moi ou elle périra encore une fois» est écrit en grand sur le mur sur lequel j'ai vu les autres inscriptions. J'ai des gros haut-le-cœur en pensant que ça a sûrement été en grande partie fait avec mon sang. Je réprime tant bien que mal mes nausées et m'oblige à inspecter les autres écritures. «Je vais la tuer.», «Mon amour, reviens-moi.». Je tique sur le « encore une fois ». Ça corrobore l'histoire du proprio. Yuan se tourne vers lui.

–C'est dingue. Comment elle va ?

Je souhaite lui signaler qu'il peut me parler directement à moi, mais rien ne sort. Je suis encore trop choquée. 

Il me regarde et me détaille de la tête aux pieds. Il prend un air inquiet lorsqu'il voit mes poignets et ma paume en sang. Il s'approche et coupe les liens à l'aide de son couteau. Ses mains sont aussi à présent teintées de rouge. Je ramène mes bras devant moi et observe les dégâts en grimaçant. Autour de tout le sang, des lambeaux de peau pendent de mes poignets. La peur s'étant petit à petit amenuisée, je ressens très clairement la douleur que cela me procure. Ce n'est pas en voyant l'état de ma main gauche que je suis rassurée. L'entaille est assez profonde et les coulées de sang ne se tarissent pas. Si je suis encore une douillette en sortant d'ici, ce serait étonnant ! Je réfrène les larmes qui menacent de couler à nouveau en réponse à la douleur lancinante que je ressens.

La malédiction de Bergham [terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant