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wooyoung

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wooyoung

Le brouhaha de la place du marché écorche mon audition. Mon cul commence à se plaindre du confort de la caisse en bois sur laquelle je suis assis.

Dans un lent mouvement, je me redresse en continuant de mordiller un brin de foin.

Si le piaillement des gens paraît habituel, il n'en est rien de leur comportement. Tous se ruent sur le panneau d'affichage, on dirait des rapaces qui se disputent une proie bien trop maigre pour elles. Le spectacle est ennuyeux.

Mes pas contrent ceux de la foule tandis que ma mauvaise habitude à laisser courir mes oreilles sur les messes basses s'installe.

- C'est la première fois que je vois une telle chose depuis des siècles !

- Je te l'avais dit que c'était un roi pas comme les autres.

- Il est quelqu'un de bien.

Je ne peux réfréner un haussement de sourcils. La curiosité qui est en train de me dévorer me pousse à interpeller Walt, un ami d'enfance, à quelques mètres du maréchal-ferrant.

- Walt ! Je crie en trottinant dans sa direction.

- Oh Wooyoung ! Il sourit. Tu te balades encore ?

Je hausse les épaules.

- J'ai déjà fini les tâches que m'a donné ma mère.

- Donc tu t'entraînais encore à te battre ? Il sourit comme si c'était évident en reprenant sa route vers le centre du village.

- Non, je regardais les gens.

Pour quelqu'un comme lui, ça peut être étonnant. Je passe la moitié de mon temps à taper dans des troncs d'arbres en pleine forêt ou bien me battre dans les rues contre des adolescents aux intentions malveillantes. Les corvées sont le cadet de mes soucis contrairement à lui.
Ses parents ont une ferme proche de la chaume dans laquelle j'habite. Il se doit de mener à bien son travail au risque de mettre en danger le commerce familial.

- Surprenant.

- Mmh, d'ailleurs, il semble qu'une annonce fasse fureur, je débute en observant la terre noircir mes chevilles.

- À quel sujet ?

- Celui du roi.

Abasourdi, il lâche les poignets de sa charrette.

- Purée, marmonne-t-il sous le choque, mais Wooyoung qu'est ce qu'il t'est passé par la tête pour ne pas être allé t'informer ?!

Un léger sourire fend ma commissure tandis que ma main frotte maladroitement ma nuque.

- Ah Walt...tu sais que je me fiche un peu de l'actualité bourgeoise, et puis je t'ai aperçu donc je m'étais dit qu'on aurait pu y jeter un œil ensemble !

Il lève désespérément les yeux au ciel.

- Parmi tous les défauts du monde, il a fallut que le pire des tiens soit la flemmardise.

Ses mots grincheux me peignent une grimace.

- Comment ça "flemmard"? Je suis sportif d'abord !

Nous nous arrêtons devant un étalage de légume.

- Justement, c'est ce qui déplaît à ta famille. Tu ne sais pas te servir de tes mains.

Je soupire.

Walt a raison, lui et moi nous connaissons depuis le berceau, enfin je le connais depuis sa naissance. J'avais cinq ans. Malgré notre différence d'âge, rien ne nous distingue. Habitant tout les deux proche de la forêt, pas un jour n'est passé sans que l'on ne se soit vu grandir.

Nos parents sont amis, tout comme nos aïeux l'étaient. Des liens forts unissent nos familles depuis des générations, liens qui ne se perdent pas. Walt est comme mon petit frère.

- Je sais.

Un sentiment d'impuissance reprend le chemin vers mon cœur pendant que j'aide le blond à décharger les kilos de légumes.

Je ne me suis jamais senti à ma place ici. Ce mal-être est apparu dès mon plus jeune âge, quand je ne parvenais pas à accomplir un travail attribué aux hommes comme celui de couper le bois, manier le marteaux ou encore forger le fer.

Lorsque mon père a perdu tout espoir professionnel en moi, c'est ma mère qui s'est attelée à la charge de trouver ma voie.
Si je n'étais pas doué pour un métier d'homme, c'est que c'était un métier de femme, disait-elle.
Malgré que ce soit dur à entendre pour mon père, il avait acquiescé en lui souhaitant bon courage.

Évidemment, je n'ai aucun don naturel. En deux jours j'avais cassé trois aiguilles, saigné cinq fois du doigt ainsi que gâché nos dernières réserves de farine en cuisine.

- Je préfère faire ce qu'il me plait plutôt que d'être triste à essayer de construire un avenir qui ne me convient pas.

Walt garde le silence, et je l'en remercie intérieurement. Il a conscience que ma situation familiale comme financière sont des sujets sensibles dont je ne préfère pas parler, surtout en sa compagnie. Pourtant, même avec son calme habituel, son regard trahit peine et tristesse.

Mais c'est malheureusement la seule personne sur qui je peux aveuglément me reposer.

- J'aurais aimé que les choses soient différentes. Un faible courant d'air et l'amertume me déforment les joues. Tu sais, je continue de faire ce vœux chaque mois d'août lors de la nuit des étoiles filantes, j'avoue.

Que tout soit différent.

Les lèvres du blond se crispent avant qu'il ne me fasse entièrement face en proposant : Bon, ça te dit qu'on aille prendre connaissance de tout ça maintenant qu'on a fini ma corvée ?

Je pouffe.
Walt a toujours su comment détendre l'atmosphère.

La malice se colle à mon visage. Injustement, je commence ma course en prévenant :

- Le dernier arrivé paye le pain à l'autre !

- Hé ! Tu triches ! T'es parti avant ! S'écrie-t-il.

𝗮𝗻𝗵𝗲́𝗱𝗼𝗻𝗶𝗲 [woosan]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant