VI - Déception amoureuse

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— Dis-moi ce que tu lui as fait !

Je crie à travers tout le château, sur les talons de Lucius qui longe le couloir donnant sur la serre, là où il nourrit ses bêtes. Ce sont deux Ombres Obscures, elles ressemblent à des chiens enragés, longues de deux mètres au moins, elle sont terrifiantes et ne feraient qu'une bouchée d'un être humain.

— Ça suffit, tu n'es pas obligée de tout savoir !

— Bien-sûr que si ! Je suis la reine je te rappelle ! Les décisions doivent se prendre à deux !

— Je n'en ai que faire, moi je suis roi, j'ai tous les pouvoirs.

— Alors dans ce cas, tu aurais dû laisser ce poignard planté dans mon coeur !

Il se retourne brusquement, saisit mon cou de sa main et me plaque brusquement contre le mur. Sa main se resserre, il m'étouffe presque, je me tiens sur la pointe des pieds et dois affronter son regard ténébreux.

— Je t'interdis de dire de telles insanités.

— Je ne suis pas reine, tu m'emprisonnes...

— Évidemment que non, je te protège.

— En me mariant avec un mercenaire ? Il a tranché la gorge de cet homme sans aucune once d'hésitation ! Penses-tu qu'il me protègera, lui ? Non ! Il risquerait de me faire du mal !

Lucius me fixe un instant les sourcils froncés avant de relâcher la pression qu'il exerçait sur ma trachée. Il pose ses mains sur ses hanches et pousse un profond soupir.

— Je sais que tu es amoureuse de Tadëus.

Je ne rétorque rien, je croise simplement les bras et demeure appuyée contre le mur.

— Cependant, Dysteria est une Nation mourante.

— Toutes nos Nations se meurent...

— Non, celles qui sont atteignables renaîtront et c'est à cet instant que notre nouvelle Ère prendra tout son sens.

Je détourne le regard et le pose sur le pot de fleurs fanées qui repose sur une petite table de décoration contre le mur à ma gauche, juste à côté d'une fenêtre cachée par ces épais rideaux rouges...

— Ma sœur, même si tu es mariée à ce mercenaire puissant, personne ne t'empêchera d'avoir des amants.

Je lui jette un regard, les sourcils haussés.

— Il tuerait mes amants, soufflé-je. Mon amant...

— Non, pas tant que je serais en vie.

Remarquant que je ne dis pas un mot, Lucius détend ses bras et se rapproche de moi.

— J'ai besoin d'une armée, la concevoir me demande de me creuser la tête. Je ne suis pas idiot et je sais qu'un jour ou l'autre, on tentera à nouveau de m'emprisonner dans une minuscule cage.

— Ton frère est mort.

— Je ne croirai pas en sa mort tant que je n'aurai pas vu sa dépouille. J'ai toujours été prévoyant et c'est ce qui m'a sauvé. Je me dois d'être deux fois plus vigilant cette fois, certains savent que j'ai des faiblesses, ils savent que je peux être arrêté.

Il marque une pause et me jauge. J'ai l'impression qu'avec moi, c'est le seul moment où son regard ne paraît pas si sombre, comme si dans ces prunelles obscures, on y descellait ce petit éclat noisette qui venait illuminer les ténèbres comme le soleil chasse les nuages sombres après un orage.

— Alors... je dois me marier avec Eliel... car il pourra renforcer ton armée ?

— Grâce à cela, Irondell sera avec moi.

Invocatrice de l'Ombre T.3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant