𝐍

57 25 15
                                    

d r o w n i n g

j'étais belle. c'était un fait.

pas comme ces célébrités, qu'on adulait sous les feux des projecteurs. ni comme ces mannequins filiformes aux visages lisses. je n'étais pas dotée d'une beauté exceptionnelle, qui faisaient valser les regards sur ma silhouette, mais j'étais simplement belle.

et puis, dans le fond, la beauté était subjective. on pouvait apprécier l'essence d'une œuvre d'art, et ne pas accrocher avec une autre. tous les styles différaient. les perceptions allaient avec. d'ailleurs, c'était bien connu ; les goûts et les couleurs ne se discutaient pas.

selon ma perception, donc, et en accord avec mon propre style, je me trouvais belle. les influenceuses beauté, ou bien-être, répétaient sans cesse qu'il fallait apprendre à s'accepter telle que l'on était ; une belle philosophie, en surface.

mais compliquée, en profondeur.

on changeait difficilement les idéaux ancrées en soi depuis toujours.

il ne suffisait pas de s'accepter, puisque le concept même se construisait à partir de plusieurs étapes continuelles.

et il fallait les appliquer encore, et encore, et encore.

tout le temps. pour s'en convaincre.

spencer était belle. c'était un fait.

spencer avait un charme propre à elle, un charme dans lequel on pouvait toutefois se retrouver. elle ne rentrait pas dans les standards de beauté que la société attendait des femmes. mais spencer était belle, parce qu'elle avait ses propres standards, et qu'ils lui allaient à ravir.

ce que la société pouvait affubler de défauts, spencer montrait qu'ils étaient surtout une grande qualité.

oui, la beauté était subjective. mais les gens n'étaient que purement objectifs quand il s'agissait de complimenter la demoiselle. spencer ne les comprenait pas vraiment, elle qui voyait son corps et son visage dans un spectre obscurci par ses craintes.

un filtre. quand elle se regardait dans le miroir, spencer ne voyait qu'un reflet caricatural de sa personne,

un reflet qui n'en était pas un,
un reflet qu'elle condamnait.

spencer se voyait différemment. et ça lui faisait mal ; ses larmes prouvaient ce triste constat.

spencer était belle, et elle ne le remarquait pas,

mais,

spencer se noyait.

drowningWhere stories live. Discover now