18. Annabelle

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Assis l'un en face de l'autre, j'observais en silence papa jouer avec le petit bout de papier qu'il avait abandonné un peu plus tôt. Il le posait, le casait dans le coin du sous main, puis le déplaçait à un autre endroit pour reprendre son manège.

— Alors comme ça, tu es rentrée avec l'un des fils Haymes, hier soir ?

Il y a des conversations qu'on a pas envie d'avoir avec ses parents. Il y en a d'autres tout particulièrement qu'on ne veut absolument pas avoir avec son père quand on est une fille, ou une femme. Et c'était ce qui était en train d'arriver et je trouvais ça trop malaisant.

Malheureusement, je n'avais pas le choix, je devais me plier à répondre à sa question. Avec la dispute que j'avais surpris, être honnête avec lui n'était pas du luxe.

— Oui. J'avais trop bu et par soucis de sécurité, il s'est proposé de me ramener chez moi.

Papa s'immobilisa, me dévisageait d'un air soupçonneux et je savais qu'il allait me faire sortir les vers du nez. Sûrement pour être certain de ne pas donner raison à maman.

— Les fils Haymes sont des petits cons, mais ils sont honnêtes et loyaux. Tu es bien sûre qu'il ne s'est rien passé d'autre avec celui qui t'a ramené ?

Au peu de souvenir qui me revenaient en tête et de ce que Casey m'en avait dit, non. Non, il ne s'était rien passé de répréhensible.

— Non. Il m'a juste raccompagné, nous avons discuté de ce que Maxime avait fait et ça s'est arrêté là.

— Et c'est tout ?

Mon dieu, il n'était pas en train de me demander ça !

— Papa je t'ai dit que j'avais bu. Et entre nous je ne suis pas sûre qu'un Haymes sur parjurerait de cette façon.

Il se renfrogna, abandonna son manège avec le bout de papier et passa la main dans sa barbe.

— Et votre escapade de la veille va s'arrêter là ?

Je le dévisageai un instant avec en tête le plan de Casey qui clignotait dans un coin de mon esprit. Malheureusement ou pas, oui j'allais continuer à le voir. Et je me devais de prévenir mon père pour qu'il ne fasse pas une crise cardiaque en l'apprenant par quelqu'un d'autre.

— Non.

Il soupira, s'affala un peu plus dans son fauteuil et bougonna :

— Pourquoi ? Vous n'avez rien en commun.

Je le toisai un court instant et pinçai les lèvres ne sachant comment lui mentir. Il avait raison et je dus me résoudre à broder :

— Il se trouve que Casey est ... charmant. Il n'a en aucun cas abusé de mon état. Il a été plutôt prévenant.

Papa plissa les paupières et m'observa avec intérêt. Il était doué pour deviner les pensées des gens. Et je n'échappais pas à la règle. Mais contre tout attente, il n'insista pas et embraya sur un autre sujet.

— Et comment voit-il la chose ?... En ce qui concerne ton frère.

Cette question me prit au dépourvue. Jusqu'ici, papa ne m'avait jamais demandé mon avis à ce sujet. Enfin, c'était surtout parce que je ne voulais rien à avoir à faire avec la gestion de l'entreprise. Ce n'est pas mon truc les responsabilités. Mais il fallait reconnaître qu'avoir un retour là dessus n'était pas négligeable pour lui.

— Tu penses bien qu'ils l'ont mauvaise. Et je suis bien d'accord avec eux.

Il ne dit rien durant quelques secondes et je compris que la discussion dérivait dangereusement vers celle que je ne voulais absolument pas avoir.

Triple Haymes. Casey. T1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant